Précédemment : Moderne 29 - 11
Note : Du fait de son retard, Mme Maitte renvoie le début du cours au TD correspondant.
Anne Robert Jacques Turgot
- Le programme réformateur de Turgot
Cf
TD
- Pourquoi abolir les corporations et la corvée ?
Cf
TD
A.
L'économie politique, les
corporations et la corvée
B.
???
C.
Par quoi les remplacer ?
Les
corporations ne sont pas remplacées par rien du tout, puisque des
registres sur base territoriale apparaissent. Des syndics sont nommés
par l'autorité territoriale.
Les
règlements des corporations ne sont pas visés par l'Édit de
suppression, ils sont conservés mais restent dans un état de limbe
assez flou. Les corvées sont remplacées par des physiocrates
entrepreneurs privés en charge des routes, des ponts, … Les
salariés et les ouvriers veulent être fixés. Pour cela il y a une
taxe spécifique dans l'Édit d'abolition et elle est levée en
fonction du coût. Ces taxes seront spécifiquement attachées aux
routes, aux ponts, … Si elles n'est pas totalement utilisée, elle
est reportée l'année suivante. Son prélèvement se perçoit sur
tout les propriétaires privilégiés ou non. Elle est établie sur
la base du vingtième (nouvel impôt de 1750). L'impôt est
rapidement perverti et rien ne sera concrètement mis en application
puisque Turgot sera renvoyé quelques mois après l'Édit.
- De 1776 à 1791
- Le renvoi de Turgot et le rétablissement des corporations
A.
Le « carnaval Turgot »
Les
corporations fêtent ces abolitions de Turgot
dans une explosion de joie spontanée dont on ne sait grand chose si
ce n'est qu'elle est spontanée. Les compagnons trouvent alors des
moyens supplémentaires de faire leurs lois à leurs maîtres.
L'identité sociale des maîtres et remise en cause par
l'abolition des corporations qui était aussi un classement social
des individus. Il y a donc une dénonciation forte de Turgot, du
métissage social rendu possible par l'Édit contre l'ordre voulu de
Dieu.
C'est
aussi dans le domaine économique et social que cela se ressent. La
soif du gain entrainera la tromperie généralisée dont le
public sera la principale victime face à des marchandises et des
services frauduleux car plus contraint par des règles. On a une
vision chaotique où on réalise que le Marché ne peut se réguler
seul, il lui faut des règles établies, et que la société n'est
pas la somme des individus, il existe des corps fondements de la
société.
B.
La chute de Turgot
Cette
chute vient de l'impression de chaos social suite à l'abolition des
corporations (particulièrement à Paris). La police intervient
rapidement avec de nombreuses arrestations et de nouvelles
contraintes. Cela augmente les tensions. Le Parlement monte alors
en première ligne contre les réformes de Turgot par lie de justice.
Leurs arguments montrent bien que les fondements de la société sont
en cause : la société este composé d'États (ordres pour nous)
cela fonde et soutient la nation et si cela disparaissait ce serait
le désordre. Ces idées reprennent les termes de Charles
Loyseau auteur d'un traité sur les trois ordres. Le Parlement
aboutit à la conclusion que certains doivent commander et d'autres
obéir, il n'y a pas d'égalité possible.
L'agitation
continue d'autant plus qu'elle avait déjà commencé avec
l'augmentation des prix du pain qui provoque la guerre des farines.
Cela avait provoqué le recul du roi sur les mesures de Turgot qui
est renvoyé en 1776.
C'est Clugny qui prend sa
place, il va tenter de revenir sur les mesures de Turgot :
abolition des corvées, abolition des corporations, diminution du
prix du grain, … Il n'est plus question de faire la suppression de
tout l'Édit royal, même si c'est un recul.
C.
Le rétablissement des corporations
et de la corvée
Necker
prend la place de Turgot
en 1777 comme directeur
général des finances (pas contrôleur puisqu'il est d'origine
suisse et est protestant). Il est appelé pour ses liens avec la
banque genévoise dans une situation de banqueroute de l'État. Il
sera renvoyé en 1781 puis rappelé en 1788. Le rachat des corvées
en taxes ??? est posé en 1776, puis généralisé en 1786. Ce
rachat est plus ou moins imposé aux corvéables même s'ils ne le
désire pas. En 1789, elles sont reprises dans les intendances de
Besançon, Bordeaux et Rennes.
