jeudi 29 mars 2012

CM n°7 géographie sociale

3- Contradictions et limites de la politique du logement social en France

v Est-ce qu’il s’agit de loger les plus pauvres ou est-ce qu’il s’agit d’assurer la mixité sociale ?

La politique du logement social se trouve toujours divisée entre ces deux impératifs.

La loi Besson et la loi Dalot concerne le logement des plus pauvres. Pour assurer la mixité sociale, le gouvernement a mis en place le PLS (prêt locatif social).

Les ménages populaires, les plus modestes sont majoritairement logés dans le locatif privé de mauvaises qualités. Il n’y a pas assez de logements sociaux pour eux.

A côté de cela il y a tout une politique d’hébergement d’urgence. Ces formes d’hébergements constituent aussi un encadrement social. Un contrôle mais aussi un accompagnement social, car il y a un préjugé qui dit que certaines personnes ne sont pas capables d’occuper un logement social. Les travailleurs sociaux écrivent ensuite un rapport pour dire si les individus sont aptes à accéder un logement social. Cela pose un problème en termes d’autonomie.

Mais aujourd’hui, la politique sociale a pour objectif la mixité. On commence à détruire les logements sociaux, soit physiquement soit en privatisant. Il y a donc des logements sociaux en moins. Cet objectif de mixité, c’est-à-dire, faire venir des classes moyennes dans le parc social, conduit presque à démolir les logements sociaux.

(Fin du cours et nouveau chapitre)

Séance 7 :

Les espaces des classes moyennes

Introduction :

Les politiques de logements n’ont pas transformés les beaux quartiers mais les quartiers populaires.

Les thèses sur la moyennisation de la société se développent dans les années 70.

L’approche classique pour entreprendre une définition des classes moyennes est celle par la stratification sociale. C’est-à-dire, que dans notre société, il y a les plus pauvres, les plus riches placés sur une échelle de revenus et au milieu, il y a les classes moyennes.

I- Qui sont les classes moyennes ?

1- La recomposition des classes sociales à l’échelle mondiale

Aujourd’hui on a tendance à dire qu’il n’y a plus de classes ouvrières et donc plus de lutte des classes. Mais les ouvriers en France c’est encore en 2008, 22% des actifs. C’est plus que les cadres qui représentent que 13% de la population. Quant à la bourgeoisie, elle est toute petite certes mais elle s’enrichie de plus en plus.

Aujourd’hui, la bourgeoisie domine à l’échelle nationale mais aussi internationale.

Le nombre des ouvriers s’accroit au niveau mondial notamment dans les pays émergents. La lutte des classes s’est donc reconstituée spatialement. Et à ce prolétariat industriel, il faut ajouter toute la paysannerie pauvre.

La bourgeoisie est de plus en plus riche car elle arrive à mettre sous sa coupe de plus en plus de gens. La dynamique d’exploitation est toujours aussi vraie et violente mais elle se joue à une échelle différente. Il y a donc un jeu d’échelle.

On est passé de la ségrégation associée, à la ségrégation dissociée. C’est-à-dire qu’il y a toujours des bourgeois et des prolétaires mais qu’ils vivent de plus en plus éloignés. Cf : Thèse de F.Damette.

Mais en fait c’est un peu plus compliqué que cela car il y a une imbrication des deux échelles (nationales et internationales). Dans tous les pays émergents, il a y a aussi une bourgeoisie nationale elle-même dominée par la bourgeoisie internationale.

Les classes moyennes dans les pays émergents sont composées de salariés qualifiés qui ont un salaire et un pouvoir d’achat comparables à ceux des pays occidentaux. Cela représente 10 à 15% de la population dans les pays émergents. Mais les classes moyennes se développent majoritairement dans les pays capitalistes avancés.

2- Les classes moyennes dans les pays capitalistes avancés

Historiquement, dans l’ancien régime, la classe moyenne est la bourgeoisie. Elle se situe entre le tiers-état et la noblesse. Ce sont donc des individus qui ont un pouvoir économique mais aucun pouvoir politique.

La révolution française a permis de donner un vrai pouvoir politique à la bourgeoisie.

Au 19ème siècle, la bourgeoisie est devenue dominante. La classe moyenne c’est la petite bourgeoisie traditionnelle, indépendante et aussi la « bourgeoisie de talent » : les professions libérales et intellectuelles.

Dans l’entre-deux guerres, les classes moyennes se structurent politiquement. Elle est composée de:

- La bourgeoisie traditionnelle

- Les professions libérales

- Les cadres

C’est dans l’entre-deux guerres qu’émergent la notion de classe moyenne. Ce mouvement a été favorisé par la grande bourgeoisie car cela lui permet d’avoir un contrepoids à la classe ouvrière qui s’organise et se renforce dans le contexte du front populaire.

Aujourd’hui on peut appeler la classe moyenne, la petite bourgeoisie intellectuelle (au niveau de diplôme, ils ont tous fait des études) < Garnier.

Cependant, en termes de rémunération, c’est assez inégale. Ce qui distingue la classe moyenne, c’est plutôt son capital culturel. Elle a une position intermédiaire dans les rapports de classes. Elle a un rôle d’intermédiaire.

