mardi 20 décembre 2011

Médiévale 12 - 12

Précédemment : Médiévale 05 - 12





  1. La naissance d'un urbanisme princier

L'installation de princes laïcs dans les villes et la destruction d'une commune par les Princes pour prendre le pouvoir.
Les transformations de l'espace urbain parisien ont connu leurs balbutiements fin du XII° siècle sous l'influence du roi qui vit de plus en plus à Paris. Des Nobles décident alors de s'installer autour. D'abord ce sont des ecclésiastiques, évêques et archevêques, plutôt sur la Rive gauche qui était déjà l'emplacement de seigneuries ecclésiastiques. On trouve dans les plus anciens, l'archevêque de Reims puis de Rouen. L'Hôtel des abbés de Cluny construit sur les anciennes thermes romaines, sera quasiment toujours habité par ces abbés. Illustrant leur richesse, ils vont lui donner un faste particulier toujours visible aujourd'hui.
Suite aux abbés, les aristocrates viennent s'installer. Les premiers furent les ducs de Bourgogne, installés sur la rive gauche très habitée par des ecclésiastiques. A partir du XIV° siècle, c'est la rive droite qui devient tendance chez les Nobles. Les comtes de Bourgogne en investissent un proche du Louvre d'abord, puis s'implantent dans l'Hôtel d'Artois ensuite. Cette mode de la rive droite tient de nouveau au roi. Charles V instaure un bipolarité palatiale avec le vieux palais Louvre d'une part et le logis royal de Saint-Pol d'autre part. Le roi alterne entre ces deux résidences et met à la mode l'installation dans la marais. Cela est facilité antérieurement par des travaux ecclésiastiques qui asséchèrent le marais qu'il y avait à cet emplacement. L'hôtel de Clisson en est encore une trace aujourd'hui. Ces opérations d'installation d'aristocrates sur la rive droite se firent sur un temps long. L'hôtel de Bourbon entre 1300 et 1404 vit ses propriétaires acheter plus de 300 propriétés par tout les moyens possibles (argent, menaces, violences, …). Ils ont acheté un quartier entier sur lequel ils construisirent leur hôtel particulier. Cette concurrence entre Nobles a conduit à une diminution de la mixité sociale dans le centre de Paris. Les pauvres furent donc évincés de ce quartier. Ainsi quand on regarde les impôts parisiens, on réalise que certains quartiers payent plus d'impôts que d'autres, ce qui n'existait pas avant.
La ville d'Avignon en est un autre exemple. Le palais se construit sur un espace très resserré. Quand la papauté est arrivée, les cardinaux ont saisit des logements, les « livrées ». Rapidement, ils désirent agrandir leur prestance et développent des hôtels massifs. 70 bourgs apparaissent alors autour de la ville d'Avignon.

Selon Pierre Monnet, cet urbanisme sauvage et princier se développe partout en Europe. En Germanie, dans la seconde moitié du XIV° siècle, il existe deux pôles de développement : le palais princier et les clubs aristocratiques (cercles de sociabilité réservés aux aristocrates de l'Empire et aux riches marchands). Autour du palais de la commune et de ses clubs se développe la ville comme à Augsbourg.

On a donc rapproché cela du second type d'installation princière, où une famille Noble prend possession de la ville sur la Commune. C'est le cas à Milan comme l'a montré Boucheron (???). Les Visconti sont présents dans les élites communales dés 1270 et se servent des institutions de celles-ci pour la renverser, avant de supprimer ces mêmes institutions. En 1311, ils s'en servent à leurs avantages et prennent le contrôle de la ville. Ils vont alors marquer leur présence dans l'espace urbain par un programme toujours identique ou presque. D'abord ils établissent une forteresse au cœur de la ville mais en marge de l'hypercentre pour se protéger des fidèles à la Commune. Ensuite ils s'installent au cœur de la ville en s'accaparant le Broletto qu'ils développent sous forme de forteresse. A cela ils développent une décoration des portes de la ville chantant leurs louanges. Enfin, ils financent les édifices religieux pour masquer leur domination brutale.
Cela s'applique aussi aux autres villes qui passent sous leur pouvoir. Progressivement la famille Visconti prendra le pouvoir sur 122 communautés de la région. L'organisation urbaine sera toujours profondément réaménagée. A Parme, séparée par un fleuve, une partie de la ville est réservée aux fidèles de la famille, l'autre est réservée aux alliés des Visconti. Cette politique passe aussi par la multiplication des monuments qui proclament une ode à cette famille.

A la fin du Moyen-Age, une grande partie des communes du Nord de l'Italie sont prises par de grandes familles. A Ferrare la famille Este, à Florence les Médicis, à Vérone les Scaligerron (???), … Des fois cela aboutit au développement de nouvelles villes. Le village de Corsignano, lieu de naissance de Pie II devint un projet développement à la gloire du pape pour finir par se nommer Pienza, mini-cité idéale jamais aboutie et limitée à l'hypercentre. La petite ville Urbino fut transformée en palais. Le prince Federico de Montefelto (1420 – 1482) a bâti sa fortune en louant ses services de mercenaires. Avec l'argent accumulé, il transforma la ville d'Urbino en faisant construire un immense palais à sa gloire, une sorte de ville dans la ville. A l'intérieur, ce prince s'y met en scène comme un grand intellectuel comme dans son studiolo ou sur la prince principale du palais et par extension de la ville, alors qu'il est avant tout homme de guerre.
Certaines cités idéales sont restées sur papier mais influencèrent beaucoup d'intellectuels de la renaissance. La plan de la Sforzinda de Filarète était une ville circulaire avec des défenses en étoiles censée assurer la protection de ses habitants. On poussait à l'extrême la réflexion en installant cette ville à la campagne pour exclure les populations dont on ne voulait pas.

  1. Des villes conquérantes

L'espace rural autour des villes est considéré comme un espace de future domination de la ville. L'essentiel des détenteurs du pouvoir vivait longtemps à la campagne, à partir du XIII° siècle, l'aristocratie vécue en ville et fut imitée par une bourgeoisie naissante. Les rapports de domination s'inversent au XIII° au XV° siècle.
Dans un premier temps, l'investissement à la campagne vient des bourgeois. Ils achètent des terres, des moulins, des fours et des troupeaux nombreux. Coulet et Stouff présentèrent cela avec le cas des troupeaux. Les bourgeois achètent des troupeaux non seulement pour alimenter la ville, mais aussi pour avoir de la laine, dans le cas de troupeaux d'ovins, qui alimente l'artisanat textile de la ville. Les bourgeois ont contrôlés progressivement ces troupeaux allant jusqu'à posséder tout les troupeaux dans un rayon de 40 kilomètres autour de la ville d'Aix. A Arles, même processus avec un rayon plus faible, de 20 kilomètres. L'emprise sur les espaces campagnards est considérable.
Dans le cas de la ville de Lyon, les ecclésiastiques sont les premiers à investirent avant d'être imités par des aristocrates et des bourgeois de la villes. Selon le Vaillant de 1388 (registre marquant les propriétés des habitants de Lyon), la ville avait investit un rayon de 20 kilomètres autour de la ville, en 1483 on est arrivé à 30 kilomètres. Cela peut transformer radicalement l'espace rural. Dans le cas du Bordelais notamment, l'achat de terres alentours a permis le développement de vignes, dans la région de Graves, il n'y a plus que de la vigne et les céréales ont disparu.

Cette domination économique devient à son tour de plus en plus politique notamment dans l'espace italien ou certaines villes puissantes investissent les campagnes pour dominer les seigneurs vus comme menaçant les Communes. Dans le cas de la ville de Florence, les campagnes alentours voient pousser des villes neuves en 1290 sur injonction de la Commune. Pour marquer la décision une charte de franchise très libérale est instaurée. On attire la population des campagnes. Systématiquement, la Commune de Florence à établi des terre nuove sur des domaines des Ubaldini, fortement opposés à la Commune. De plus, on attire des chevaliers dans ces villes en interdisant les grands nobles d'y posséder quoique ce soit. Ces petits chevaliers censés défendre ces villes nouvelles vont en réalité attaquer et piller les seigneurs environnants assurant le renforcement de Florence.
Ces villes vont ensuite tenter de récupérer des espaces sous leur domination qu'ils nommeront contado. Dans cet espace tout les villages doivent des redevances à la ville, des corvées et un service militaire. A partir du XIII° siècle, les villes dominantes imposent des potestas dans ces contado qui lèvent des redevances, a des droits de justice, … Même les seigneurs ruraux doivent s'y soumettre puisqu'ils désirent de plus en plus venir s'installer en ville, pour cela ils se soumettent partiellement à l'autorité du potestas.
Par la suite ce n'est plus juste contrôler les campagnes autour de la ville mais conquérir les terres pour former de véritables petits États territoriaux. En 1450, on a une multitude d'États en Italie (Duché de Milan, République de Florence, …). Les Visconti vers 1330 n'ont que quelques villes dans un premier temps puis accaparent un total de 122 communautés en 1447. De même, Venise qui est une République, lance une politique de la « terre ferme » qui abouti à la domination d'un territoire de 30 000 km², côtoyant le duché de Milan. Le seigneur ou la République dominant cet espace détient un pouvoir économique, de justice, d'armée, …
Ces multiples États se font toujours la guerre et c'est l'âge des condottieres. La ville de Venise a 16 000 cavaliers, Milan 18 000 et Florence 10 000 en 1422. D'abord la lutte est entre Florence et Milan, puis Venise s'allie à Florence. Il existe des trêves mais les guerres redémarrent assez vite. Les cités-États sont le propres de l'Italie ceci dit. Par contre toutes les villes ont un objectif d'extension de leur territoire qui aboutie à la volonté des Occidentaux de conquérir de nouveaux espaces.


