Note : cours comprenant le document word du prof, ce que nous n'avons pas pu faire en cours : les Oscophories et la thalassocratie athénienne.
Thésée, Médée et Egée à l'ultime instant
Sur le chemin, Ariane est
délaissée sur une île par Thésée, mais celle-ci est dans les
versions générales récupérée par Dyonisos qui en fait sa femme.
En arrivant à Athènes, Thésée n'a pas mis de voiles blanches à
son bateau (signe de sa survie) et a donc les voiles noires
(signe de sa mort). Son père désespéré se jette dans la mer, qui
devient mer Égée.
- L'épisode crétois : un mythe d'initiation
Cette histoire nous
montre le passage de l'âge d'enfant à celui d'adulte. D'autant que
ce récit, selon Henri Jeanmaire
(Couoi et courètes, couroi signifiant le jeune
garçon), ressemble à d'autres comme celui du petit Poucet,
l'histoire d'un groupe de jeunes gens tombés chez des
anthropophages, mais sauvés par l'initiative de l'un d'entre eux.
Parallèle aussi entre le fil d'Ariane et les cailloux du petit
Poucet, l'utilisation de la ruse. Cela passe aussi par le
travestissement, Thésée masque deux garçons en filles, de même
que le petit Poucet échange les bonnets des filles de l'ogre et de
ses frères. Cet élément commun illustre un moment d'inversion.
Pendant une initiation, il y a un changement de statut, on fait
des choses contraires à la norme. Ce comportement transgressif, ce
travestissement ici, est un rite de passage, un moment de
marginalité qu'on retrouve dans les bizutages. Ensuite on passe à
l'âge adulte. Thésée passe ensuite du statut de l'héritier à
celui de roi.
- Du mythe au rite : Pyanopsies et Oschophories
Avec Thésée, on
passe du mythe au rite via deux grandes fêtes liées à cet épisode
crètois : les Pyanopsie et les Oschophories. C'est un aition,
un mythe qui fonde un rituel (cela a donné étyologie en
français). Ces fêtes annuelles, qui avaient lieu en même temps,
concernaient les jeunes gens de la cité athénienne. Elles
avaient lieu en octobre pour nous, le 7 Pyanepsion, jour du
retour de Thésée.
Les Pyanopsies
auraient été fondées par Thésée qui à son départ pour la Crête
aurait fait un vœu à Apollon. Avant de partir, il avait fait ce
vœu de créer un rituel en l'honneur d'Apollon en cas de succès de
son entreprise. Cela se déroulait en contrebas de l'acropole avec
deux caractéristiques : on y consommait une bouillie de fèves et
on transportait un rameau de suppliants (rameau porté sur
l'autel d'un dieu pour le supplier) dans le sanctuaire. La
bouillie aurait été ce qu'auraient mangé les jeunes gens en
revenant de Crête. D'ailleurs cela donne son nom à la fête
(Pyanopsie : bouillie de fèves). Le rameau lui, correspondait au
rameau posé par Thésée sur l'autel d'Apollon pour s'assurer sa
protection. Or sur ce rameau de suppliants on trouve plus qu'un
rameau d'olivier entouré de laine (ce qui est en général le
cas), on trouve aussi des figues, des pains gras, un petit pot de
miel, une fiole d'huile et une coupe de vin. Or cela diverge des
sacrifices sanglants classiques, on a à faire à des offrandes
végétales. C'est justement lié à l'initiation. Pour
Lévi-Strauss
il existe une grande polarité structurale entre le cru (la jeunesse
inachevée) et le cuit (la finition). Or ce rameau mélange
une partie de cru et de cuit. On a une première transformation de
certains produits : miel, vin qui est cuit au soleil, figues
cueillies, … On a donc une illustration de ceux qui participent
au rituel puisque ce sont les jeunes gens passant de l'enfance à
l'âge adulte qui offrent des produits à mi-chemin entre le cru et
le cuit. C'est un entre-deux typique à l'histoire de Thésée.
Les Oscophories sont
aussi une représentation de ce passage à l'âge adulte par le biais
du rituel, la référence au récit de Thésée. Cette fois-ci, on
portait des grappes de raisin. Se déroulant le même jour, la fête
des Oschophories joue également sur la valeur initiatique de la
légende. Elle aurait également été instituée par Thésée
lui-même à son retour à Athènes, alors que celui-ci était
partagé entre la joie du retour et la tristesse provoquée par
l’annonce de la mort de son père.