Ex : le contremaitre qui a une position d’encadrement. Ils aident à faciliter l’extraction de la plus-value et par ce travail il obtient une rémunération supérieure à celle des ouvriers.

La classe moyenne a aussi une fonction d’inculcation idéologique. C’est le rôle de toutes les professions de l’enseignement, de la santé et du social. C’est-à-dire, toutes les professions qui encadrent les plus pauvres ou qui véhiculent une idéologie. Elles diffusent la « bonne parole ». Mais c’est aussi la classe moyenne qui disqualifie les actions sociales réalisées par la classe ouvrière, qui trouve embêtant les revendications véhiculées par les grèves notamment. Comme par exemple, la grève des cheminots qui bloquent selon elle, la circulation des transports en commun et qui gêne les usagers.

La classe populaire en France est composée des ouvriers et des employés. Ce qui représente 47.3% des ménages. C’est-à-dire, 47.3 % des ménages dont la personne de référence est employé ou ouvrier, que cette personne soit un actif ou un retraité.

La classe moyenne quant à elle, représente 47.6% des ménages (c’est donc, très légèrement plus). Dans ce chiffre, on prend en compte la petite bourgeoisie traditionnelle qui représente en fait, 11.5% de la population de la classe moyenne et la petite bourgeoisie intellectuelle qui elle, représente 36.1% de la population.

Ces pourcentages révèlent alors, contrairement à ce que l’on pense généralement, on n’est pas dans une société moyennisée.

v Ou habite la classe moyenne ?

La petite bourgeoisie est plutôt mélangée avec d’autres classes. Il y a un éparpillement dans l’espace, de cette classe. C’est une classe qui est encore plus diffuse dans l’espace. Cela traduit son origine hétérogène.

Progressivement, depuis les années 70, on commence à observer un espace de résidence spécifique aux classes moyennes. Mais la modalité principale des classes moyennes aujourd’hui, reste un certain mélange.

L’accession à la propriété par les classes moyennes s’effectue par un déplacement vers la périphérie et donc en s’éloignant du centre-ville. L’accès à la propriété est aussi considéré comme une ascension sociale.

Aujourd’hui cet accès est aussi un risque : le risque de surendettement et de déclassement.

Les stratégies résidentielles sont aussi le moyen de conjurer le risque de déclassement en choisissant une «bonne » école pour ses enfants par exemple.

II- Classes moyennes et espaces périurbains

Le lotissement périurbain est l’archétype de l’espace des classes moyennes. Des maisons individuelles avec jardin, des équipements sportifs, des faibles densités tout en étant loin des nuisances du centre-ville. Cela démontre aussi l’entre-soi des classes moyennes.

1- Les facteurs de la périurbanisation

Périurbanisation : Urbanisation diffuse, au-delà des limites de l’agglomération, qui elle se compose d’un espace bâtit continue, soit le centre et la banlieue. Cette périurbanisation repose sur l’automobile.

v Pourquoi il y a de la périurbanisation ?

Ce sont des choix contraints que de vivre en périphérie.

- Logique économique : les prix des logements sont beaucoup plus chers dans le centre-ville qu’en périphérie

- Rôle fondamental des politiques de logement : depuis 1977 est diffusée une politique d’incitation à l’accession à la propriété. Ces aides d’accession à la propriété nécessite que l’on aille chercher très loin des terrains pour construire à des coûts moins élevés.

- La standardisation de l’habitat individuel.

- Politique d’aménagement (locale ou nationale) qui permet de réduire les distances- temps.

Avec cette périurbanisation, il y a des problèmes de densité trop faible. On soulève aussi celui de la rééducation des surfaces agricoles ainsi que des problèmes de pollutions et de standardisation des paysages urbains.

L’urbanisation périurbaine est très inspirée de l’idéologie anti-urbaine (américaine notamment) mais l’on constate que les franges périurbaines ont tendance à être englobées au cours du temps, dans la banlieue.

2- Mode de vie et espaces périurbains

On constate dans notre société une tendance médiatique à la caricature des types d’espaces, avec le centre qui est bourgeois, la banlieue populaire et le périurbain : moyen. Mais en fait il y a toute une mosaïque sociale.

On parle même de fractions de classe des classes moyennes. Néanmoins, malgré cette multiplicité de strates dans la classe moyenne elle-même, on est toujours dans un phénomène d’entre-soi avec une logique de niche économique. Cela se voit dans le type d’habitat par exemple. Cette logique d’entre-soi n’est pas forcement consciemment voulue mais les contraintes notamment économiques expliquent que l’on retrouve les mêmes personnes dans un même endroit. En bref, il y a une multitude de lotissements pour les classes moyennes mais chaque lotissement se distingue d’un autre par sa composition sociale.

Pour les classes moyennes, il y a des logiques de localisation en auréole concentrique et aussi des logiques d’axes. Mais ce qui est important c’est le calquage de l’organisation de l’espace parisien du centre, dans la périphérie. Avec l’est plutôt moyen et l’ouest beaucoup plus riche (cela s’observe notamment dans la périphérie d’Ile de France).

v Quels sont les traits communs de ces espaces périurbains ?