 Devant Jérusalem


Les Européens à la découverte de nouveaux espaces


L'amélioration de la sécurité dans les déplacements internes à l'Occident pousse les gens à se déplacer pour faire de longs voyages, sur de longues distances pour des longues durées. C'est donc l'essor des pèlerinages anciens ou nouveaux. On a des gens du commun qui croisent des marchands qui eux font des allers-retours dans l'Occident via des trajets de mieux en mieux balisés (auberges, écuries, …). C'est aussi un essor des réseaux sociaux, le monde est de mieux en mieux connus.
Mais des espaces inconnus existent encore hors de l'Europe. On va les chercher sous deux logiques : religieuse et commerçante. La première pousse les pèlerinages jusqu'à la Terre Sainte. Les Occidentaux qui voyagent perçoivent alors les pays traversés et leurs habitants de manière hostile (menace de sécurité, occupants les lieux saints, …). Dans le cadre commercial, les marchands privilégient les meilleurs rapports possibles pour favoriser les échanges, les sécuriser, les rendre avantageux aussi. Mais ces deux logiques antagonistes pouvaient se retrouver dans des objectifs communs. On constate que les périodes de trêves entre Croisades sont alors l'occasion d'un essor du commerce. A l'inverse, les entreprises commerciales qui ne nécessitaient pas de conquêtes de territoire le deviennent avec la logique qu'il s'agit d'assurer la sécurité des convois marchands, pouvant aboutir à des violences. Ces rapports sont donc agressifs avec le monde hors de l'Occident. Mais toujours est-il que ces effets commerçants et religieux, les individus s'installant dans ces espaces partagent une échange culturel qui donne envie de découvrir de nouveaux espaces et de nouvelles cultures dans les sociétés occidentales. La curiosité des Occidentaux est éveillée. Cela débute au XIII° siècle avec la multiplication des explorations vers soit des espaces connus depuis l'antiquité (Asie), soit vers des lieux totalement inconnus.


  1. Le temps des croisades : une ouverture limitée par le rejet de l'altérité

  1. Les croisades, une entreprise de conquête de territoires

L'Église assurait vouloir sécuriser le chemin à Jérusalem mais dés le départ, il s'agit de conquérir des territoires. La première fois que cela est lancé c'est sous Urbain II au concile de Clermont et cela à rencontrer un immense succès auprès des populations. Cela peut s'expliquer par la valorisation des armes à cette époque avec une aristocratie qui se définissait par les armes mais sans devoir se battre entre chrétien. La croisade permet de l'exercer en-dehors de l'Occident. En quelques mois, 40 000 hommes partent vers Jérusalem mais seulement 4 000 à 5 000 aristocrates. La majorité est donc issue de la bourgeoisie ou de la paysannerie aisée. Ce n'est pas un mouvement d'élite. Entre 1095 et 1099, un total de 100 000 hommes partiront durant cette période.
Cela vient de l'appel d'Alexis I, empereur byzantin qui avait appelé à l'aide les Occidentaux contre les Turcs. Les croisés espéraient donc être bien accueillis à Constantinople. Mais dés arrivés, l'Empereur exige un serment de vassalité de ces hommes. Il exige que les territoires conquis par les croisés, soient des terres vassales à celles de l'Empereur. Les croisés de la première années sont vite tués en Asie mineure. C'est la seconde vague de croisés qui avancera plus loin en faisant les sièges de Nicée et Antioche. Pourtant, les croisés vont se diviser entre ceux qui se concentrent à Antioche et ceux qui veulent soutenir le prince d'Edesse. Baudouin de Goulogne part à la tête de ce courant et formente un complot pour faire chuter le prince d'Edesse et prendre le trône du prince Thoros. Il en naît alors une principauté d'Edesse en mars 1098. En juin 1098 Bohémond de Tarente va achever la prise d'Antioche et y installe une autre principauté tout en refusant d'être vassal de l'Empire byzantin. Il va donc lutter longtemps contre Byzance. Le troisième État latin sera celui de Jérusalem fondé une fois que la ville est prise en juillet 1099.

Cela crée un élan d'enthousiasme en Occident qui envoie de nouvelles troupes en terre Sainte et heureusement vu que les deux tiers des Second croisés furent décimés. Godefroy de Bouillon prend la tête de la ville sainte et prend le titre d'avoué du Saint-Sépulcre. En 1100, Godefroy meurt et son frère Baudoin, roi d'Edesse, prend sa suite et devient roi de Jérusalem. Il exerce un pouvoir seigneurial en confiant une partie du territoire à ses fidèles, devenant des vassaux liges pouvant donner eux-mêmes des fiefs à d'autres vassaux. Les premiers croisés prudents s'installent dans les villes principales et tentent au bout de quelques années de coloniser les campagnes. En particulier Godeffroy de Bouillon avait donné aux chanoines du Saint Sépulcre des terres alentours pour y installer des colons européens. Ces chanoines créeront la Grand Mahomerie et la Petite Mahomerie. Les populations qui y viennent s'installer sont essentiellement espagnoles car habituées aux espaces de conquêtes sur les Musulmans, mais il y a aussi des Provencaux et des Italiens. Enfin naît le Comté de tripoli, bande de terre reliant Antioche et Jérusalem et assurant un couloir au déplacement des troupes croisées. Io est commencé en 1103 et sa conquête s'achève en 1107.

En 1144, les premières défaites arrivent avec la perte du Comté d'Edesse ce qui pousse Eugène III à faire appel à une seconde croisade en décembre 1145 et Saint Bernard leader cistercien, pousse à intervenir. C'est une croisade très royale avec des rois et des aristocrates notamment mais sans aucune ferveur populaire. Censée reprendre le comté d'Edesse, c'est un échec, le roi de France parti en pèlerinage laisse les troupes en plan et elles s'organisent mais vainement contre les troupes musulmanes. Saladin va réussir à fédérer les troupes musulmanes contre les croisés et Jérusalem tombe le 2 octobre 1147. Il ne reste qu'une zone autour de Tyr et une partie de comté de tripoli.

Un troisième appel à la croisade a lieu alors.

Contemporaine 12 - 12

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"Art pompier" de Meissonier.





L'esclavage est abolie en mars 1848, c'est la seconde fois qu'il est abolit après le rétablissement de Napoléon, celui-ci restera dans les mémoires. En 1794, cette abolition est aussi la conséquence de celle des colonies qui l'avaient déjà aboli. Ce n'est pas une République généreuse qui fait cela, il y a un désintérêt économique, de plus le décrite maintien l'indemnisation des planteurs, propriétaires d'esclaves et de fait les anciens esclaves restent du coup des travailleurs pauvres dans les sociétés coloniales.

Ces avancées sociales ont leur limite. Par exemple, il y a un rejet du drapeau rouge dans les premier jour de la République. Dans un tableau célèbre, le peintre représente deux groupes équivalent, bourgeois et ouvriers, en réalité, il n'y avait que des ouvriers. A cela s'ajoute une allégorie, une femme sur un cheval blanc avec un drapeau rouge, symbole de la révolte des Canuts lyonnais. Le drapeau bleu blanc rouge était délégitimé par la monarchie de juillet. Finalement c'est un conflit entre une République libérale (bleu blanc rouge) ou sociale (rouge). Lamartine va négocier assez longtemps dans un contexte très tendu pour imposer le drapeau habituel, en rejetant le drapeau rouge au nom des victoires de la Révolution dans les autres pays d'Europe. D'où le fait que ce serait ici que se termine les Révolutions selon Mathilde Larrère. C'est dans cette maison commune des Parisiens que s'installe toujours au début les gouvernements momentanés.
Les ouvriers et les Socialistes auraient voulu un ministère du travail mais on ne leur concéda que la commission du Luxembourg, sorte d'États généraux du travail où se trouvaient les principaux métiers. Mais tout les ouvriers et dirigeants socialistes y discutaient ce qui occupait les ouvriers mais les isolait de l'activité dans Paris. Par ailleurs tout cela ne resta qu'au stade de projets de réformes sociales très riches, qui nourriront le socialisme par la suite mais restant à l'état de projets.
Les ateliers nationaux qui furent créés sont cependant en deçà de ce que souhaitait les Socialistes. Louis Blanc voulait des ateliers sociaux, dans lesquels il voit la réunion des ouvriers et la fin du capitalisme. Il souhaitait des ouvriers par corps de métiers et que les ateliers sociaux passent commandent auprès de l'État et des autres collectivités, ils produiraient, vendraient et s'auto-géreraient. C'est donc une organisation complète du travail de l'économie. En 1848, les ateliers nationaux sont des chantiers publics où on embauche des ouvriers indépendamment de leur corps de métier, on leur donne un travail et un salaire fixé, loin du projet socialiste.

