lundi 5 mars 2012

Socio urbaine 20 - 02 (cours 3)


Précédemment Socio urbaine 13 - 02





Mondialisation, globalisation et métropolisation


Un des traits marquants du phénomène urbain des années 1970, c’est le retour des grandes métropoles. La période précédente, les Trente Glorieuses était plutôt marquées par une décentralisation. Dorénavant, on repart en arrière : les activités économiques retournent en ville (Paris, Lyon, Marseille, …). Pareil dans les autres pays du monde. Ce redéploiement est en lien étroit avec l’activité économique qui a connu des changements fondamentaux durant cette période. Cela a favorisé l’émergence de nouveaux rapports entre territoires de type « centre à centre » en évitant de passer par les arrières pays. Enfin à cela se rajoute de nouvelles métropoles qu’on qualifie de mondiales et de globales, dont le rayonnement est inédit en histoire.


I.                   Une nouvelle révolution économique

1.      Ingrédients

Trois grands ingrédients se démarquent.

D’abord on constate une ouverture et une libéralisation économique. Après une période de régulation suite à la Seconde Guerre Mondiale, on est entré dans une période contraire où la libéralisation est devenue la règle. Les facteurs qui en sont à l’origine sont d’une part le retour des théories libérales en période de crise économique. On a aussi la porosité grandissante des frontières suite à la fin de la guerre froide. De plus, on un affaiblissement des doctrines protectionnistes qui tombent progressivement (tarifs douaniers, quotas, …). Enfin, on a eu des conversions à l’économie de marché de grands pays émergents (Chine, Inde, Brésil, …), cela fait rentrer dans le jeu une pluralité de nouveaux acteurs puissants.
Cela se manifeste au travers de plusieurs caractéristiques. Une intensification du commerce international, une explosion des Investissements Directs à l’Etranger (IDE), une multiplication des entreprises multinationales (tant sur plusieurs pays que sur plusieurs continents) et une intégration des marchés financiers dans la mondialisation. Le commerce international qui présentait 14% de la production mondiale, en représente aujourd’hui 28%. Son poids a doublé en 30 ans. Le volume des importations et des exportations de biens est passé de 62 milliards de dollar en 1948 en 2007, ils atteignaient 14 000 milliards de dollar. Le commerce international est donc gigantesque. Les IDE pour leur part sont passés de 70 milliards de dollar en 1960 à 1 400 milliards en 2000. L’essentiel, les 2/3 de ces IDE relient les membres de la Triade. Aujourd’hui les pays émergents reçoivent une part grandissante des capitaux des autres pays (Chine, Brésil, Mexique, Indonésie, Corée du Sud, …). Les multinationales sont passées de 64 000 multinationales avec 870 000 filiales et 54 millions de salariés en 2002. 1/3 de la production mondiale passe par ces multinationales, 2/3 des échanges économiques passent par ces multinationales. De même parmi les 100 plus gros budgets mondiaux, 55 sont des multinationales.

La baisse des coûts des transports et des communications. Ces coûts sont tant monétaires que temporels. Aujourd’hui il est possible de réduire grandement les coûts qui autrefois plombaient les budgets. Cette réduction de l’espace temps fait dire à certains sociologues qu’on est dans un village global. Autrefois c’était inimaginable. Fin XIX° siècle, le coût du transport par chemins de fer était 10 fois plus élevé qu’il ne l’est aujourd’hui (0,023 $). 80% des produits transportés à travers le monde ont une valeur telle que le produit de leur transport représente moins de 4% de leur valeur. Le coût de transfert de données de Boston à Los Angeles est passé de 150 $ en 1970 à 0,12 $ en 2000.


Le progrès technologique passe par la révolution informatique et le numérique. Cela a produit un nouveau domaine technologique avec une forte croissance. Tous les secteurs de l’économie sont atteint par ceci. Cela se perçoit dans les produits qu’on utilise, dans les processus de production, dans les centres de conception, de recherches et d’innovations.

2.      Conséquences

Une première conséquence est de rendre la concurrence dans le monde plus acharnée qu’auparavant. Une autre conséquence est l’importance des acteurs mondiaux majeurs comme les grands groupes multinationaux. Une troisième conséquence c’est la globalisation de la production et donc une complexification du jeu économique. Enfin, il y a un développement des composantes immatérielles de l’économie.