Au
total il y a 3 édits, 13 déclarations royales, 57 mesures, … cela
montre bien la multiplication des tentatives de changements. Il y
a la volonté d'imposer un système national unificateur tentant
d'allier la règle et la liberté. C'est la recherche d'autres
moyens pour aboutir à un résultat identique. Si cela prend sens
rapidement à Paris, ailleurs on en sait peu de choses et les
corporations de province ???
Ces
mesures ont poussé à la fusion forcée d'anciennes corporations
voisines vers un semblant de rationalisation, l'extension des métiers
libres, l'ouverture des corporations aux femmes (et celles des
femmes aux hommes), autorisation de s'inscrire dans plus d'un
métier, réduction des droits d'entrées (mais l'État empoche ¾
de la taxe) et l'extinction d'office des litiges entre les
différentes communautés. Il y a un rétablissement pas du tout
à l'identique, le corporatisme d'antan a vécu et il faut instaurer
de nouveaux modes de régulation du travail.
Les
nouveaux maîtres sont de trois catégories : les Anciens maîtres
qui doivent payer une droit de confirmation (ou de réunion) pour
récupérer le statut de maître, ceux qui ont profité de l'Édit
de février qui doivent payer 1/10 du droit d'entrée ou postuler
à 1/3 du plein tarif et enfin les Agrégés, les nouveaux
maîtres, qui ne peuvent participer aux réunions, ne peuvent avoir
d'apprentis, … Les Agrégés sont pourtant les plus nombreux
puisque les anciens maîtres refusent de payer leur taxe et préfèrent
être Agrégés tout en revendiquant le statut d'anciens maîtres.
Cela multiplie les tensions entre maîtres et le gouvernement qui
ne l'avait pas prévu compte sur le temps pour calmer le jeu.
Selon Kaplan, il y a une grande
plasticité de la situation qui aurait été relativement voulue par
le gouvernement. Cela crée des oppositions durables entre tout les
maîtres et la restauration n'est pas à l'identique.
Dans
le cas des métiers libres, ces nouveaux édits poussent à désigner
des syndics qui doivent inspecter la qualité des produits. Un aspect
disciplinaire tombe aussi reprenant les lettres patente de l'édit
de 1749 avec le billet de sortie, ou l'interdiction des confréries
de compagnons. On veut toujours imposer le respect du modèle de
subordination. Kaplan note l'ampleur du traumatisme et son caractère
durable. L'Ancien Régime s'achève dans une certaine confusion,
de nombreux maîtres regrettent l'ancien système et les compagnons
attende un changement en leur faveur qui serait définitif.
Pour
les manufactures, Necker instaure un système original , la marque de
liberté. Le consommateur pouvant choisir la qualité du produit,
Necker laisse l'ancien système de marque colbertiste, mais il
distingue les produits qui ne suivent pas les règlements. On peut
donc faire les produits comme on le désire.
- La Révolution et l'ancien ordre du travail
Les
cahiers de Doléances sont assez contradictoires mais très peu se
font l'écho des thèses libérales et demandent l'abolition des
corps (les compagnons y ont peu la parole). On a donc la voix
des maîtres essentiellement qui expriment leur mécontentement face
au chaos de 1776. Ils sont
contre l'abolition de Turgot et le corporatisme de Necker. Ils
demandent le retour à la situation d'antan qui leur semblait être
l'idéal.
Les
décisions révolutionnaires vont dans un sens différent mais c'est
aussi sous le coût d'une improvisation. Le
4 août 1789, avec l'abolition des privilèges (La
nuit du 4 août 1789, Hirsch) et surtout l'abolition des
corvées. Par contre les corporations sont étrangement épargnées.