  1. Les Révolutions en Europe

Mouvement libéral et national sont très liés car ils viennent de la réaction française et se heurtent au Congrès de Vienne. Dans la monarchie traditionnelle, les libéraux réclament et obtiennent la rédaction de constitutions, des chambres représentant la nation et législative et la liberté politique. Face à cette vague libérale, les monarques tiennent leur poste en cédant rapidement, le chancelier Metternick fuit mais l'Empereur reste. Les rois se maintiennent sauf à Venise où une République est proclamée.
Les Monarchistes évincés, l'espace dans la représentativité est repris par les Démocrates. A Vienne, après les conditions libérales acceptées, les agitations continuent et abolissent le servage, le système féodal en 18??. A Florence et à Rome, la République est proclamée et évince les rois en février 1849 avec Garibaldi pour Rome. Il y a instauration du suffrage universel. Dans les États allemands, on lance l'unification nationale avec une Assemblée Nationale représentant tout les États allemands est élue au suffrage universel. Elle se réunie à Francfort et y rédige la constitution de l'Allemagne, future monarchie libérale avec une couronne au roi de Prusse.
En Italie on tente une guerre d'indépendance contre les Autrichiens, le roi du Piémont-Sardaigne monte une armée contre l'Autriche, reçoit l'aide de toute l'Italie voire de l'Europe. Puis dans la phase libérale, les monarques le soutiennent (le Pape lui envoie des troupes). Sous son drapeau, ce roi affiche 90 000 hommes contre les Autrichiens qu'il fait évacuer de ???. L'Empire autrichien n'est pas épargné. La Hongrie fait sécession, les Tchèques ont ??? et les Croates font sécession des Hongrois.

A Paris, on accueille cela avec enthousiasme, les souvenirs de 1792 se réveillent. Les déceptions de 1830 aussi se réveillent. Un mouvement apparaît, soutenu par les plus radicaux et demande que la France se porte au secours des peuples en Révolution. Les Parisiens composent avec les immigrés des différentes nations à Paris des légions pour aller aider sur place ces Révolutions : la légion des Riscontous en Belgique, la légion des Polonais en Pologne. Le 15 mai 18??, une manifestation à lieu à Paris pour soutenir les Polonais, manifestation qui va envahir l'Assemblée Nationale et qui fait peur à celle-ci. Mais ce nouveau pouvoir ne veut pas renouer avec 1792, la Seconde République ne veut pas de guerre révolutionnaire et de nouveau Lamartine après avoir rejeté le drapeau rouge fait le Manifeste à l'Europe, dans lequel il rassure les monarques, désillusion en France.


  1. L'automne des Princes

  1. L'échec en France

En France, tout commence paradoxalement par la première élection au suffrage universel. Au départ, inquiets de son déroulement, les Démocrates voudraient la reculer pour se préparer, mais les conservateurs ne veulent pas. Le 23 avril 1848, dimanche de Pâques, un vote massif a lieu (90% de la population) se déplace parfois une demi-journée pour voter. Le problème vient des ruraux qui ont votés conservateurs, la chambre qui sort est alors comme telle. Certains sont des Modérés, d'autres Républicains de la dernière heure et enfin les derniers sont Monarchistes affirmés. La manifestation du 15 mai les a effrayé et le soir même, ils demandent l'arrestation de la plupart des chefs radicaux de 1848. Seul Louis Blanc absent ce jour là n'est pas pris. Les députés enterrent la Révolution sociale. Le pouvoir du peuple redevient pour la bourgeoisie l'incarnation des peurs et de la violence.
Pour les députés conservateurs, il faut aussi arrêter le trou économique que forme les ateliers nationaux. En effet, les ateliers ne trouvant plus d'occupations, on payait les ourviers sans demande de travail et les ouvriers compensaient en discutant politique sociale. Ces ateliers sont donc fermés le ?? juin 1848. Le 23 juin 1848 après des tentatives de négociations, les ouvriers se soulèvent. On barricade de nouveau la ville surtout dans l'Est parisien. Les ouvriers demandent une République démocratique et sociale, l'association libre du travail aidé par l'État, … Ils déclarent « Citoyens, songez que vous êtes souverains ». Le gouvernement réagit fermement, confie le maintien de l'ordre à Cavaignac et lui laisse toute latitude. Des conciliateurs tentèrent d'intervenir pour ne pas que l'armée tire (Hugo, Monseigneur d'Arves archevêque de Paris, …). Cette émeute est écrasée dans le sang avec 5 000 morts dans les insurgés, dont 1 500 furent fusillés sommairement après emprisonnement, 3 500 tués sur les barricades et à cela s'ajoute 25 000 arrestations partis au bagne. Meissonier soldat qui a réprimé la révolution, traumatisé a peint cette répression.
Les ouvriers se séparent de la République, on l'interprète facilement en guerre civile mais c'est plus complexe. Les insurgés sont majoritairement ouvriers mais des bourgeois assez nombreux les soutiennent, l'armée aussi se divise.

La France rédige ensuite la constitution de la République, où le droit au travail disparaît. C'est une République présidentielle appuyée sur le modèle américain avec le contre modèle de la constitution de l'an I. Les élections ont lieu en décembre 1848, les Républicains ont 4 candidats, les conservateurs un seul, Louis-Napoléon Bonaparte. Au final, les voix de gauche se dispersent et celle de droite se concentrent. En deux ans, Louis Napoléon Bonaparte reprend le crédo de son oncle et rétablit l'Empire devenant Napoléon III. La République à perdu le soutien des ouvriers mais aussi des paysans. Ces derniers dans la Révolution de 1789 sont devenus rapidement propriétaires et ils ont peur de perdre leurs terres et leurs privilèges. De plus, au début de la Révolution, il y a un problème de déficit public que l'État a voulu compenser par une augmentation de 100% d'impôts, puis plus tard sur les riches via leur mode de vie, mais ce fut insuffisant.

En Europe aussi c'est l'échec, les souverains reviennent au trône en supprimant les constitutions concédées, enterrant les chartes. Seul Charles-Albert conserve cela. Ainsi les Autrichiens se ressaisissent et écrasent les troupes du Piémont-Sardaigne. Le roi de Prusse rejette sa couronne. Partout les Nationalistes et les Libéraux reprennent le chemin de la prison ou de l'exil.

  1. Pourquoi ?

L'efficacité de la réaction montre que l'armée partout est restée fidèle au souverain et les généraux furent très efficace dans la « guerre de rue » (Général Bugeaud). Le canon va détruire les barricades mais aussi achever le peuple. De façon générale, 1848 a permis aux généraux de maintenir leur poste via des innovations dans cette lutte.
Après 1848, toutes les capitales européennes ont adapté le plan urbain à la lutte contre les Révolutions, urbanisme de maintien de l'ordre avec Haussman en France. Dans les quartiers populaires, on trace des grandes rues bien larges avec des casernes. On a donc des forces de l'ordre prêtes à vite intervenir immédiatement, ces projets s'appellent le Bulletin Voltaire.

La faiblesse des mouvements tient aussi au fait qu'on a des Révolutions urbaines dans des pays ruraux. Les Révolutions furent incomprises des populations rurales souvent apeurées et plus facilement prêtes à soutenir des politiques d'ordre. C'est d'autant plus vrai qu'elles votèrent pour des chambres conservatrices puis pour Napoléon Bonaparte.
D'autre part, ces mouvements révolutionnaires furent fragilisés par leur divisions internes. Les Libéraux de seconde vague (très sociaux) poussèrent les Libéraux de première vague (nationaux et libéraux), effrayés de la radicalisation révolutionnaire rejoignent les conservateurs. D'où cette tendance des Libéraux de première vague à réprimer la révolution de leurs ex-compatriotes de seconde vague.

  1. Un échec à relativiser

Fin du féodalisme dans l'Europe, le bastion autrichien l'a achevé. L'esclavage est aussi aboli. Le suffrage universel est remis en place.
Ce n'est pas non plus un échec pour les Nationalistes et les Libéraux. Les régimes se libéralisent forcément un peu. D'autre part, les unifications se font après 1848 car ils sont parvenus à tirer les leçons de l'échec. Pour les causes libérales et nationales, cela libère un espace aux Démocrates sur l'échiquier politique.
1830 fut une revalorisation de la Révolution, possible et souhaitable moyen d'action avec cette attitude noble des ouvriers. Juin 1848 par contre va délégitimer la prise d'armes dénoncée comme une guerre civile condamnable car s'opposant à des élus au suffrage universel.