La concurrence plus acharnée
Longtemps on maintenait une politique protectionniste pour s’assurer de son économie interne, plus maintenant. Cela se voit par les pressions du capitalisme financier puisque grâce à la concurrence mondiale, alors les investisseurs font pression sur l’économie. Du coup, il y a une recherche pour déterminer les ??? qui consiste à être plus gros et important en incitant à la concentration avec les implications spatiales qui en découlent ? Longtemps le prix faisait la concurrence aujourd’hui il faut une flexibilité, une diversité des produis nouveaux.
Les multinationales prennent une part croissante dans la production mondiale. Les frontières de ces groupes sont extrêmement floues (filiales, fournisseurs, services, …). Faisant de la concurrence entre entreprises pour avoir un monopole, on a des filiales en concurrence travaillant pour la même entreprise. Ce sont ces multinationales qui font et défont la géographie économique mondiale. Chaque unité est localisée à un point avantageux sur le globe et cherche une place pertinente sur cette planète. Lorsqu’il s’agit d’acheter et de sous-traiter au meilleur rapport qualité – prix, là encore on cherche une place intéressante et cela fait que la plupart des ces groupes multinationaux sont implantés sur les 5 continents. Il y a donc un patchwork mondial qui permet de créer un réseau avec d’immenses chaînes logistiques

Complexification du jeu économique
On a un changement d’échelle passant des frontières nationales à un cadre mondial. A terrain de jeu plus large, joueurs plus nombreux. Donc les concurrents sont plus nombreux et les règles plus contraignantes selon l’endroit où on s’implante. L’organisation de la production qui doit jongler entre ces règles devient un enjeu décisif. Ces entreprises qui accentuent l’organisation de la production sont souvent les plus compétitives. Cette stratégie est déterminante mais relativement complexe. General Motors qui n’a pas creusé cette question a donc chuté à cause de cela. Il devient donc difficile et complexe de trouver la bonne stratégie dans cet environnement. C’est déterminant mais difficile à déterminer. Cela conduit au développement des fonctions cérébrales des entreprises. Alors que les multinationales se développent sur toute la planète, les fonctions cérébrales elles se concentrent dans un même espace, souvent les sièges sociaux au sein d’un gratte-ciel.

La composante immatérielle de l’économie
La production de l’idée est devenue une fonction cruciale dans le monde économique. Autrefois ce n’était pas essentiel, aujourd’hui c’est le cœur de la survie d’une entreprise à tout les niveaux de celle-ci (stratégie, innovation, marketing, finances, …). Cela mobilise donc une part croissante du travail dans les entreprises. On en arrive à des situations où les coûts de fabrications peuvent n’être qu’une part minime de l’entreprise à coté des coûts marketing, de recherche, ...
Par exemple dans les années 1980, Nike était proche du dépôt de bilan. Ils ont tout misé sur le service marketing qui a lui-même misé sur l’image d’une star sportive encore peu connue à l’époque Mickael Jordan. Ainsi les coûts versés à ce sportif étaient plus importants que le salaire cumulé des ouvriers qui fabriquaient les vêtements. Idem pour la poupée Barbie qui coûte en moyenne 10 $ coûte 0,4 $ à la fabrication. La différence passe surtout dans le coût marketing, … Idem en industrie pharmaceutique où le coût de fabrication est largement moins cher que le coût en recherche et développement.
Le business de l’informatique aussi intervient.


II.                Métropoles, principaux bénéficiaires

Ces nouveaux changements économiques ont conduit à une nouvelle division interne du travail. Les avantages comparatifs des pays les plus développés ont glissé vers la production d’idées et le travail qualifié tandis que les pays émergents s’occupent plutôt des tâches manufacturières et d’exécution ainsi que le travail peu qualifié à bas coûts.

Les pays développés se spécialisent dans les fonctions de commandement (services de direction, gestion, …), dans les fonctions High-Tech (Recherche et développement, conception et innovation, …), dans les services à haute valeur ajoutée ou  qualifiée (marketing, informatique, droit, …) et enfin dans les fabrications et les assemblages à haute valeur ajoutée ou qualifiées (processeurs). En conséquence, les industries lourdes à faible valeur ajoutée comme la sidérurgie ont quitté le Nord pour les pays émergents. Idem pour les secteurs de fabrication et assemblage à faible valeur ajoutée ou encore les industries de services peu qualifiés (traitement de données). Tout ces emplois peu qualifiés moins intéressants se traduisent par des fermetures et des délocalisations vers des pays où la main d’œuvre est plus abondante et moins onéreuse.
Ces années post-1970 sont alors appelées la période de « création destructrice » selon Schumpeter. Il constate que dans un mouvement ininterrompu et cyclique, des secteurs novateurs viennent prendre la place des secteurs vieillissants et obsolètes. On détruit les emplois déclinants et on en créé dans les secteurs émergents. Pour Schumpeter, cette innovation et ce renouvellement sont à la base du moteur de la croissance.
En France c’est le cas de manière flagrante. En 1974, le pays comptait 5,7 millions d’emplois dans l’industrie. En 2007, on est à 3,4 millions. Dans les services aux entreprises, on est passé de 900 000 emplois en 1960 à 3,3 millions en 2007. Même constat en 1968 où les ouvriers étaient 7,2 millions (36% des emplois) à 5,9 millions en 2000 (25,6%). Parallèlement les ingénieurs, les cadres passent de 1 million en 1968 (5% des emplois en France) à 3,2 millions en 2000 (14%).