- Ce sont des pavillons choisis par le fait d’une possibilité de maitrise de la distance avec l’autre. Pas seulement avec l’extérieur (avec ces voisins) mais aussi à l’intérieur de la famille (plusieurs chambres). Cela est bien différent de l’interconnaissance, la proximité populaire.

- Choix très net de la tranquillité : la verdure et le calme mais plus fondamentalement le choix de tranquillité sociale. On évite ainsi les « mauvaises » rencontres. On est dans le choix d’une certaine protection contre le déclassement. L’accession à la propriété s’est aussi, dans de nombreux cas, s’éloigner des classes populaires et donc mettre en évidence son ascension sociale.

- Le choix de la sécurité : être loin de la délinquance mais surtout la sécurité aussi au sens social. C’est-à-dire, d’être éloigné, des « mauvaises » fréquentations.

En bref, c’est surtout l’assurance d’un certain tri social. Cf : citation d’Eric Charme.

« Le prix d’un logement représente d’abord le prix d’un voisinage »

Eric Charme parle de dynamique de clubbisation.

Ce mode de vie périurbain est structuré par la mobilité, sorte de condition d’existence qui lui est intrinsèquement lié. C’est une mobilité complexe dont les axes de circulation passent de moins en moins par la ville centre. C’est un fonctionnement en étoile propre à chaque ménage selon les lieux de travail, de courses ou d’activité. Cette mobilité est aussi une contrainte, pour les jeunes qui n’ont pas de voitures, pour les mères. Ce sont souvent les femmes qui veulent quitter le périurbain pour le centre-ville.

On observe depuis les années 90, un certain tassement des distances parcourues. On crée des services et de commerces pour que les gens puissent aller moins loin.

On observe un changement dans la composition sociale du périurbain. Aujourd’hui, il y a de plus en plus des classes populaires, plus fragiles, qui arrivent dans le périurbains. Pour eux, c’est un peu une sorte de coup de poker, un risque énorme d’ascension sociale avec l’accès à la propriété. On observe dans les franges du périurbains des crispations politiques avec notamment l’émergence des votes FN et donc d’enfermement et de replis sur soi.

Les préoccupations majeurs pour les politiques en ce qui concerne le périurbain, sont le développement durable avec l’économie d’espace. Mais aussi, le fait de préserver les terres agricoles tout en densifiant l’espace. Et faire du logement social. Cela crée des tensions entre les préoccupations des collectivités locales et celle des habitants.

III- Les transformations des banlieues moyennes

Dans ces banlieues moyennes, la modalité principale est toujours le mélange relatif avec d’autres classes sociales. Mais l’on observe une tendance à la recherche de l’entre soi en allant plus loin notamment. Ce mélange se caractérise par des populations qui sont sur le départ et d’autres qui vont rester là.

1- Un quartier pavillonnaire : Les Peupliers à Gonesse (95)

Cf : La France des petits moyens

Lotissements pavillonnaires en banlieue mais plus humbles que ceux des quartiers périurbains. Ce lotissement se compose de maisons mitoyennes.

C’est de l’ancien périurbain, celui des cités jardins ou « pavillons en bandes ».

Dans les années 60, c’est un territoire d’ascension sociale pour les « petits » moyens comme les employés mais aussi des cadres moyens, des individus d’origine populaire. Ils achètent des petites maisons mais cela représente une façon de fuir les quartiers populaires.

Les individus qui sont encore là aujourd’hui parlent des années 70 comme de la « belle époque » avec une très grande sociabilité populaire. Ils ont l’impression d’être des pionniers de ce type d’habitat. Toute la bande des pavillons est géré en copropriété.

Progressivement, ceux qui pouvaient aller encore plus loin (les « petits » moyens les plus aisés) sont partis. Ceux qui restent, sont les moins aisés qui n’ont pas les moyens d’aller ailleurs que là. Cela casse aussi le côté collectif, dans un contexte de crise. Parallèlement, dans la ville de Gonesse on observe des phénomènes de densification et dans les Peupliers, il y a un phénomène de vieillissement. Ceux qui remplacent les familles parties, sont des familles d’immigrés turques qui sont elles-mêmes en parcours d’ascension sociale. C’est donc des populations très différentes de celles plus « vieilles » qui demeurent ici.

On observe donc dans ce quartier un principe d’invasion-succession classique.

Cela crée une hétérogénéité des modes de vie. De plus les populations vieillissantes ont l’impression de ne plus être en ascension sociale par le côtoiement des populations immigrées. Ils ont un sentiment de déclassement car ils ont l’impression d’être dans une cité par le côtoiement des immigrés en ascension. On observe un vote à droite et notamment d’extrême droite.

Mais ces populations d’immigrés ont aussi une volonté de fuir les grands ensembles et la « mauvaise » population d’immigrée qui y est présente.

En bref, la préoccupation sécuritaire se retrouve de part et d’autres.

Il y a donc une complexité des recompositions sociales. Mais aussi la paupérisation des classes moyennes et le risque d’implosion sociale de celle-ci.

Ex : possibilité d’émeute et importance du vote FN.

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