D’après Plutarque,
l’élément central de la fête consistait en une procession
conduite par des jeunes enfants (paides)
portant des ôschoi,
des grappes de raisins encore attachées à leurs sarments. Précédé
par un héraut, la procession était menée par deux garçons
déguisés en filles.
La troupe avançait en chantant vers le
Phalère, le port archaïque d’Athènes. Elle aboutissait
finalement au sanctuaire d’Athéna Skiras, où Thésée et ses
compagnons étaient censés avoir débarqué.
Ce
rituel apparemment étrange respecte toutes les étapes d’un rituel
d’initiation :
- Tout d’abord, un moment de séparation. La procession ritualisée ouvre un temps nouveau, un temps rituel fortement séparé du temps profane.
- Ensuite, survient une période de marges, lorsque les jeunes gens atteignent le Phalère, aux limites du territoire civique. Au demeurant, le sanctuaire d’Athéna Skiras, où se rend la procession, incarne parfaitement, dans son nom même, l’état marginal par lequel passent les jeunes gens : en grec, le terme Skira désigne les mauvaises terres, situées aux frontières de la cité. Cette situation marginale est en outre caractérisée par l’inversion des normes ordinaires, comme le souligne le travestissement rituel des deux adolescents.
- Cette période de marge et d’inversion débouche sur une phase d’agrégation. Tout d’abord, les jeunes effectuent un sacrifice en l’honneur de la divinité poliade Athéna, ce qui les désigne déjà comme de futurs citoyens. Surtout, ils retournent à Athènes jusqu’au sanctuaire d’Apollon Patroôs, situé sur l’agora qui, précisément, est le dieu patronnant l’intégration des jeunes gens dans la cité. Au terme du rituel, les jeunes participants ont donc changé de statut.
Cette
transformation progressive trouve une certaine correspondance dans le
type d’aliment porté, puis consommé par les jeunes gens. Au
départ, les participants portent des grappes de raisins, encore
attachées à leur sarment. Ces aliments symbolisent un premier stade
de la transformation alimentaire, celui de la maturation naturelle
des grains de raisins sous le soleil de l’été. Cette première
étape est suivie par une autre : à la fin du rituel, les jeunes
gens mangent des aliments cuits, carnés ou céréaliers, servis par
les mères des enfants et des éphèbes (les deipnophores). Ce
changement manifeste l’accès des adolescents à une nourriture
civilisée et, partant, leur passage à l’âge adulte.
À
travers ces deux rites complexes, les Athéniens commémoraient donc
le rôle de Thésée en tant que protecteur des jeunes gens,garçons
aux Oschophories et filles aux Pyanopsies, aidant
à leur mûrissement et à leur passage au statut de citoyen.
Toutefois, au cours de l’époque classique, ces rituels
initiatiques perdent une partie de leur signification. Ils sont en
effet doublés par d’autres rites d’intégration se tenant dans
la phratrie, lors de la grande fêtes des Apatouries en l’honneur
d’Apollon. la légende de Thésée assure désormais d’autres
fonctions dans la cité. Plutôt qu’en héros de l’initiation,
Thésée apparaît désormais en roi fondateur de la cité d’Athènes,
l'artisan du synoecisme athénien.
- Thésée et l'Attique : le héros fondateur de la cité
Thésée devient le
grand héros athénien comme on le voit sur les vases antiques où
l'on constate une explosion de l'image de Thésée en mettant en
valeur d'autres moments de sa vie. Particulièrement ces combats
contre les monstres sur le territoire de l'Attique et sur les
pourtours.
- Le retour du bâtard royal
Thésée est le fils
d'Égée roi d'Athènes et d'Aïthra,
fille du roi de Trézène, lui-même descendant de Pélops,
fondateur du Péloponnèse et créateur des Jeux Olympiques. Thésée
descend donc d'un héros très important du monde grec. Il n'empêche
que Thésée est un bâtard puisque ces parents ne se sont pas
mariés ensemble. Égée aurait été conduit par le roi de
Trézène, Pitthée, dans le lit d'Aïthra. Mais Égée ne se marie
pas avec elle, il se doute du risque encouru puisqu'il laissera
derrière lui des symbola, des signes de
reconnaissance, des signes qui permettront à son éventuel fils
d'être reconnu. Ces symbola sont sous une
pierre très lourde que seul un héros peut soulever. Une fois devenu
adolescent, Thésée découvres ces symbola, des
sandales et une épée entre autres. C'est son premier exploit.