Ces créations d’emplois prennent place avant tout dans des métropoles tandis que les emplois détruits étaient surreprésentés dans les espaces non métropolitains. Les petites et moyennes villes mono-spécialisées ont donc connu un coup dur tandis que les métropoles y ont gagné.       Le Nord a perdu 120 000 emplois ouvriers, la Seine maritime a perdu 48 000 emplois, la Moselle 37 000, Paris Ile de France 310 000, … Paris Ile de France a gagné 230 000 emplois de cadres et d’ingénieurs en entreprises (52%), Moselle 3 500 (36%), Seine maritime 5 000 (30%), … Ainsi, malgré tout, le PIB de la France progresse toujours, mais les emplois se perdent.


III.             L’économie d’archipels

La transformation majeure des rapports entre territoires sont le déclin des relations traditionnelles centre-périphérie au profit de relations horizontales centre-centre. Certains préfèrent dire qu’on passe de territoires zones à des territoires réseaux où les relations économiques relient de plus en plus des points disjoints et discontinus qui ne se touchent pas dans l’espace. D’où l’image d’économie d’archipels pour qualifier les principaux espaces métropolitains qui entretiennent l’ensemble des rapports (type Triade).

Cette théorie fut cependant passée au crible par certains chercheurs. Ainsi plusieurs constats reviennent. En étudiant les flux téléphoniques, les recherches de Ludovic Halbert mettent en évidence que les appels des entreprises implantées en Ile de France se dirigent principalement vers Paris (65%) puis vers la France (24%) et seulement 11% vers l’étranger. Lyon est contactée deux fois plus que New-York. Vu comme cela, l’économie des archipels est ébréchée, la proximité demeure toujours. Les principaux pays destinataires à l’étranger sont dans 50% des cas pour les pays européens, puis 22% vers l’Afrique en particulier le Maghreb et seulement 12% vers l’Amérique du Nord. Les 7% restant sont vers l’Asie et l’Océanie.

IV.              Métropoles mondiales et globales

Ce genre de métropoles sert d’interfaces entre des processus globaux et des territoires. Ce sont des villes-patrons ou villes-cerveaux à l’échelle planétaire. Ce sont les centres de coordination de l’économie mondiale, les nœuds d’un système de réseau à la complexité phénoménale. La densité communicationnelle y est extrême.

Saskia Sassen et Georges Friedman distinguent des traits à ces métropoles.
En premier lieu, ce sont des marchés financiers majeurs avec un statut de siège du capital international. Ce sont les lieux d’élaboration et de décisions stratégiques, tout autant que ce sont les lieux de création de produits, de procédés et d’idées.
Autre constat, une forte présence des multinationales des services supérieurs.
Ce sont aussi des centres de communication importants.
On trouve aussi une forme de caractère culturel métropolitain avec une certaine culture et une certaine idéologie du métropolitanisme global.

Les métropoles mondiales sont au nombre de 6 selon Friedman : Tokyo, Los Angeles, Chicago, New-York, Londres et Paris. Saskia Sassen estime qu’il n’en existe que 3 : New-York, Londres et Tokyo. Les recherches du Globalization and World cities (GaWC) veulent se faire spécialistes de cette classification là où Friedmann et Sassen jouaient au nez. Ils mènent deux approches la présence des services supérieurs, qui mettent :
·         En tête les villes α (12 points) : New-York, Londres, Tokyo et Paris.
·         Suivent alors les villes α (10 points) : Chicago, Francfort, Hong-Kong, Los Angeles, Milan, Singapour.
·         En deuxième catégorie on a les villes β (9 points) : San Francisco, Sydney, Toronto, Zurich.
·         Les villes β (8 points) : Bruxelles, Madrid, Mexico et Sao Paulo.
·         Les villes β (7 points) : Moscou, Séoul.
·         Viennent enfin les villes globales γ qui sont plus de 100.

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