A cela s'ajoute que la peur de la bourgeoisie libérale et nationaliste de 1848 qui avait pourtant cru à la Révolution de 1830. La Révolution charrie toujours des revendications sociales et démocratiques ce qui menacent la propriété. Dorénavant, la bourgeoisie ne voudra plus de la Révolution. Du coup, les mouvements qui suivent ne seront quasiment plus jamais révolutionnaires. Seuls les mouvements socialistes sous l'influence marxiste vont donner des révolutions. Marx appelle non à une autre révolution, mais à une nouvelle révolution, qui ne serait pas bourgeoise. Il ne fait plus une Révolution des classes unies mais une Révolution prolétarienne. Une nouvelle idée de Révolution pousse alors en délégitimant la Révolution du XIX° siècle.

lundi 19 décembre 2011

Géo des Suds 07 - 12

Précédemment : Géo des Suds 30 -11

Régionalisme africain

  1. Régionalisme et régionalisation

Par régionalisme on entend qu'en support et libéralisation commerciale, on devrait créer des régions, des espaces intégrés favorisant les échanges (type UE, ALENA ou ASEAN). En facilitant l'intégration commerciale, on faciliterait les affaires. Cette politique régionaliste s'appuie sur un héritage d'organisations régionales calquées plus ou moins sur les États coloniaux.
Les luttes pour l'indépendance ont aussi laissé leur trace avec la création de l'OUA, devenue Union Africaine en 2001. Les politiques africaines voudraient les renforcer certaines fonctionnant bien (CEDEAO notamment). Il faut surtout dépasser la fragmentation des marchés africains locaux.

Cela marche globalement moyennement, que jusqu'à un certain point. Sur les questions politiques, les systèmes économiques, chaque État est en désaccord. Par exemple, les pays de coton luttent séparément contre le Nord pour établir des prix du coton à leur avantage. Leur lutte est individuelle, parfois de concert mais alors cela dure peu.

Le NEPAD, au départ initiative africaine (Afrique du Nord) qui devaient penser leurs projets puis le soumettre à l'examen des bailleurs ou investisseurs privés. L'objectif devint de financer de grands travaux d'infrastructures devant créer une intégration régionale (relier deux pays par une autoroute par exemple). Cela marche généralement bien, même si les effets restent encore très ponctuels.
L'Africain Growth and Opportunity Act (AGOA), voté par les USA pousse a un accord commercial entre le continent africain et les États-Unis qui facilite les échanges (produits détaxés en arrivant aux USA) s'il y a un réel engagement en matière des droits de l'homme et de la libéralisation de l'économie. Cet accord concerne les produits qui ne seraient pas en concurrence avec les USA dont plusieurs ressources minières, des pays encore dictatoriaux sont compris dedans.

Par régionalisation, on entend une intégration par le bas, par la population plus que par les États, c'est la théorie de Daniel Bach. En Afrique de l'Ouest par exemple cela passe par les réseaux commerciaux des Aoussa, une ethnie répartie un peu partout dans cette région, spécialisée dans les échanges commerciaux et relativement importante. Le régionalisme ne les a pas inspiré, ils font ça depuis très longtemps. Ils se servent des monnaies plus ou moins fortes et des ressources de chaque pays pour faire leur commerce (coton du Burkina revendu au Nigéria). C'est une régionalisation mais elle est contre la régionalisation étatique puisque les Assoua sont géographiquement dans la CEDEAO, pas dans la UEMOA (union sur la base monétaire). Ils se servent des différentiels des États pour faire leur commerce. Seul en Afrique du Sud cela fonctionne bien avec une étalement de supermarchés d'origine sud-africaine dans le cadre du régionalisme du Sud de l'Afrique subsaharienne.
Cette pratique crée des avantages mais aussi des problèmes, ce commerce illégal ne permet pas à l'État de le taxer et de développer des politiques sociales. De plus, l'agriculture demande beaucoup d'efforts pour un rendement faible alors que la contrebande permet pour peu d'efforts de rapporter beaucoup d'argent. Cela transforme beaucoup certaines régions avec une disparition des cultures au profit de villages de contrebande. Leur revenu reste cependant très ponctuel. Cette régionalisation contourne les règles d'une politique de régionalisme qui n'arrive pas à les faire appliquer. C'est une forme d'effondrement du circuit officiel mais cette contrebande fait vivre des gens, qui ne survivraient pas en temps normal.

Il y a donc des ilots de modernité qui permettent un certain développement par endroits. D'autres espaces sont laissés à l'abandon, mais développent un certain dynamisme économique dans l'informel en opposition avec la régionalisation. Enfin il existe d'autres espaces laissés à l'abandon et sans réel dynamisme. Du coup, tout cela a accru les inégalités entre régions, on est passé d'une Afrique pauvre à des Afriques tantôt riches, tantôt pauvres et tantôt développé par une économie informelle.






Sociétés rurales et agricultures


On a une Afrique très rurale (65% de la population en moyenne, avec des inégalités entre pays montant parfois à 80% de population rurale comme au Tchad ou au Niger). Cette population n'a pas diminuée ailleurs, au contraire elle a augmenté, c'est juste que la population des villes a augmenté plus rapidement que celle des campagnes. Donc l'agriculture doit nourrir des urbains plus nombreux, des ruraux plus nombreux et des exportations, plus nombreuses aussi. Or cette agriculture est encore peu modernisée. Cela n'est pas le néant, l'horticulture en Afrique de l'Ouest est très moderne, mais tellement ciblée sur ce vaste continent, que cela n'apparaît pas.


  1. L'image standard d'une agriculture en perdition

  1. L'agriculture africaine vivrière ou comment tirer parti de l'écologie

Comme l'agriculture africaine est très archaïque elle dépend fortement des conditions écologiques. S'il pleut une fois par an, on s'adapte. Ailleurs dans le monde, on a réussit à se rendre indépendant du climat, l'Afrique pas du tout.
Selon la FAO, les exploitations agricoles sont très petites et freinent le développement de l'Afrique. A l'inverse de l'Amérique Latine, on n'a pas de grand propriétaires latifundiaires, on a des familles qui produisent pour eux-mêmes. Les rendements sont donc assez faibles, inférieurs de deux tiers par rapport à la moyenne mondiale. La concentration d'engrais y est la plus faible, de même que les techniques d'irrigation qui sont restées circonscrites au Nord du Sahara (sauf à Madagascar du fait de ces liens historiques avec l'Asie). Mais les appareils de mesures et de comptages sont inadaptés à l'Afrique. On mesure la quantité de céréales qu'ils mangent, alors que ces céréales sont inconnues sur les marchés mondiaux et que les Africains mangent beaucoup de racines. Comment parler alors de leur consommation de blé qui est totalement marginale, alors qu'il se servent de céréales locales. De plus, les racines ne se stockent pas, elles restent en terre jusqu'à leur consommation, on a donc pas de statistiques sur les productions vitales pour les Africains.

L'agriculture vivrière est en deux temps : l'agriculture vivrière de subsistance (celle qu'on consomme) et l'agriculture vivrière marchande (celle qu'on revend). Celle de subsistance est soumise à l'agriculture archaïque, on ne trouve pas de charrues qui demanderaient des bovins et avec les tripanosomiase cela n'est pas possible. On cultive donc à la main avec des méthodes assez archaïques. Donc l'agriculture est extensive, les rendements sont faibles et de plus elle est vulnérable (invasion de criquet, épidémie, …).
Paradoxalement dans l'agriculture africaine, le facteur « terre » est un facteur abondant, le facteur « capital » pas du tout, reste le facteur « main d'œuvre » qui est aussi très faible. On a du monde en Afrique, mais beaucoup de jeunes qui ne peuvent pas travailler. Beaucoup de terres et peu de main d'œuvre cela donne une agriculture extensive (beaucoup de terres, peu de rendements) à l'inverse de l'Asie où le facteur « terre » est le plus faible (alors on a de petites terres où on cultive énormément). Là où les experts raisonnent en rendements du sol, les Africains raisonnent en quantité de sol.

Autre contrainte, l'absence de propriétés du sol. Si on ne possède pas sa terre, quel intérêt à investir dans une forme de modernisation qui ne vous servira pas toujours ? En général, ce sont des propriétés coutumières, plutôt d'ailleurs des sortes de prêts de sols.
Le tout combiné donne une économie vivrière archaïque. Les Africains vont donc essayer de mélanger leurs besoins avec les contraintes. Leur agriculture n'est pas moderne, mais ils s'adaptent à la nature et sont donc très écologiques. Ainsi au Sahel, on a une saison humide et une autre sèche avec des sols surtout sableux et d'autres plus fertiles dans des vallées mais où des simulis transmettent l'oncocercose. De plus, cultiver sur le sable est plus simple que sur une terre grasse et lourde. Enfin, les situations très vulnérables sont aussi très différentes d'une zone à l'autre, du coup, les Africains répartissent leurs cultures. Alors effectivement, on tombe toujours sur les mêmes cultures de subsistance (Zone sahélienne : Mils, Sorgho, Dolique). D'où une agriculture peu diversifiée car on fait la culture qui pousse bien et qui survit. Vers le Nord de l'Afrique subsaharienne, plus humide, on a des cultures plus diversifiée. Dans la savane, les racines des herbes empêchent un labour facile. La technique des brulis permet de vite défricher, d'avoir un engrais, mais il faut se dépêcher de cultiver avant que les racines ne repoussent (technique du billon). Là encore, les cultures sont celles qui peuvent pousser dans ces conditions.

Les cultures secondaires contiennent une partie de légumes. Dans la savane, le complément alimentaire vient surtout des arbres, de leurs fruits ou de leurs feuilles (feuilles de baobab). La baobab est l'arbre idéal, on se sert de tout (fruit, feuilles, graines pour faire de l'huile, …), mais on trouve aussi le faidherbia (fourrage pour les bêtes), le caïlcedrat, le palmier ou encore le tamarinier. Les Africains, sur des années ont su sélectionner les arbres qui leur sont utiles dans la nature. Ils ne sont pas planter, mais préserver. Là aussi leur agriculture est vulnérable mais toujours savante. Ils ont su s'adapter à la contrainte par un savoir très développé.

Antique : 06 - 12

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Note : cours comprenant le document word du prof, ce que nous n'avons pas pu faire en cours : les Oscophories et la thalassocratie athénienne.

Thésée, Médée et Egée à l'ultime instant



Sur le chemin, Ariane est délaissée sur une île par Thésée, mais celle-ci est dans les versions générales récupérée par Dyonisos qui en fait sa femme. En arrivant à Athènes, Thésée n'a pas mis de voiles blanches à son bateau (signe de sa survie) et a donc les voiles noires (signe de sa mort). Son père désespéré se jette dans la mer, qui devient mer Égée.

  1. L'épisode crétois : un mythe d'initiation

Cette histoire nous montre le passage de l'âge d'enfant à celui d'adulte. D'autant que ce récit, selon Henri Jeanmaire (Couoi et courètes, couroi signifiant le jeune garçon), ressemble à d'autres comme celui du petit Poucet, l'histoire d'un groupe de jeunes gens tombés chez des anthropophages, mais sauvés par l'initiative de l'un d'entre eux. Parallèle aussi entre le fil d'Ariane et les cailloux du petit Poucet, l'utilisation de la ruse. Cela passe aussi par le travestissement, Thésée masque deux garçons en filles, de même que le petit Poucet échange les bonnets des filles de l'ogre et de ses frères. Cet élément commun illustre un moment d'inversion. Pendant une initiation, il y a un changement de statut, on fait des choses contraires à la norme. Ce comportement transgressif, ce travestissement ici, est un rite de passage, un moment de marginalité qu'on retrouve dans les bizutages. Ensuite on passe à l'âge adulte. Thésée passe ensuite du statut de l'héritier à celui de roi.

  1. Du mythe au rite : Pyanopsies et Oschophories

Avec Thésée, on passe du mythe au rite via deux grandes fêtes liées à cet épisode crètois : les Pyanopsie et les Oschophories. C'est un aition, un mythe qui fonde un rituel (cela a donné étyologie en français). Ces fêtes annuelles, qui avaient lieu en même temps, concernaient les jeunes gens de la cité athénienne. Elles avaient lieu en octobre pour nous, le 7 Pyanepsion, jour du retour de Thésée.

Les Pyanopsies auraient été fondées par Thésée qui à son départ pour la Crête aurait fait un vœu à Apollon. Avant de partir, il avait fait ce vœu de créer un rituel en l'honneur d'Apollon en cas de succès de son entreprise. Cela se déroulait en contrebas de l'acropole avec deux caractéristiques : on y consommait une bouillie de fèves et on transportait un rameau de suppliants (rameau porté sur l'autel d'un dieu pour le supplier) dans le sanctuaire. La bouillie aurait été ce qu'auraient mangé les jeunes gens en revenant de Crête. D'ailleurs cela donne son nom à la fête (Pyanopsie : bouillie de fèves). Le rameau lui, correspondait au rameau posé par Thésée sur l'autel d'Apollon pour s'assurer sa protection. Or sur ce rameau de suppliants on trouve plus qu'un rameau d'olivier entouré de laine (ce qui est en général le cas), on trouve aussi des figues, des pains gras, un petit pot de miel, une fiole d'huile et une coupe de vin. Or cela diverge des sacrifices sanglants classiques, on a à faire à des offrandes végétales. C'est justement lié à l'initiation. Pour Lévi-Strauss il existe une grande polarité structurale entre le cru (la jeunesse inachevée) et le cuit (la finition). Or ce rameau mélange une partie de cru et de cuit. On a une première transformation de certains produits : miel, vin qui est cuit au soleil, figues cueillies, … On a donc une illustration de ceux qui participent au rituel puisque ce sont les jeunes gens passant de l'enfance à l'âge adulte qui offrent des produits à mi-chemin entre le cru et le cuit. C'est un entre-deux typique à l'histoire de Thésée.

Les Oscophories sont aussi une représentation de ce passage à l'âge adulte par le biais du rituel, la référence au récit de Thésée. Cette fois-ci, on portait des grappes de raisin. Se déroulant le même jour, la fête des Oschophories joue également sur la valeur initiatique de la légende. Elle aurait également été instituée par Thésée lui-même à son retour à Athènes, alors que celui-ci était partagé entre la joie du retour et la tristesse provoquée par l’annonce de la mort de son père.
D’après Plutarque, l’élément central de la fête consistait en une procession conduite par des jeunes enfants (paides) portant des ôschoi, des grappes de raisins encore attachées à leurs sarments. Précédé par un héraut, la procession était menée par deux garçons déguisés en filles. La troupe avançait en chantant vers le Phalère, le port archaïque d’Athènes. Elle aboutissait finalement au sanctuaire d’Athéna Skiras, où Thésée et ses compagnons étaient censés avoir débarqué.

Ce rituel apparemment étrange respecte toutes les étapes d’un rituel d’initiation :
  • Tout d’abord, un moment de séparation. La procession ritualisée ouvre un temps nouveau, un temps rituel fortement séparé du temps profane.
  • Ensuite, survient une période de marges, lorsque les jeunes gens atteignent le Phalère, aux limites du territoire civique. Au demeurant, le sanctuaire d’Athéna Skiras, où se rend la procession, incarne parfaitement, dans son nom même, l’état marginal par lequel passent les jeunes gens : en grec, le terme Skira désigne les mauvaises terres, situées aux frontières de la cité. Cette situation marginale est en outre caractérisée par l’inversion des normes ordinaires, comme le souligne le travestissement rituel des deux adolescents.
  • Cette période de marge et d’inversion débouche sur une phase d’agrégation. Tout d’abord, les jeunes effectuent un sacrifice en l’honneur de la divinité poliade Athéna, ce qui les désigne déjà comme de futurs citoyens. Surtout, ils retournent à Athènes jusqu’au sanctuaire d’Apollon Patroôs, situé sur l’agora qui, précisément, est le dieu patronnant l’intégration des jeunes gens dans la cité. Au terme du rituel, les jeunes participants ont donc changé de statut.

Cette transformation progressive trouve une certaine correspondance dans le type d’aliment porté, puis consommé par les jeunes gens. Au départ, les participants portent des grappes de raisins, encore attachées à leur sarment. Ces aliments symbolisent un premier stade de la transformation alimentaire, celui de la maturation naturelle des grains de raisins sous le soleil de l’été. Cette première étape est suivie par une autre : à la fin du rituel, les jeunes gens mangent des aliments cuits, carnés ou céréaliers, servis par les mères des enfants et des éphèbes (les deipnophores). Ce changement manifeste l’accès des adolescents à une nourriture civilisée et, partant, leur passage à l’âge adulte.

À travers ces deux rites complexes, les Athéniens commémoraient donc le rôle de Thésée en tant que protecteur des jeunes gens,garçons aux Oschophories et filles aux Pyanopsies, aidant à leur mûrissement et à leur passage au statut de citoyen. Toutefois, au cours de l’époque classique, ces rituels initiatiques perdent une partie de leur signification. Ils sont en effet doublés par d’autres rites d’intégration se tenant dans la phratrie, lors de la grande fêtes des Apatouries en l’honneur d’Apollon. la légende de Thésée assure désormais d’autres fonctions dans la cité. Plutôt qu’en héros de l’initiation, Thésée apparaît désormais en roi fondateur de la cité d’Athènes, l'artisan du synoecisme athénien.


  1. Thésée et l'Attique : le héros fondateur de la cité

Thésée devient le grand héros athénien comme on le voit sur les vases antiques où l'on constate une explosion de l'image de Thésée en mettant en valeur d'autres moments de sa vie. Particulièrement ces combats contre les monstres sur le territoire de l'Attique et sur les pourtours.

  1. Le retour du bâtard royal

Thésée est le fils d'Égée roi d'Athènes et d'Aïthra, fille du roi de Trézène, lui-même descendant de Pélops, fondateur du Péloponnèse et créateur des Jeux Olympiques. Thésée descend donc d'un héros très important du monde grec. Il n'empêche que Thésée est un bâtard puisque ces parents ne se sont pas mariés ensemble. Égée aurait été conduit par le roi de Trézène, Pitthée, dans le lit d'Aïthra. Mais Égée ne se marie pas avec elle, il se doute du risque encouru puisqu'il laissera derrière lui des symbola, des signes de reconnaissance, des signes qui permettront à son éventuel fils d'être reconnu. Ces symbola sont sous une pierre très lourde que seul un héros peut soulever. Une fois devenu adolescent, Thésée découvres ces symbola, des sandales et une épée entre autres. C'est son premier exploit.