Pour se faire reconnaître
par son père, Thésée va rentrer à Athènes. Égée lui est alors
dans sa ville, marié à Médée. Thésée se retrouve alors en proie
à sa belle-mère. Il y a lutte pour le futur souverain.
- Le parcours civilisateur du héros
Thésée quitte donc
Trézène et passe par l'Argolide, la Mégaride pour arriver en
Attique. Sur ce trajet, il va lutter contre des monstres nombreux et
des brigands tout aussi nombreux.
Il commence d'abord à
Epidaure où il tue Périphétès,
un brigand qui tuait tout la monde avec sa massue. Thésée lui prend
son arme et le tue à son tour. Il arrive sur l'isthme de Corynthe
où Sinis, un homme extrêmement
fort, démembre des individus après les avoir attachés à un pin.
Pareil, Thésée le tue comme celui-ci tuait ses victimes. Il arrive
ensuite à Mégare, où il débarrasse le sol de la laie de
Crommyon, une femelle sanglier effrayant les habitants. Arrivé
dans le golfe de Salamine, Thésée rencontre le brigand
Skiron qui obligeait les passants
à lui laver les pieds avant de les jeter dans la mer, les tuant
ainsi. Thésée le jettera dans la mer. Enfin, arrivé à Eleusis,
grand sanctuaire de Déméter et de sa fille, un brigand nommé
Procuste faisait subir à tout
les passants une torture particulière, les passants plus petits que
son lit, il les étirait, ceux qui étaient plus grand, il coupait ce
qui dépassait. Thésée pour le faire rentrer dans son lit va
découper Procuste. Systématiquement, Thésée tue ses
adversaires de la manière dont ceux-ci tuaient leurs victimes
innocentes.
Ce récit à pour but
de montrer l'aptitude de Thésée à gérer la fonction royale. Il
illustre sa dikè (sens de la justice) en
infligeant à ses ennemis le sort violent dont ils usaient vis à vis
des autres. La dikè, cette fonction typiquement royale
selon Hésiode. Cette explication structuraliste a sa vision
complémentaire, contextualiste. Thésée fait le trajet qui
entoure le Golfe Saronique, or ce golfe est une des prétentions
territoriales d'Athènes à la fin du – V° siècle. Mégare va
passer sous le contrôle d'Athènes par la suite. Thésée étant
censé délimiter le territoire d'Athènes puisqu'il aurait posé une
borne sur l'isthme de Corinthe. Cette prétention athénienne
passe aussi sur deux grandes îles Salamine et Egine dans le Golfe
Saronique.
Ce parcours
civilisateur ne se fait pas seulement en-dehors des frontières
d'Athènes. Dans le territoire athénien il fait aussi des exploits.
Ainsi Thésée soutient les prétentions territoriales d'Athènes
en-dehors de l'Attique mais aussi dans ce territoire qu'il pacifie.
Athènes est une exception à cette époque avec 2 000 kilomètres
d'influence environ alors qu'une cité se limite en général à une
trentaine de kilomètres. Thésée fait donc également preuve de ses
vertus civilisatrices à l'intérieur du territoire pour pacifier et
unifier le territoire.
- L'artisan du synoecisme athénien
Cette fois-ci on se
place après l'épisode crétois. Les auteurs du – V° siècle
racontent comment Thésée parvient à unifier le territoire qui
n'avait pas d'unité véritable. Le territoire de l'Attique était
mal contrôlé par Athènes et des velléités d'indépendance
émergeaient. Le territoire n'était pas unifié déjà à
l'époque mycénienne (5 villes se démarquaient avec un palais :
Athènes, Eleusis, Marathon, Brauron, Thoricos ???).
Le synoecisme, c'est
donné les mêmes institutions politiques à chaque cité : un
bouleuterion (conseil) et un prytanée (foyer commun). C'est
Thésée qui va unifier le territoire par cette uniformisation
politique.
Par la suite, Thésée
devient l'image de la propagande de la domination agressive
d'Athènes, en devenant sous Cimon, la
figure de la victoire d'Athènes sur les Perses et les prétentions
d'Athènes à dominer l'ensemble du monde grec, notamment via la
flotte militaire.
- Thésée et la propagande de Cimon : le héros protecteur du régime
- L'instauration du culte de Thésée
Après avoir été élu
roi, Thésée finit par déposer sa couronne pour la remettre au
peuple, ce qui pousse les Athéniens à imaginer qu'il est
l'inventeur de la démocratie. Cependant, les démagogues
auraient monté le peuple contre lui suite à cet acte et il aurait
été exilé de sa cité. Il s'est alors réfugier à Skyros
combattant des brigands sans succès où il y trouva la mort, poussé
d'une falaise de l'île. Ce mythe est important puisque les
Athéniens a posteriori seraient allés chercher ses ossements. Et
c'est Cimon, fils de
Miltiade le vainqueur de
Marathon en – 490, qui
mène l'expédition à Skyros. Cimon plutôt aristocrate,
parvient à évincer son adversaire démocrate par ostracisation,
Thémistocle.
Cimon après avoir reçu
un oracle de Delphes, part à Skyros, y trouve des ossements dans une
tombe (probablement mycénienne et abandonnée) et avec toute
l'Assemblée présente, il les place dans une sanctuaire construit en
son honneur, le théseion (introuvable aujourd'hui). Il y a
donc un rituel qui lui est rendu le lendemain des Oscophories et des
Pyanopsies : les Théseia. Le mois de Pyanepsion devient celui de
Thésée. A partir de ce moment là, la création de ce culte,
Cimon s'en sert comme support politique. Thésée est utilisé pour
célébrer le passé, les guerres médiques puis l'hégémonie
d'Athènes sur les mers.
- Thésée contre Médée
Quand Thésée arriva
à Athènes, Médée
reconnaît tout de suite le fils légitime de son mari. Elle va
tenter de mettre son fils sur le trône en faisant tout pour éloigner
Thésée, qu'Égée n'a pas encore reconnu. Médée incite
donc Égée a envoyé cet homme combattre le taureau de Marathon,
mais plutôt que d'y mourir, il réussit son exploit. Médée va
alors tenter d'empoisonner Thésée, mais à l'ultime moment, Égée
reconnaît les symbola de Trézène. Égée finit donc par
reconnaître son héritier légitime, bannit Médée et son fils
Médos qui fuient tout deux en Asie. Ensuite Thésée partira en
Crète.
Cette histoire est un
ajout tardif à la légende de Thésée. Cet affrontement entre Médée
et Thésée est une subtile métaphore des guerres médiques
(p.24). L'épreuve du taureau de Marathon renvoie à la première
victoire athénienne à Marathon, celle de Milthiade, père de
Cimon. Surtout que dans le Théséion, il y avait une représentation
de la bataille de Marathon où l'on voyait Milthiade mais aussi
Thésée, puisque Milthiade aurait eut une vision de Thésée.
Le bannissement de
Médée et de Médos en Asie est associé pour les Grecs au fait que
Médos est devenu ensuite l'ancêtre éponyme aux Mèdes, les
ennemis des athéniens dans les guerres médiques. Cette expulsion de
la sorcière et de son fils correspond aussi à l'expulsion des
Perses de la mer Égée.
- Thésée chez Poséidon
Une autre
transformation de la légende a lieu sous Cimon pour justifier la
prétention de la domination athénienne des mers. Cimon va réussir
avec l'aide de Bacchylide,
poète de la première moitié du V° siècle, à changer son
père. Aïtra aurait eut des rapports avec Poséidon,
avant Égée, et Thésée serait son fils. Il est aussi le fils
d'Égée puisque celui-ci l'a reconnu. Thésée a donc une double
filiation. Ainsi dans le Théseion, on a une représentation de
l'accueil d'Amphitrite, épouse
de Poséidon, qui reconnaît ce fils de son mari. Cette
représentation se multiplie à l'époque. Il devient l'enfant
légitime de Poséidon.
Cette
évolution est soulignée dans l’iconographie attique, tant privée
que publique. Après – 470. les vases à figures rouges montrent
ainsi volontiers Poséidon à la poursuite d’Aïthra, la mère de
Thésée. Mieux encore, l’ascendance divine de Thésée est
directement mise en scène dans le hieron de
Thésée, érigé par Cimon. Le sanctuaire contenait en effet de
célèbres peintures (tableaux ou fresques) conçues par Micon,
dont l’une représentait le plongeon de Thésée dans la demeure
marine de son père divin.
Le
peintre faisait en l’occurrence allusion à un épisode du mythe,
rapporté par le poète Bacchylide. La légende raconte que Thésée
en arrivant en Crète est défié par Minos. Celui-ci se dit fils de
Zeus, Thésée réplique qu'il est celui de Poséidon. Minos jette un
anneau dans la mer est met au défi Thésée d'aller le chercher. Ce
qu'il réussit, aidé d'Amphitrite. Elle lui donne l’anneau,
mais aussi une couronne, pour prouver à Minos qu’il est bien le
fils de Poséidon. À son retour sur le bateau, Thésée est donc
reconnu comme fils de Poséidon, comme Minos s’enorgueillit
lui-même fils de Zeus. Si la peinture de Micon est perdue, nous
avons une représentation de la scène sur une coupe attique peinte
par Euphronios, montrant Thésée accueilli par Amphitrite, sous la
garde d’Athéna.
Dans
cette nouvelle métamorphose du mythe, deux éléments sont mis en
avant. Tout d’abord, Thésée est bien le fils de Poséidon, mais
aussi, il est l’égal de Minos. Or, ces deux affirmations sont une
façon détournée de revendiquer, pour Athènes, le contrôle des
mers. En tant que dieu des océans, Poséidon symbolise évidemment
la domination maritime à laquelle prétend Athènes. Quant à
Minos, il incarne également, aux yeux des Grecs de l’Antiquité,
la thalassocratie, le pouvoir sur les mers.
D’après
Thucydide, le Crétois aurait même été le premier des Grecs à
dominer les océans. Dès lors, la thalassocratie minoenne devient la
préfiguration de l’hégémonie athénienne sur le bassin
méditerranéen : en terrassant le minotaure, Thésée l’emporte
sur Minos, et Athènes se substitue à la Crète comme maîtresse des
mers.
Ce
nouveau discours coïncide évidemment avec la fondation de ligue de
Délos, en – 478, et les visées maritimes d’Athènes dans le
cadre de cette ligue insulaire, contrôlant une bonne partie de
la mer Égée. Ce tournant maritime du mythe explique aussi le
changement de la date des Theseia : au lieu d’avoir
lieu le 7 Pyanepsion – le jour du retour de Thésée de Crète –,
la fête est déplacée le jour d’après, le 8. Pourquoi avoir
opéré ce petit changement ? Parce que, nous dit Plutarque, le 8 est
le jour de Poséidon. C’était là une façon de rappeler la
filiation divine de Thésée et d’affirmer à nouveau le lien
spécifique qui reliait les Athéniens du – V° siècle
et la mer.
En
définitive, le mythe de Thésée s’est formée par strates
successives. Au départ, Thésée est une figure largement
panhellénique et incarne un héros protecteur de la jeunesse :
certains rituels ont d’ailleurs conservé, jusqu’à l’époque
impériale, cette signification originelle du mythe. À la fin du
vie siècle, la figure de Thésée
subit une importante transformation. Il devient alors le héros de la
communauté athénienne, incarnant à la fois son unité politique
interne et ses aspirations impérialistes externes.
Toutefois,
cette identité n’a rien d’immuable : le mythe évolue
selon les besoins et les aspirations de la communauté. Bientôt,
Thésée devient le héros de la démocratie modérée du ive
siècle. Invoquant la figure de Thésée, Isocrate
appelle ainsi de ses vœux la mise en place d’une régime
méritocratique, méritant à peine le nom de démocratie tant elle
est modérée.
En
définitive, la légende de Thésée montre comment se construit
progressivement un mythe et des rituels spécifiquement athéniens,
reflétant l’identité politique changeante de la cité et venant
la soutenir en retour.
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