Il y a vote d'une motion demandant la réforme des lois relatives aux
corps de métiers, mais elle est oubliée dans la constitution. Cela
n'empêche pas que la plupart des acteurs notamment les compagnons,
voire les maîtres de corporation, vont faire comme si elles
n'existaient plus. Cela est renforcée le 6
août 1789 avec la liberté d'agir sans entraves,
d'où les compagnons sont persuadés que chacun peut travailler comme
il veut. Mais cela n'est pas présent dans la déclaration des Droits
de l'Homme.
De
1789 à 1790, les maîtres vont attirer le regard des autorités sur
les insubordinations et les cabales des compagnons qui menacent
l'ordre économique. C'est donc sous le coup de l'improvisation que
sont prises les décisions de 1791 comme le montre Minard.
- Les abolitions de 1791
A.
Les décrets d'Allarde du 2 au 17
mars 1791
C'est
une patente qui prend acte du non-fonctionnement des corps et qui
néanmoins prend une mesure fiscale dépendant du métier contrôlé.
Cf texte.
B.
Les lois Le Chapelier du 14 au 17
juin 1791
Loin
de l'interprétation historiographique de l'aboutissement d'une
réflexion libérale, c'est une décision politique qui aboutit à un
vide juridique plus qu'à l'instauration d'un ordre nouveau. En
effet, l'agitation ouvrière est le cœur du problème. Cette
agitation surtout développée dans le domaine de l'imprimerie et du
bâtiment. Les pétitions en nom collectif sont interdites donc on
censure la liberté d'expression
On
limite aussi les activités des clubs et sociétés populaires. Ce
sont des décisions politiques sans contenus sur la travail.
C.
Le décret Goudard, 27 septembre 1791
Ce
décret supprime l'organisation des inspecteurs dans les manufactures
mais rien n'a le temps d'être établi derrière et un nouveau vide
juridique en sort. Seul l'État et les individus sont face à
face, comme le montre la loi Le Chapelier. Finalement on a la
réprobation durable de toute concertation collective (corporations),
un désencastrement de l'économie et d'un brouillage durable
puisque au nom de la liberté individuelle, les groupes d'intérêts
sont interdits puisqu'ils sont établis pour les employeurs.
- De 1791 à 1848
- L'impossible rétablissement des corporations
(cf
texte de Minard).
Pas
de vision téléologique, on a proposé de nouveau les corporations
dans la suite de l'Histoire mais la connotation dont elles sont
chargées sous l'Ancien Régime l'ont condamné. On a toujours d'une
part la nostalgie de l'ordre ancien (les Ultras sous la
Restauration) avec la dénonciation des « monopoleurs »,
du pouvoir intégral de l'argent, la volonté de retrouver des
relations interpersonnelles qui tiennent peu compte des pratiques et
de la réalité des acteurs économiques. De fait, il y a des
entorses aux règles de la liberté au nom de la santé publique
(boulangers, médecins, …). Dans le premier XIX° siècle, il y a
pas mal de reconnaissances tacites sur lesquelles les policiers
ferment les yeux.
L'organisation
corporative demeure encore un peu après la Révolution. Mais
l'Empire a mis en place la possibilité de réorganisation des
employeurs avec la restauration des chambres de commerce et des
chambres consultatives d'arts et métiers qui permettent
l'organisation des milieux patronaux de faire connaître leur volonté
dans tel ou tel domaine puisqu'elles sont régulièrement consultées
pour émettre leurs opinions sur telle ou telle matière.
- Les trois piliers de l'encadrement et de la discipline du travail
A.
Une législation d'exception pour les
ouvriers : le livret de travail
Dans
la loi du 22 germinal an XI,
(12 avril 1803), on a de
nombreuses mesures dont celle du livret ouvrier. Dans les
manufactures, on veut contrôler la population ouvrière très
concentrées donc on instaure ce livret. Mais on laisse de coté des
grands secteurs : bâtiment, agriculture, artisanat, … Ce livret
contraint les ouvriers à posséder un livret administratif, sorte de
pièce d'identité particulière qui autorise à passer d'un secteur
à l'autre. On y indique les documents d'états civils sur
lesquels on marque les emplois, les avances et les dettes des
ouvriers. Bref on indique les obligations de l'ouvrier vis à vis
de son employeur. Les autorités peuvent donc vérifier cela. Ce
sont les autorités maires ou commissaires de police qui les
délivrent.