Pour se faire reconnaître par son père, Thésée va rentrer à Athènes. Égée lui est alors dans sa ville, marié à Médée. Thésée se retrouve alors en proie à sa belle-mère. Il y a lutte pour le futur souverain.

  1. Le parcours civilisateur du héros

Thésée quitte donc Trézène et passe par l'Argolide, la Mégaride pour arriver en Attique. Sur ce trajet, il va lutter contre des monstres nombreux et des brigands tout aussi nombreux.
Il commence d'abord à Epidaure où il tue Périphétès, un brigand qui tuait tout la monde avec sa massue. Thésée lui prend son arme et le tue à son tour. Il arrive sur l'isthme de CoryntheSinis, un homme extrêmement fort, démembre des individus après les avoir attachés à un pin. Pareil, Thésée le tue comme celui-ci tuait ses victimes. Il arrive ensuite à Mégare, où il débarrasse le sol de la laie de Crommyon, une femelle sanglier effrayant les habitants. Arrivé dans le golfe de Salamine, Thésée rencontre le brigand Skiron qui obligeait les passants à lui laver les pieds avant de les jeter dans la mer, les tuant ainsi. Thésée le jettera dans la mer. Enfin, arrivé à Eleusis, grand sanctuaire de Déméter et de sa fille, un brigand nommé Procuste faisait subir à tout les passants une torture particulière, les passants plus petits que son lit, il les étirait, ceux qui étaient plus grand, il coupait ce qui dépassait. Thésée pour le faire rentrer dans son lit va découper Procuste. Systématiquement, Thésée tue ses adversaires de la manière dont ceux-ci tuaient leurs victimes innocentes.

Ce récit à pour but de montrer l'aptitude de Thésée à gérer la fonction royale. Il illustre sa dikè (sens de la justice) en infligeant à ses ennemis le sort violent dont ils usaient vis à vis des autres. La dikè, cette fonction typiquement royale selon Hésiode. Cette explication structuraliste a sa vision complémentaire, contextualiste. Thésée fait le trajet qui entoure le Golfe Saronique, or ce golfe est une des prétentions territoriales d'Athènes à la fin du – V° siècle. Mégare va passer sous le contrôle d'Athènes par la suite. Thésée étant censé délimiter le territoire d'Athènes puisqu'il aurait posé une borne sur l'isthme de Corinthe. Cette prétention athénienne passe aussi sur deux grandes îles Salamine et Egine dans le Golfe Saronique.
Ce parcours civilisateur ne se fait pas seulement en-dehors des frontières d'Athènes. Dans le territoire athénien il fait aussi des exploits. Ainsi Thésée soutient les prétentions territoriales d'Athènes en-dehors de l'Attique mais aussi dans ce territoire qu'il pacifie. Athènes est une exception à cette époque avec 2 000 kilomètres d'influence environ alors qu'une cité se limite en général à une trentaine de kilomètres. Thésée fait donc également preuve de ses vertus civilisatrices à l'intérieur du territoire pour pacifier et unifier le territoire.

  1. L'artisan du synoecisme athénien

Cette fois-ci on se place après l'épisode crétois. Les auteurs du – V° siècle racontent comment Thésée parvient à unifier le territoire qui n'avait pas d'unité véritable. Le territoire de l'Attique était mal contrôlé par Athènes et des velléités d'indépendance émergeaient. Le territoire n'était pas unifié déjà à l'époque mycénienne (5 villes se démarquaient avec un palais : Athènes, Eleusis, Marathon, Brauron, Thoricos ???).
Le synoecisme, c'est donné les mêmes institutions politiques à chaque cité : un bouleuterion (conseil) et un prytanée (foyer commun). C'est Thésée qui va unifier le territoire par cette uniformisation politique.

Par la suite, Thésée devient l'image de la propagande de la domination agressive d'Athènes, en devenant sous Cimon, la figure de la victoire d'Athènes sur les Perses et les prétentions d'Athènes à dominer l'ensemble du monde grec, notamment via la flotte militaire.





  1. Thésée et la propagande de Cimon : le héros protecteur du régime

  1. L'instauration du culte de Thésée

Après avoir été élu roi, Thésée finit par déposer sa couronne pour la remettre au peuple, ce qui pousse les Athéniens à imaginer qu'il est l'inventeur de la démocratie. Cependant, les démagogues auraient monté le peuple contre lui suite à cet acte et il aurait été exilé de sa cité. Il s'est alors réfugier à Skyros combattant des brigands sans succès où il y trouva la mort, poussé d'une falaise de l'île. Ce mythe est important puisque les Athéniens a posteriori seraient allés chercher ses ossements. Et c'est Cimon, fils de Miltiade le vainqueur de Marathon en – 490, qui mène l'expédition à Skyros. Cimon plutôt aristocrate, parvient à évincer son adversaire démocrate par ostracisation, Thémistocle.
Cimon après avoir reçu un oracle de Delphes, part à Skyros, y trouve des ossements dans une tombe (probablement mycénienne et abandonnée) et avec toute l'Assemblée présente, il les place dans une sanctuaire construit en son honneur, le théseion (introuvable aujourd'hui). Il y a donc un rituel qui lui est rendu le lendemain des Oscophories et des Pyanopsies : les Théseia. Le mois de Pyanepsion devient celui de Thésée. A partir de ce moment là, la création de ce culte, Cimon s'en sert comme support politique. Thésée est utilisé pour célébrer le passé, les guerres médiques puis l'hégémonie d'Athènes sur les mers.

  1. Thésée contre Médée

Quand Thésée arriva à Athènes, Médée reconnaît tout de suite le fils légitime de son mari. Elle va tenter de mettre son fils sur le trône en faisant tout pour éloigner Thésée, qu'Égée n'a pas encore reconnu. Médée incite donc Égée a envoyé cet homme combattre le taureau de Marathon, mais plutôt que d'y mourir, il réussit son exploit. Médée va alors tenter d'empoisonner Thésée, mais à l'ultime moment, Égée reconnaît les symbola de Trézène. Égée finit donc par reconnaître son héritier légitime, bannit Médée et son fils Médos qui fuient tout deux en Asie. Ensuite Thésée partira en Crète.

Cette histoire est un ajout tardif à la légende de Thésée. Cet affrontement entre Médée et Thésée est une subtile métaphore des guerres médiques (p.24). L'épreuve du taureau de Marathon renvoie à la première victoire athénienne à Marathon, celle de Milthiade, père de Cimon. Surtout que dans le Théséion, il y avait une représentation de la bataille de Marathon où l'on voyait Milthiade mais aussi Thésée, puisque Milthiade aurait eut une vision de Thésée.
Le bannissement de Médée et de Médos en Asie est associé pour les Grecs au fait que Médos est devenu ensuite l'ancêtre éponyme aux Mèdes, les ennemis des athéniens dans les guerres médiques. Cette expulsion de la sorcière et de son fils correspond aussi à l'expulsion des Perses de la mer Égée.

  1. Thésée chez Poséidon

Une autre transformation de la légende a lieu sous Cimon pour justifier la prétention de la domination athénienne des mers. Cimon va réussir avec l'aide de Bacchylide, poète de la première moitié du V° siècle, à changer son père. Aïtra aurait eut des rapports avec Poséidon, avant Égée, et Thésée serait son fils. Il est aussi le fils d'Égée puisque celui-ci l'a reconnu. Thésée a donc une double filiation. Ainsi dans le Théseion, on a une représentation de l'accueil d'Amphitrite, épouse de Poséidon, qui reconnaît ce fils de son mari. Cette représentation se multiplie à l'époque. Il devient l'enfant légitime de Poséidon.
Cette évolution est soulignée dans l’iconographie attique, tant privée que publique. Après – 470. les vases à figures rouges montrent ainsi volontiers Poséidon à la poursuite d’Aïthra, la mère de Thésée. Mieux encore, l’ascendance divine de Thésée est directement mise en scène dans le hieron de Thésée, érigé par Cimon. Le sanctuaire contenait en effet de célèbres peintures (tableaux ou fresques) conçues par Micon, dont l’une représentait le plongeon de Thésée dans la demeure marine de son père divin.
Le peintre faisait en l’occurrence allusion à un épisode du mythe, rapporté par le poète Bacchylide. La légende raconte que Thésée en arrivant en Crète est défié par Minos. Celui-ci se dit fils de Zeus, Thésée réplique qu'il est celui de Poséidon. Minos jette un anneau dans la mer est met au défi Thésée d'aller le chercher. Ce qu'il réussit, aidé d'Amphitrite. Elle lui donne l’anneau, mais aussi une couronne, pour prouver à Minos qu’il est bien le fils de Poséidon. À son retour sur le bateau, Thésée est donc reconnu comme fils de Poséidon, comme Minos s’enorgueillit lui-même fils de Zeus. Si la peinture de Micon est perdue, nous avons une représentation de la scène sur une coupe attique peinte par Euphronios, montrant Thésée accueilli par Amphitrite, sous la garde d’Athéna.

Dans cette nouvelle métamorphose du mythe, deux éléments sont mis en avant. Tout d’abord, Thésée est bien le fils de Poséidon, mais aussi, il est l’égal de Minos. Or, ces deux affirmations sont une façon détournée de revendiquer, pour Athènes, le contrôle des mers. En tant que dieu des océans, Poséidon symbolise évidemment la domination maritime à laquelle prétend Athènes. Quant à Minos, il incarne également, aux yeux des Grecs de l’Antiquité, la thalassocratie, le pouvoir sur les mers. D’après Thucydide, le Crétois aurait même été le premier des Grecs à dominer les océans. Dès lors, la thalassocratie minoenne devient la préfiguration de l’hégémonie athénienne sur le bassin méditerranéen : en terrassant le minotaure, Thésée l’emporte sur Minos, et Athènes se substitue à la Crète comme maîtresse des mers.

Ce nouveau discours coïncide évidemment avec la fondation de ligue de Délos, en – 478, et les visées maritimes d’Athènes dans le cadre de cette ligue insulaire, contrôlant une bonne partie de la mer Égée. Ce tournant maritime du mythe explique aussi le changement de la date des Theseia : au lieu d’avoir lieu le 7 Pyanepsion – le jour du retour de Thésée de Crète –, la fête est déplacée le jour d’après, le 8. Pourquoi avoir opéré ce petit changement ? Parce que, nous dit Plutarque, le 8 est le jour de Poséidon. C’était là une façon de rappeler la filiation divine de Thésée et d’affirmer à nouveau le lien spécifique qui reliait les Athéniens du – V° siècle et la mer.


En définitive, le mythe de Thésée s’est formée par strates successives. Au départ, Thésée est une figure largement panhellénique et incarne un héros protecteur de la jeunesse : certains rituels ont d’ailleurs conservé, jusqu’à l’époque impériale, cette signification originelle du mythe. À la fin du vie siècle, la figure de Thésée subit une importante transformation. Il devient alors le héros de la communauté athénienne, incarnant à la fois son unité politique interne et ses aspirations impérialistes externes.
Toutefois, cette identité n’a rien d’immuable : le mythe évolue selon les besoins et les aspirations de la communauté. Bientôt, Thésée devient le héros de la démocratie modérée du ive siècle. Invoquant la figure de Thésée, Isocrate appelle ainsi de ses vœux la mise en place d’une régime méritocratique, méritant à peine le nom de démocratie tant elle est modérée.

En définitive, la légende de Thésée montre comment se construit progressivement un mythe et des rituels spécifiquement athéniens, reflétant l’identité politique changeante de la cité et venant la soutenir en retour.

dimanche 18 décembre 2011

Moderne 06 - 12


Précédemment : Moderne 29 - 11
Note : Du fait de son retard, Mme Maitte renvoie le début du cours au TD correspondant.

Anne Robert Jacques Turgot

  1. Le programme réformateur de Turgot

Cf TD

  1. Pourquoi abolir les corporations et la corvée ?

Cf TD
A. L'économie politique, les corporations et la corvée

B. ???

C. Par quoi les remplacer ?

Les corporations ne sont pas remplacées par rien du tout, puisque des registres sur base territoriale apparaissent. Des syndics sont nommés par l'autorité territoriale.
Les règlements des corporations ne sont pas visés par l'Édit de suppression, ils sont conservés mais restent dans un état de limbe assez flou. Les corvées sont remplacées par des physiocrates entrepreneurs privés en charge des routes, des ponts, … Les salariés et les ouvriers veulent être fixés. Pour cela il y a une taxe spécifique dans l'Édit d'abolition et elle est levée en fonction du coût. Ces taxes seront spécifiquement attachées aux routes, aux ponts, … Si elles n'est pas totalement utilisée, elle est reportée l'année suivante. Son prélèvement se perçoit sur tout les propriétaires privilégiés ou non. Elle est établie sur la base du vingtième (nouvel impôt de 1750). L'impôt est rapidement perverti et rien ne sera concrètement mis en application puisque Turgot sera renvoyé quelques mois après l'Édit.


  1. De 1776 à 1791

  1. Le renvoi de Turgot et le rétablissement des corporations

A. Le « carnaval Turgot »

Les corporations fêtent ces abolitions de Turgot dans une explosion de joie spontanée dont on ne sait grand chose si ce n'est qu'elle est spontanée. Les compagnons trouvent alors des moyens supplémentaires de faire leurs lois à leurs maîtres. L'identité sociale des maîtres et remise en cause par l'abolition des corporations qui était aussi un classement social des individus. Il y a donc une dénonciation forte de Turgot, du métissage social rendu possible par l'Édit contre l'ordre voulu de Dieu.
C'est aussi dans le domaine économique et social que cela se ressent. La soif du gain entrainera la tromperie généralisée dont le public sera la principale victime face à des marchandises et des services frauduleux car plus contraint par des règles. On a une vision chaotique où on réalise que le Marché ne peut se réguler seul, il lui faut des règles établies, et que la société n'est pas la somme des individus, il existe des corps fondements de la société.

B. La chute de Turgot

Cette chute vient de l'impression de chaos social suite à l'abolition des corporations (particulièrement à Paris). La police intervient rapidement avec de nombreuses arrestations et de nouvelles contraintes. Cela augmente les tensions. Le Parlement monte alors en première ligne contre les réformes de Turgot par lie de justice. Leurs arguments montrent bien que les fondements de la société sont en cause : la société este composé d'États (ordres pour nous) cela fonde et soutient la nation et si cela disparaissait ce serait le désordre. Ces idées reprennent les termes de Charles Loyseau auteur d'un traité sur les trois ordres. Le Parlement aboutit à la conclusion que certains doivent commander et d'autres obéir, il n'y a pas d'égalité possible.

L'agitation continue d'autant plus qu'elle avait déjà commencé avec l'augmentation des prix du pain qui provoque la guerre des farines. Cela avait provoqué le recul du roi sur les mesures de Turgot qui est renvoyé en 1776. C'est Clugny qui prend sa place, il va tenter de revenir sur les mesures de Turgot : abolition des corvées, abolition des corporations, diminution du prix du grain, … Il n'est plus question de faire la suppression de tout l'Édit royal, même si c'est un recul.

C. Le rétablissement des corporations et de la corvée

Necker prend la place de Turgot en 1777 comme directeur général des finances (pas contrôleur puisqu'il est d'origine suisse et est protestant). Il est appelé pour ses liens avec la banque genévoise dans une situation de banqueroute de l'État. Il sera renvoyé en 1781 puis rappelé en 1788. Le rachat des corvées en taxes ??? est posé en 1776, puis généralisé en 1786. Ce rachat est plus ou moins imposé aux corvéables même s'ils ne le désire pas. En 1789, elles sont reprises dans les intendances de Besançon, Bordeaux et Rennes.

Au total il y a 3 édits, 13 déclarations royales, 57 mesures, … cela montre bien la multiplication des tentatives de changements. Il y a la volonté d'imposer un système national unificateur tentant d'allier la règle et la liberté. C'est la recherche d'autres moyens pour aboutir à un résultat identique. Si cela prend sens rapidement à Paris, ailleurs on en sait peu de choses et les corporations de province ???

Ces mesures ont poussé à la fusion forcée d'anciennes corporations voisines vers un semblant de rationalisation, l'extension des métiers libres, l'ouverture des corporations aux femmes (et celles des femmes aux hommes), autorisation de s'inscrire dans plus d'un métier, réduction des droits d'entrées (mais l'État empoche ¾ de la taxe) et l'extinction d'office des litiges entre les différentes communautés. Il y a un rétablissement pas du tout à l'identique, le corporatisme d'antan a vécu et il faut instaurer de nouveaux modes de régulation du travail.

Les nouveaux maîtres sont de trois catégories : les Anciens maîtres qui doivent payer une droit de confirmation (ou de réunion) pour récupérer le statut de maître, ceux qui ont profité de l'Édit de février qui doivent payer 1/10 du droit d'entrée ou postuler à 1/3 du plein tarif et enfin les Agrégés, les nouveaux maîtres, qui ne peuvent participer aux réunions, ne peuvent avoir d'apprentis, … Les Agrégés sont pourtant les plus nombreux puisque les anciens maîtres refusent de payer leur taxe et préfèrent être Agrégés tout en revendiquant le statut d'anciens maîtres. Cela multiplie les tensions entre maîtres et le gouvernement qui ne l'avait pas prévu compte sur le temps pour calmer le jeu. Selon Kaplan, il y a une grande plasticité de la situation qui aurait été relativement voulue par le gouvernement. Cela crée des oppositions durables entre tout les maîtres et la restauration n'est pas à l'identique.

Dans le cas des métiers libres, ces nouveaux édits poussent à désigner des syndics qui doivent inspecter la qualité des produits. Un aspect disciplinaire tombe aussi reprenant les lettres patente de l'édit de 1749 avec le billet de sortie, ou l'interdiction des confréries de compagnons. On veut toujours imposer le respect du modèle de subordination. Kaplan note l'ampleur du traumatisme et son caractère durable. L'Ancien Régime s'achève dans une certaine confusion, de nombreux maîtres regrettent l'ancien système et les compagnons attende un changement en leur faveur qui serait définitif.

Pour les manufactures, Necker instaure un système original , la marque de liberté. Le consommateur pouvant choisir la qualité du produit, Necker laisse l'ancien système de marque colbertiste, mais il distingue les produits qui ne suivent pas les règlements. On peut donc faire les produits comme on le désire.

  1. La Révolution et l'ancien ordre du travail

Les cahiers de Doléances sont assez contradictoires mais très peu se font l'écho des thèses libérales et demandent l'abolition des corps (les compagnons y ont peu la parole). On a donc la voix des maîtres essentiellement qui expriment leur mécontentement face au chaos de 1776. Ils sont contre l'abolition de Turgot et le corporatisme de Necker. Ils demandent le retour à la situation d'antan qui leur semblait être l'idéal.

Les décisions révolutionnaires vont dans un sens différent mais c'est aussi sous le coût d'une improvisation. Le 4 août 1789, avec l'abolition des privilèges (La nuit du 4 août 1789, Hirsch) et surtout l'abolition des corvées. Par contre les corporations sont étrangement épargnées. Il y a vote d'une motion demandant la réforme des lois relatives aux corps de métiers, mais elle est oubliée dans la constitution. Cela n'empêche pas que la plupart des acteurs notamment les compagnons, voire les maîtres de corporation, vont faire comme si elles n'existaient plus. Cela est renforcée le 6 août 1789 avec la liberté d'agir sans entraves, d'où les compagnons sont persuadés que chacun peut travailler comme il veut. Mais cela n'est pas présent dans la déclaration des Droits de l'Homme.
De 1789 à 1790, les maîtres vont attirer le regard des autorités sur les insubordinations et les cabales des compagnons qui menacent l'ordre économique. C'est donc sous le coup de l'improvisation que sont prises les décisions de 1791 comme le montre Minard.

  1. Les abolitions de 1791

A. Les décrets d'Allarde du 2 au 17 mars 1791

C'est une patente qui prend acte du non-fonctionnement des corps et qui néanmoins prend une mesure fiscale dépendant du métier contrôlé. Cf texte.

B. Les lois Le Chapelier du 14 au 17 juin 1791

Loin de l'interprétation historiographique de l'aboutissement d'une réflexion libérale, c'est une décision politique qui aboutit à un vide juridique plus qu'à l'instauration d'un ordre nouveau. En effet, l'agitation ouvrière est le cœur du problème. Cette agitation surtout développée dans le domaine de l'imprimerie et du bâtiment. Les pétitions en nom collectif sont interdites donc on censure la liberté d'expression
On limite aussi les activités des clubs et sociétés populaires. Ce sont des décisions politiques sans contenus sur la travail.

C. Le décret Goudard, 27 septembre 1791

Ce décret supprime l'organisation des inspecteurs dans les manufactures mais rien n'a le temps d'être établi derrière et un nouveau vide juridique en sort. Seul l'État et les individus sont face à face, comme le montre la loi Le Chapelier. Finalement on a la réprobation durable de toute concertation collective (corporations), un désencastrement de l'économie et d'un brouillage durable puisque au nom de la liberté individuelle, les groupes d'intérêts sont interdits puisqu'ils sont établis pour les employeurs.



  1. De 1791 à 1848

  1. L'impossible rétablissement des corporations


(cf texte de Minard).
Pas de vision téléologique, on a proposé de nouveau les corporations dans la suite de l'Histoire mais la connotation dont elles sont chargées sous l'Ancien Régime l'ont condamné. On a toujours d'une part la nostalgie de l'ordre ancien (les Ultras sous la Restauration) avec la dénonciation des « monopoleurs », du pouvoir intégral de l'argent, la volonté de retrouver des relations interpersonnelles qui tiennent peu compte des pratiques et de la réalité des acteurs économiques. De fait, il y a des entorses aux règles de la liberté au nom de la santé publique (boulangers, médecins, …). Dans le premier XIX° siècle, il y a pas mal de reconnaissances tacites sur lesquelles les policiers ferment les yeux.
L'organisation corporative demeure encore un peu après la Révolution. Mais l'Empire a mis en place la possibilité de réorganisation des employeurs avec la restauration des chambres de commerce et des chambres consultatives d'arts et métiers qui permettent l'organisation des milieux patronaux de faire connaître leur volonté dans tel ou tel domaine puisqu'elles sont régulièrement consultées pour émettre leurs opinions sur telle ou telle matière.

  1. Les trois piliers de l'encadrement et de la discipline du travail

A. Une législation d'exception pour les ouvriers : le livret de travail

Dans la loi du 22 germinal an XI, (12 avril 1803), on a de nombreuses mesures dont celle du livret ouvrier. Dans les manufactures, on veut contrôler la population ouvrière très concentrées donc on instaure ce livret. Mais on laisse de coté des grands secteurs : bâtiment, agriculture, artisanat, … Ce livret contraint les ouvriers à posséder un livret administratif, sorte de pièce d'identité particulière qui autorise à passer d'un secteur à l'autre. On y indique les documents d'états civils sur lesquels on marque les emplois, les avances et les dettes des ouvriers. Bref on indique les obligations de l'ouvrier vis à vis de son employeur. Les autorités peuvent donc vérifier cela. Ce sont les autorités maires ou commissaires de police qui les délivrent.

La réalité de l'application pose problème. On a retrouvé très peu de ces livrets car cela c'est peu généralisé. D'autant que lorsque l'on fait du travail agricole, le livret est oublié. On a alors une pratique de contournement surtout qu'un ouvrier sans livret n'a pas de peines pénales. Beaucoup d'ouvriers se vexent, ils sont assimilés à des criminels, passent leur temps au commissariat, se sentent fichés, … Pourtant pour certains c'est une aide à l'emploi, un marqueur de qualité du travail, un instrument de crédit, preuve d'une régularité de conduite acceptés de certains ouvriers. Les avis sont partagés sur ce livret. En 1851 et 1854, on tente de les propager en rajoutant les sanctions pénales. Il y a renforcement dans la seconde moitié du XIX° siècle jusqu'en 1890.

B. Le « libre contrat » du code civil (1804)

Une fois abolies les jurandes, les métiers devraient se fonder sur des contrats librement consentis entre employés et employeurs avec des contrats entre égaux. Cet idéal ne prend pas en compte l'inégalité des situations entre contractants. Mais le code civil de Napoléon est très laconique en matière de contrats de travail. Ce code civil assure donc des articles généraux, par exemple, en l'absence de loi spécifique, l'usage prédomine, les juges jugeront les usages en vigueur. Il existerait trois espèces principales de louage : ceux des gens de travail s'engageant au service de quelqu'un, ceux des voituriers en charge des transports (gens ou marchandises) et ceux des entrepreneurs d'ouvrages par suite de devis ou de marchés. Sur le louage des domestiques et des ouvriers réunis ensemble, on a seulement deux lois laconiques (articles 1780 et 1781), l'une qui souligne la temporalité du contrat et l'autre qui place le maître (plutôt l'employeur) en position de force sur l'ouvrier puisqu'il est toujours crédible par sa parole devant les juges. Pourtant on est dans le cadre de contrats entre égaux. Le maître plus proche et plus instruit n'aurait pas intérêt à fraudé sur des sommes modestes. La preuve par les témoins eut été plus utile mais avec plus d'employés que d'employeurs on redoutait une coalition ouvrière.

C. Les règlements de fabrique

Ceux-ci ont été reconnus en frimaire an XII, on reconnaît la liberté à l'employeur de régler à sa manière tout les règlements concrets du droit de travail, donc ceux des fabriques et des manufactures. En 1803, on a discuté de règlements généraux de ces manufactures en les uniformisant mais ce fut jugé impossible à faire. Les employeurs ont eut droit de régler cela eux-mêmes. Ce sont des règlements privés mais ayant force de loi, d'où un flottement de légitimité dans ces règlements. Ces règlements ne sont bien sur jamais concertés au XIX° siècle et sont la règle propre de l'employeur que tout travailleur accepte tacitement en signant son contrat de travail. Ces règlements datant d'avant la Révolution vont proliférer dans tout le XIX° siècle. Ils permettent d'enchâsser ces règles de travail d'autant que cela repose sur l'autonomie de la volonté et de la primauté du contrat.
Ils sont donc très nombreux, règlementent tant le travail que l'attitude dans le lieu de travail (pas parler, pas se distraire, …). Il y a des amendes en cas d'individus contrevenant au règlement pouvant aller jusqu'à l'exclusion de l'ouvrier. Mais cela reste discuter puisque les règlements sont très nombreux dans les fabriques. Par contre, leur application est limitée, certains fabricants déclarant que ces règlements sont mis en place dans l'atelier mais ne servent que peu, tandis que les ouvriers préfèrent dire qu'ils sont contrôlés, soumis à un règlement et à des amendes. On a donc une multiplication des conflits devant les prud'hommes sur ces règlements.