La
réalité de l'application pose problème. On a retrouvé très peu
de ces livrets car cela c'est peu généralisé. D'autant que lorsque
l'on fait du travail agricole, le livret est oublié. On a alors une
pratique de contournement surtout qu'un ouvrier sans livret n'a pas
de peines pénales. Beaucoup d'ouvriers se vexent, ils sont
assimilés à des criminels, passent leur temps au commissariat, se
sentent fichés, … Pourtant pour certains c'est une aide à
l'emploi, un marqueur de qualité du travail, un instrument de
crédit, preuve d'une régularité de conduite acceptés de certains
ouvriers. Les avis sont partagés sur ce livret. En 1851 et 1854, on
tente de les propager en rajoutant les sanctions pénales. Il y a
renforcement dans la seconde moitié du XIX° siècle jusqu'en 1890.
B.
Le « libre contrat » du
code civil (1804)
Une
fois abolies les jurandes, les métiers devraient se fonder sur des
contrats librement consentis entre employés et employeurs avec des
contrats entre égaux. Cet idéal ne prend pas en compte l'inégalité
des situations entre contractants. Mais le code civil de Napoléon
est très laconique en matière de contrats de travail. Ce code
civil assure donc des articles généraux, par exemple, en l'absence
de loi spécifique, l'usage prédomine, les juges jugeront les usages
en vigueur. Il existerait trois espèces principales de louage : ceux
des gens de travail s'engageant au service de quelqu'un, ceux des
voituriers en charge des transports (gens ou marchandises) et ceux
des entrepreneurs d'ouvrages par suite de devis ou de marchés. Sur
le louage des domestiques et des ouvriers réunis ensemble, on a
seulement deux lois laconiques (articles 1780 et 1781), l'une qui
souligne la temporalité du contrat et l'autre qui place le maître
(plutôt l'employeur) en position de force sur l'ouvrier puisqu'il
est toujours crédible par sa parole devant les juges. Pourtant on
est dans le cadre de contrats entre égaux. Le maître plus proche et
plus instruit n'aurait pas intérêt à fraudé sur des sommes
modestes. La preuve par les témoins eut été plus utile mais avec
plus d'employés que d'employeurs on redoutait une coalition
ouvrière.
C.
Les règlements de fabrique
Ceux-ci
ont été reconnus en frimaire an XII, on reconnaît la liberté à
l'employeur de régler à sa manière tout les règlements concrets
du droit de travail, donc ceux des fabriques et des manufactures.
En 1803, on a discuté de règlements généraux de ces manufactures
en les uniformisant mais ce fut jugé impossible à faire. Les
employeurs ont eut droit de régler cela eux-mêmes. Ce sont des
règlements privés mais ayant force de loi, d'où un flottement de
légitimité dans ces règlements. Ces règlements ne sont bien
sur jamais concertés au XIX° siècle et sont la règle propre de
l'employeur que tout travailleur accepte tacitement en signant son
contrat de travail. Ces règlements datant d'avant la Révolution
vont proliférer dans tout le XIX° siècle. Ils permettent
d'enchâsser ces règles de travail d'autant que cela repose sur
l'autonomie de la volonté et de la primauté du contrat.
Ils
sont donc très nombreux, règlementent tant le travail que
l'attitude dans le lieu de travail (pas parler, pas se distraire,
…). Il y a des amendes en cas d'individus contrevenant au
règlement pouvant aller jusqu'à l'exclusion de l'ouvrier. Mais
cela reste discuter puisque les règlements sont très nombreux dans
les fabriques. Par contre, leur application est limitée,
certains fabricants déclarant que ces règlements sont mis en place
dans l'atelier mais ne servent que peu, tandis que les ouvriers
préfèrent dire qu'ils sont contrôlés, soumis à un règlement et
à des amendes. On a donc une multiplication des conflits devant les
prud'hommes sur ces règlements.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire