samedi 31 mars 2012

Urbaine 26 - 03 (cours 6)

Précédemment : Urbaine 12 - 03





Partie 2 : Les inégalités sociales devant la réussite scolaire


On sait depuis longtemps que les élèves issus de milieux défavorisés ont plus de chances de connaître une situation d’échec dans leur parcours scolaires que les enfants d’autres milieux. En revanche, on sait aussi que les facteurs à la marge jouent un rôle dans la réussite scolaire. Or la ségrégation à l’école conduit à la fabrication d’établissements scolaires défavorisés dans les quartiers pauvres, ce sont alors des environnements favorables à l’échec scolaire. Ainsi sur deux élèves de classes identiques, celui qui sera en situation scolaire dans un établissement défavorisé aura moins de chances de réussite.



 Un collège de Montreuil menacé de ghettoïsation selon l'Express


La ségrégation à  l’école


I.                   Ségrégation scolaire : définition et illustrations

Comme toute ségrégation, celle qui est scolaire consiste en une mise à l’écart des élèves de milieux défavorisés, par rapport aux élèves de milieux plus favorisés. C’est donc une séparation des CSP parentales. Ce processus contribue à concentrer les élèves des milieux défavorisés dans les mêmes établissements scolaires.
Lorsqu‘on étudie la composition sociale des élèves de 6° dans les collèges publics, on a des statistiques du MEN différenciant les élèves d’origine sociale très favorisée et ceux d’origine sociale défavorisée. Pour les premiers, 16% des élèves du public sont dans cette catégorie. Si on regarde les  10 % des écoles les plus prestigieuses, il y a dorénavant 32,5 % d’élèves de cette classe. Dans les meilleurs collèges, on peut monter à 81 % d’élèves de classes très favorisées. Dans le cas contraire, dans les 10 % des moins bonnes écoles, on trouve en moyenne 3,5 % d’élèves très favorisés avec des perfects à 0 %.
Ainsi dans 10 % des établissements de France les moins prestigieux, plus de 70% des élèves accueillis sont issus de milieux défavorisés. Il y a aussi des cas extrêmes avec 100 % d’élèves défavorisés. On a alors le cas contraire puisque le premier décile ne comprend que 21,3 % d’enfants de classes défavorisées avec un minimum de collèges avec 0 % de ces élèves. A Aubervilliers qui reçoit 800 élèves, 73 % viennent de milieux défavorisés et 6 % de milieux très favorisés. En revanche à Saint Mandé dans un collège public de 134 élèves on a 7 % de milieux défavorisés et 84 % venus de famille très favorisées.

De manière générale, on considère que ce phénomène constitue un problème et un défi pour les pouvoirs politiques. D’abord le programme est en décalage avec les idéaux républicains et cela génère des écoles à plusieurs vitesses. La seconde raison, c’est que les élèves des établissements scolaires défavorisés ont plus de risques d’échec pour chaque enfant de ce milieu. Cela accroit donc les inégalités sociales.


II.                Mécanismes de la ségrégation scolaire

1.      Ségrégation scolaire : conséquence de la ségrégation résidentielle

La ségrégation est aussi une mise à l’écart des classes populaires mais par les catégories sociales les plus aisées dans les quartiers de résidence. On a en réponse, une concentration des classes dominées dans les quartiers les plus favorisés. C’est donc un processus qui fabrique des quartiers homogènes socialement.

La ségrégation scolaire était la conjonction de deux phénomènes : la ségrégation résidentielle et la carte scolaire. Cette dernière au départ outil de gestion des flux scolaires, son but est d’affecter chaque élève à un établissement scolaire précis. Autrefois à chaque carte scolaire on attribuait un périmètre de recrutement et tous les élèves qui habitaient dans ce périmètre étaient scolarisés dans le même établissement. Cela devait être obligatoire. Chaque établissement scolaire devait recruter les élèves domiciliés dans le quartier d’implantation. En conséquence, les établissements scolaires des quartiers pauvres recrutaient des élèves majoritairement issus de milieux défavorisés, et les établissements scolaires de quartiers riches accueillaient massivement des élèves issus de familles aisées.

A cela, il faut rajouter les pratiques d’évitement scolaires qui aggravent encore la ségrégation scolaire. Plusieurs aspects existent au constat de cette pratique. Ainsi dans les établissements scolaires de quartiers pauvres, on a un nombre d’élèves réellement accueillis qui est plus faible que le nombre d’élèves attendus. Autre aspect, on constate que le pourcentage des élèves de milieux défavorisés est alors supérieur à ce qui est attendu dans ces quartiers défavorisés. Par évitement scolaire, on sous-entend que les familles appartenant aux classes moyennes et supérieures qui résident dans des quartiers populaires trouvent une stratégie pour que leurs enfants n’aillent pas dans l’établissement scolaire de quartier, en inscrivant leurs enfants ailleurs.
Lorsqu’on interroge les parents sur ces choix scolaires, ceux qui répondent parlent souvent de leurs craintes vis-à-vis de certains problèmes (réels ou fantasmés) qu’ils associent aux établissements scolaires défavorisés. La première crainte est celle des résultats scolaires qui seraient moins bons pour leurs enfants, puisque les élèves de ces établissements étant faibles, ils supposent un effet de nivellement par le bas des performances. Une seconde crainte tient aux élèves à problèmes qui sont supposés plus nombreux dans ces établissements et qui sont des risques en termes de socialisation.

Quelles sont alors les techniques employées ? Trois moyens semblent exister. D’une part les demandes de dérogations qui permettent d’échapper à la carte scolaire. Les raisons prétendues sont la pratique de langues vivantes particulières et non disponibles partout, la proximité du domicile ou encore la proximité avec un frère ou une sœur scolarisé ailleurs. D’autre part, on trouve le recours à l’école privée qui est aussi un classique. Enfin, on trouve aussi la pratique des fausses domiciliations des enfants, où l’on donne un lieu de vie plus ou moins fictif pour être scolarisé dans un autre secteur. Les cas d’évitement sont donc nombreux et accentuent la ségrégation scolaire.

Ainsi dans le pourcentage des élèves qui demandent une dérogation à l’entrée en 6°, 15 % sont de Paris, 5 % en Seine Saint Denis avec 75 % pour un collège défavorisé de Bagnolet. Pour le pourcentage des dérogations suspectes qui semblent mettre en évidence une pratique d’évitement scolaire, on a 7 % à 8 % de ces demandes sur Paris.
Sur toute la France, on a un total de 21 % d’élèves en France métropolitaine qui sont dans un établissement privé, 35% à Paris, 12,5 % en Seine-Saint-Denis, 15 % dans le Val-de-Marne, 23 % dans les Hauts-de-Seine et 17 % dans les Yvelines.
On a donc une accentuation des stratégies de mises à l’écart des élèves en fonction de leurs milieux familiaux. En toute logique on trouve des concentrations d’élèves de même milieux familiaux.

2.      Le cercle vicieux des deux ségrégations

La ségrégation résidentielle est la cause de la ségrégation scolaire. Mais certains spécialistes soulignent que les rôles s’inversent avec des ségrégations scolaires qui produiraient des ségrégations résidentielles. Aujourd’hui, on sait que les parents sont de plus en plus soucieux vis-à-vis de la scolarité de leurs enfants. La réussite et l’échec scolaire déterminant de plus en plus le champ des possibles dans le futur et ce, passant par l’acquisition de diplômes, on a des stratégies parentales de minimisation des risques d’échec scolaire. Pour cela, on commence par bien choisir l’établissement scolaire avec au mieux des établissements prestigieux, au pire des établissements scolaires qui ne sont pas jugés défavorisés. Le meilleur moyen d’éviter un collège public défavorisé sera d’aller habiter dans le quartier d’un établissement scolaire meilleur. On se renseigne donc lors des déménagements des familles sur l’éventualité d’une recherche d’informations sur les établissements scolaires des quartiers. Cela nous donne un second indicateur avec le fait que les agences immobilières mettent en valeur cette information, ils vont même plus loin en en faisant un argument de vente. Tout cela finit par pénaliser les quartiers populaires et leurs établissements scolaires auprès des parents. On a donc une influence de la ségrégation scolaire sur la ségrégation résidentielle.

Maintenant est-ce réellement la pratique ? Avec une approche par la méthode des prix hédoniques. Si on juge vrai que les familles veulent se loger dans les quartiers avec de bons établissements scolaires, alors cela doit se voir dans le prix des logements. Avec l’établissement de statistiques, les chercheurs mesure donc l’impact de ce phénomène. Si c’est vérifié, plus un logement est plus proche d’un établissement scolaire de qualité, plus le prix du logement sera élevé. En revanche, dans le cas contraire, si le prix est indépendant de la proximité à l’établissement scolaire, alors cela s’avère faux.
Les résultats satistiques sont convergents, il semble que la qualité des établissements scolaires soit dans la logique de sélection d’un logement par le ménage. Inversement, cela montre une certaine répulsion des établissements scolaires médiocres. Ainsi plus les établissements scolaires d’un quartier sont jugés bons, plus le logement à proximité aura un prix élevé. Cela traduit une préférence, les gens débourseront plus pour vivre dans un quartier avec un bon niveau scolaire.

Ainsi dans le Val d’Oise, les chercheurs ont pris un échantillon d’offres de logements à vendre tout en mesurant la qualité des collèges publics des communes des logements avec le taux de redoublement des élèves en 5°. Les résultats montrent que la qualité des collèges publics influence les prix des logements.

La ségrégation scolaire fabrique donc aussi de la ségrégation résidentielle. Les établissements scolaires des quartiers pauvres réduisent l’attractivité de ces quartiers auprès des milieux familiaux et donc entrainent des pratiques de mobilités ségrégatives.


Parmi les politiques déségrégatives on en a eut plusieurs depuis les années 2000. En premier lieu, on a souhaité réformer la carte scolaire pour rendre les recrutements des établissements scolaires plus mixtes socialement. A cela, on ajoute davantage de contraintes aux contournements de la carte scolaire (chasse aux dérogations abusives, mieux répartir les options pédagogiques entre établissements scolaires, …). Mais une difficulté majeure fut rencontrée puisque les familles ont le choix de leur quartier de résidence et donc risquait de former une ségrégation résidentielle encore plus flagrante.
Cette option fut alors abandonnée puisque dans une optique de gauche, la droite arrivant au pouvoir, on a préféré abandonner la carte scolaire. Les plus optimistes y voient un effet déségrégatif et chacun pourra choisir son établissement scolaire librement. Les plus sceptiques soulignent que cela va aboutir à une sélection des élèves par les bons établissements scolaires et ceux qui seront maintenus à la porte à la porte seront les élèves venus de milieux défavorisés. De plus, les parents ne sont pas tous au courant des bons établissements scolaires et des stratégies possibles. Du coup, seules les familles favorisées devraient pouvoir suffisamment se renseigner et s’organiser. Enfin on se demande quels seront les effets sur la ségrégation résidentielle. De ce point de vue, les quartiers pauvres peuvent en bénéficier. En effet, cela rendrait les quartiers pauvres plus attractifs puisqu’on peut habiter des quartiers populaires sans pour autant qu’on scolarise les enfants dans ces secteurs.

Photo 26 - 03 (cours 12)

Précédemment : Photo 23 - 03


Auguste Sander, Les paysans se rendant au bal


Enfin la photographie documentaire c’est la volonté de rompre avec la photographie d’art. La photographie documentaire est une émanation de la photographie artistique, ces photographes veulent se situer par rapport à une démarche artistique. Depuis fin XIX° siècle, on a des photographies militaires, industrielles, … qui ne se sont jamais nommées photographies documentaires. Curieusement, les fondateurs de la photographie n’évoquent jamais de photographie documentaire alors même que l’image est une forme de double témoignage. Depuis le début du XX° siècle, le parti pris du rôle de témoignage de la photographie n’a cessé d’être réaffirmé comme Dziga Vertov qui souhaite « remettre la photographie à neuf ». Dans la photographie documentaire on a donc un projet constamment renouvelé et jamais véritablement abouti. Le photojournalisme de son coté a des codes qui furent figés dès le début et pendant des décennies (instantané, …). Ce n’est pas le cas de la photographie journalisme





I.                   L’utopie encyclopédiste

Assez vite, la photo est perçue comme un véhicule pour l’éducation et la connaissance. Cette idée est consubstantielle au projet photographique initial. Ainsi en 1894, Léon Vidal fonde le musée des photographies documentaires, forme de banque d’images qui veut accueillir tout type de photographies. Il parvient à réunir 40 000 images et son projet va faire des émules à Genève, Marseille ou encore Varsovie. En 1906, Vidal est l’un des initiateurs avec Paul Otlet, du premier conseil international photographique, tenu à Marseille. C’est la volonté de fonder un réseau mondial d’échanges inspiré du modèle des bibliothèques. On discute de points précis et on réfléchit à la nature documentaire de la photographie. Otlet de son coté va réfléchir à un système mondial d’échange photographique qu’il va nommer le mundameun, forme de bibliothèque d’Alexandrie avec des documents sonores, visuels, filmographiques, … Il met sur pied un espace pour la photographie qui sera riche de 150 000 clichés dans les années 1930. On est dans un savoir cumulatif propre à la lignée de la fin du XIX° siècle.

Albert Kahn, grand industriel, se tourne vers l’image en 1909 et développe un projet utopiste d’inventorisation du globe à travers la photographie et le cinéma. Ce personnage pacifiste avait déjà fourni des bourses étudiantes pour travailler à l’international. Il a ensuite créé des opérateurs qu’il a propagé à travers le monde pour inventorier les lieux et les gens. Il cumule alors une gigantesque collection essentiellement des autochromes (70 000), mais aussi des films. Le tout est organisé avec l’aide de Jean Bruhnes. C’est une entreprise de rassemblement de clichés avec une dimension pédagogique puisqu’on veut projeter les plaques d’autochromes aux gens. Aujourd’hui les grandes bandes d’images numériques vont reprendre ces projets encyclopédistes, eux-mêmes inscrits dans des projets plus anciens.


II.                La ferveur patrimoniale

La photographie fut d’emblée conçue aussi comme un outil de préservation du patrimoine. En effet, le développement du médium photographique rencontre vite le développement du patrimoine et celui de la protection des sites patrimoniaux. Cela va aussi de paire avec l’essor des musées qui fut multiplié par deux. Toute une série d’initiatives placent la préoccupation patrimoniale au centre des intérêts des élites. Ainsi on voit apparaître la Commission municipale du Vieux Paris qui juge important tout ce qui est ancien et préserve des informations sur le Vieux Paris. Cela est du à la réaction face aux travaux d’Haussman.

Cette optique permet un essor des photographes. La photographie entretient d’une part un désir de conservation (albums photographiques, collections de cartes postales, …) en sensibilisant les gens au patrimoine et d’autre part, la photographie accélère la destruction puisqu’en documentant les bâtiments menacés, elle leur assure une pérennité rendant possible la destruction puisqu’on a toujours une trace visuelle.

Ce mouvement n’est pas seulement français, Anne-marie Teiss souligne comment les Etats nations ont inventé la notion de patrimoine. Ainsi en Angleterre apparaît fin XIX° siècle la National Photographic Record Association, créée par un parlementaire anglais doublé d’une qualification de photographe : Benjamin Stone. Il veut fédérer les amateurs britanniques dans un vaste inventaire des sites et monuments anglais. Stone lui-même prendra en photo les vieux corps de métier menacés. On a ce double phénomène de préservation et de destruction du patrimoine.

Edward S. Curtis passera une longue époque de sa vie à prendre en photo les Natives Americans. Il produira plus de 40 000 images qu’il mettra dans un projet The North American Indian, description sur le ton de l’élégie (évoquer un moment perdu mais idéalisé) de la vie de ces Indiens. Il montre alors un Etat largement disparu, des Indiens en tenue traditionnelle, en vêtements d’apparats alors qu’à l’époque, les Indiens sont déjà très européanisés. Son objectif est par son travail d’éveiller la conscience de la perte chez son public (The Vanishing race). Mais même à son corps défendant, le photographe est un agent de ce qu’il combat. Curtis fut financé par des grands industriels qui sont responsables de la modernisation du pays et de la relégation des Indiens.

Eugène Atget, en France, a beaucoup documenté la vie parisienne au début du XX° siècle. Il est l’un des pères de la photographie documentaire. Très peu connu du public, il s’est lancé dans un vaste projet dès 1890 pour engranger et diffuser les images du vieux Paris. Ces photographies vont documenter des cours d’immeubles, des devantures de magasins, des portes, … Produites dans un relatif anonymat, c’est dans le milieu des années 1920 que Man Ray redécouvre ces images. Atget est publié par les surréalistes et son projet sera porté aux nues. Dans la foulée, ses photographies sont achetées par Bérénice Abbott et les photographies connaissent une seconde vie outre-atlantique. Le pays en fera un des pères fondateurs de la photographie documentaire.
Bérénice Abbott se donne pour mission de prolonger l’entreprise d’Eugène Atget mais aux USA. Elle est photographe et va s’intéresser à New-York, pour en faire un portrait de ville en mutation, Changing New-York, vaste projet financé par l’Etat fédéral. C’est accompagnées d’une équipe de chercheurs que les photographies sont publiées avec des archivistes, … Abbot revendique son travail comme œuvre d’art. La différence c’est qu’il ne s’agit plus de fixer un moment qui disparaît mais bien de donner à voir le changement lui-même, la transition et l’actuel.

Enfin, Auguste Sander qui travaille dans la région de Cologne en Allemagne. Il acquiert sa notoriété en 1929, à 54 ans durant lesquels il publie Antlitz der Zeit (Visages de l’époque). Il souhaite utiliser la photographie pour faire le portrait des Allemands de son époque. Ce projet le préoccupe énormément et il parcourt la région de Cologne, notamment Westerwald et prend en photo des paysans puis des urbains. Il aura plus de 20 000 plaques dans son projet à visés à la fois encyclopédique et sociologique. Il veut prendre acte des mutations de l’Allemagne des années 1920 et de rendre compte de ses contemporains. Toutes les classes sociales et professionnelles entrent dans l’objectif d’Auguste Sander.
On a à faire à une véritable mise en scène de soi devant l’objectif de Sander, on a presque le sentiment que les sujets singent les comportements de la ville. On a donc une photographie qui est                co-construite. C’est une photographie qui est aussi directe et frontale : la straight photography. On a aussi une photographie nature sans effets autour. La photographie est normée, naturelle, en pied, cadrage large et frontalité. Il semble presque que ce qui structure ces personnages vient de leur stature et de leurs habits. Ces photos répondent à des mises en scène scrupuleuses, on prend rendez-vous, on discute du lieu, de la tenue, … Quand tout est calé, Sander ne prend qu’une seule vue. Cette discussion doit donner à voir une véritable pose représentative d’eux-mêmes.

jeudi 29 mars 2012

CM n°7 géographie sociale

3- Contradictions et limites de la politique du logement social en France

v Est-ce qu’il s’agit de loger les plus pauvres ou est-ce qu’il s’agit d’assurer la mixité sociale ?

La politique du logement social se trouve toujours divisée entre ces deux impératifs.

La loi Besson et la loi Dalot concerne le logement des plus pauvres. Pour assurer la mixité sociale, le gouvernement a mis en place le PLS (prêt locatif social).

Les ménages populaires, les plus modestes sont majoritairement logés dans le locatif privé de mauvaises qualités. Il n’y a pas assez de logements sociaux pour eux.

A côté de cela il y a tout une politique d’hébergement d’urgence. Ces formes d’hébergements constituent aussi un encadrement social. Un contrôle mais aussi un accompagnement social, car il y a un préjugé qui dit que certaines personnes ne sont pas capables d’occuper un logement social. Les travailleurs sociaux écrivent ensuite un rapport pour dire si les individus sont aptes à accéder un logement social. Cela pose un problème en termes d’autonomie.

Mais aujourd’hui, la politique sociale a pour objectif la mixité. On commence à détruire les logements sociaux, soit physiquement soit en privatisant. Il y a donc des logements sociaux en moins. Cet objectif de mixité, c’est-à-dire, faire venir des classes moyennes dans le parc social, conduit presque à démolir les logements sociaux.

(Fin du cours et nouveau chapitre)

Séance 7 :

Les espaces des classes moyennes

Introduction :

Les politiques de logements n’ont pas transformés les beaux quartiers mais les quartiers populaires.

Les thèses sur la moyennisation de la société se développent dans les années 70.

L’approche classique pour entreprendre une définition des classes moyennes est celle par la stratification sociale. C’est-à-dire, que dans notre société, il y a les plus pauvres, les plus riches placés sur une échelle de revenus et au milieu, il y a les classes moyennes.

I- Qui sont les classes moyennes ?

1- La recomposition des classes sociales à l’échelle mondiale

Aujourd’hui on a tendance à dire qu’il n’y a plus de classes ouvrières et donc plus de lutte des classes. Mais les ouvriers en France c’est encore en 2008, 22% des actifs. C’est plus que les cadres qui représentent que 13% de la population. Quant à la bourgeoisie, elle est toute petite certes mais elle s’enrichie de plus en plus.

Aujourd’hui, la bourgeoisie domine à l’échelle nationale mais aussi internationale.

Le nombre des ouvriers s’accroit au niveau mondial notamment dans les pays émergents. La lutte des classes s’est donc reconstituée spatialement. Et à ce prolétariat industriel, il faut ajouter toute la paysannerie pauvre.

La bourgeoisie est de plus en plus riche car elle arrive à mettre sous sa coupe de plus en plus de gens. La dynamique d’exploitation est toujours aussi vraie et violente mais elle se joue à une échelle différente. Il y a donc un jeu d’échelle.

On est passé de la ségrégation associée, à la ségrégation dissociée. C’est-à-dire qu’il y a toujours des bourgeois et des prolétaires mais qu’ils vivent de plus en plus éloignés. Cf : Thèse de F.Damette.

Mais en fait c’est un peu plus compliqué que cela car il y a une imbrication des deux échelles (nationales et internationales). Dans tous les pays émergents, il a y a aussi une bourgeoisie nationale elle-même dominée par la bourgeoisie internationale.

Les classes moyennes dans les pays émergents sont composées de salariés qualifiés qui ont un salaire et un pouvoir d’achat comparables à ceux des pays occidentaux. Cela représente 10 à 15% de la population dans les pays émergents. Mais les classes moyennes se développent majoritairement dans les pays capitalistes avancés.

2- Les classes moyennes dans les pays capitalistes avancés

Historiquement, dans l’ancien régime, la classe moyenne est la bourgeoisie. Elle se situe entre le tiers-état et la noblesse. Ce sont donc des individus qui ont un pouvoir économique mais aucun pouvoir politique.

La révolution française a permis de donner un vrai pouvoir politique à la bourgeoisie.

Au 19ème siècle, la bourgeoisie est devenue dominante. La classe moyenne c’est la petite bourgeoisie traditionnelle, indépendante et aussi la « bourgeoisie de talent » : les professions libérales et intellectuelles.

Dans l’entre-deux guerres, les classes moyennes se structurent politiquement. Elle est composée de:

- La bourgeoisie traditionnelle

- Les professions libérales

- Les cadres

C’est dans l’entre-deux guerres qu’émergent la notion de classe moyenne. Ce mouvement a été favorisé par la grande bourgeoisie car cela lui permet d’avoir un contrepoids à la classe ouvrière qui s’organise et se renforce dans le contexte du front populaire.

Aujourd’hui on peut appeler la classe moyenne, la petite bourgeoisie intellectuelle (au niveau de diplôme, ils ont tous fait des études) < Garnier.

Cependant, en termes de rémunération, c’est assez inégale. Ce qui distingue la classe moyenne, c’est plutôt son capital culturel. Elle a une position intermédiaire dans les rapports de classes. Elle a un rôle d’intermédiaire.

Ex : le contremaitre qui a une position d’encadrement. Ils aident à faciliter l’extraction de la plus-value et par ce travail il obtient une rémunération supérieure à celle des ouvriers.

La classe moyenne a aussi une fonction d’inculcation idéologique. C’est le rôle de toutes les professions de l’enseignement, de la santé et du social. C’est-à-dire, toutes les professions qui encadrent les plus pauvres ou qui véhiculent une idéologie. Elles diffusent la « bonne parole ». Mais c’est aussi la classe moyenne qui disqualifie les actions sociales réalisées par la classe ouvrière, qui trouve embêtant les revendications véhiculées par les grèves notamment. Comme par exemple, la grève des cheminots qui bloquent selon elle, la circulation des transports en commun et qui gêne les usagers.

La classe populaire en France est composée des ouvriers et des employés. Ce qui représente 47.3% des ménages. C’est-à-dire, 47.3 % des ménages dont la personne de référence est employé ou ouvrier, que cette personne soit un actif ou un retraité.

La classe moyenne quant à elle, représente 47.6% des ménages (c’est donc, très légèrement plus). Dans ce chiffre, on prend en compte la petite bourgeoisie traditionnelle qui représente en fait, 11.5% de la population de la classe moyenne et la petite bourgeoisie intellectuelle qui elle, représente 36.1% de la population.

Ces pourcentages révèlent alors, contrairement à ce que l’on pense généralement, on n’est pas dans une société moyennisée.

v Ou habite la classe moyenne ?

La petite bourgeoisie est plutôt mélangée avec d’autres classes. Il y a un éparpillement dans l’espace, de cette classe. C’est une classe qui est encore plus diffuse dans l’espace. Cela traduit son origine hétérogène.

Progressivement, depuis les années 70, on commence à observer un espace de résidence spécifique aux classes moyennes. Mais la modalité principale des classes moyennes aujourd’hui, reste un certain mélange.

L’accession à la propriété par les classes moyennes s’effectue par un déplacement vers la périphérie et donc en s’éloignant du centre-ville. L’accès à la propriété est aussi considéré comme une ascension sociale.

Aujourd’hui cet accès est aussi un risque : le risque de surendettement et de déclassement.

Les stratégies résidentielles sont aussi le moyen de conjurer le risque de déclassement en choisissant une «bonne » école pour ses enfants par exemple.

II- Classes moyennes et espaces périurbains

Le lotissement périurbain est l’archétype de l’espace des classes moyennes. Des maisons individuelles avec jardin, des équipements sportifs, des faibles densités tout en étant loin des nuisances du centre-ville. Cela démontre aussi l’entre-soi des classes moyennes.

1- Les facteurs de la périurbanisation

Périurbanisation : Urbanisation diffuse, au-delà des limites de l’agglomération, qui elle se compose d’un espace bâtit continue, soit le centre et la banlieue. Cette périurbanisation repose sur l’automobile.

v Pourquoi il y a de la périurbanisation ?

Ce sont des choix contraints que de vivre en périphérie.

- Logique économique : les prix des logements sont beaucoup plus chers dans le centre-ville qu’en périphérie

- Rôle fondamental des politiques de logement : depuis 1977 est diffusée une politique d’incitation à l’accession à la propriété. Ces aides d’accession à la propriété nécessite que l’on aille chercher très loin des terrains pour construire à des coûts moins élevés.

- La standardisation de l’habitat individuel.

- Politique d’aménagement (locale ou nationale) qui permet de réduire les distances- temps.

Avec cette périurbanisation, il y a des problèmes de densité trop faible. On soulève aussi celui de la rééducation des surfaces agricoles ainsi que des problèmes de pollutions et de standardisation des paysages urbains.

L’urbanisation périurbaine est très inspirée de l’idéologie anti-urbaine (américaine notamment) mais l’on constate que les franges périurbaines ont tendance à être englobées au cours du temps, dans la banlieue.

2- Mode de vie et espaces périurbains

On constate dans notre société une tendance médiatique à la caricature des types d’espaces, avec le centre qui est bourgeois, la banlieue populaire et le périurbain : moyen. Mais en fait il y a toute une mosaïque sociale.

On parle même de fractions de classe des classes moyennes. Néanmoins, malgré cette multiplicité de strates dans la classe moyenne elle-même, on est toujours dans un phénomène d’entre-soi avec une logique de niche économique. Cela se voit dans le type d’habitat par exemple. Cette logique d’entre-soi n’est pas forcement consciemment voulue mais les contraintes notamment économiques expliquent que l’on retrouve les mêmes personnes dans un même endroit. En bref, il y a une multitude de lotissements pour les classes moyennes mais chaque lotissement se distingue d’un autre par sa composition sociale.

Pour les classes moyennes, il y a des logiques de localisation en auréole concentrique et aussi des logiques d’axes. Mais ce qui est important c’est le calquage de l’organisation de l’espace parisien du centre, dans la périphérie. Avec l’est plutôt moyen et l’ouest beaucoup plus riche (cela s’observe notamment dans la périphérie d’Ile de France).

v Quels sont les traits communs de ces espaces périurbains ?

- Ce sont des pavillons choisis par le fait d’une possibilité de maitrise de la distance avec l’autre. Pas seulement avec l’extérieur (avec ces voisins) mais aussi à l’intérieur de la famille (plusieurs chambres). Cela est bien différent de l’interconnaissance, la proximité populaire.

- Choix très net de la tranquillité : la verdure et le calme mais plus fondamentalement le choix de tranquillité sociale. On évite ainsi les « mauvaises » rencontres. On est dans le choix d’une certaine protection contre le déclassement. L’accession à la propriété s’est aussi, dans de nombreux cas, s’éloigner des classes populaires et donc mettre en évidence son ascension sociale.

- Le choix de la sécurité : être loin de la délinquance mais surtout la sécurité aussi au sens social. C’est-à-dire, d’être éloigné, des « mauvaises » fréquentations.

En bref, c’est surtout l’assurance d’un certain tri social. Cf : citation d’Eric Charme.

« Le prix d’un logement représente d’abord le prix d’un voisinage »

Eric Charme parle de dynamique de clubbisation.

Ce mode de vie périurbain est structuré par la mobilité, sorte de condition d’existence qui lui est intrinsèquement lié. C’est une mobilité complexe dont les axes de circulation passent de moins en moins par la ville centre. C’est un fonctionnement en étoile propre à chaque ménage selon les lieux de travail, de courses ou d’activité. Cette mobilité est aussi une contrainte, pour les jeunes qui n’ont pas de voitures, pour les mères. Ce sont souvent les femmes qui veulent quitter le périurbain pour le centre-ville.

On observe depuis les années 90, un certain tassement des distances parcourues. On crée des services et de commerces pour que les gens puissent aller moins loin.

On observe un changement dans la composition sociale du périurbain. Aujourd’hui, il y a de plus en plus des classes populaires, plus fragiles, qui arrivent dans le périurbains. Pour eux, c’est un peu une sorte de coup de poker, un risque énorme d’ascension sociale avec l’accès à la propriété. On observe dans les franges du périurbains des crispations politiques avec notamment l’émergence des votes FN et donc d’enfermement et de replis sur soi.

Les préoccupations majeurs pour les politiques en ce qui concerne le périurbain, sont le développement durable avec l’économie d’espace. Mais aussi, le fait de préserver les terres agricoles tout en densifiant l’espace. Et faire du logement social. Cela crée des tensions entre les préoccupations des collectivités locales et celle des habitants.

III- Les transformations des banlieues moyennes

Dans ces banlieues moyennes, la modalité principale est toujours le mélange relatif avec d’autres classes sociales. Mais l’on observe une tendance à la recherche de l’entre soi en allant plus loin notamment. Ce mélange se caractérise par des populations qui sont sur le départ et d’autres qui vont rester là.

1- Un quartier pavillonnaire : Les Peupliers à Gonesse (95)

Cf : La France des petits moyens

Lotissements pavillonnaires en banlieue mais plus humbles que ceux des quartiers périurbains. Ce lotissement se compose de maisons mitoyennes.

C’est de l’ancien périurbain, celui des cités jardins ou « pavillons en bandes ».

Dans les années 60, c’est un territoire d’ascension sociale pour les « petits » moyens comme les employés mais aussi des cadres moyens, des individus d’origine populaire. Ils achètent des petites maisons mais cela représente une façon de fuir les quartiers populaires.

Les individus qui sont encore là aujourd’hui parlent des années 70 comme de la « belle époque » avec une très grande sociabilité populaire. Ils ont l’impression d’être des pionniers de ce type d’habitat. Toute la bande des pavillons est géré en copropriété.

Progressivement, ceux qui pouvaient aller encore plus loin (les « petits » moyens les plus aisés) sont partis. Ceux qui restent, sont les moins aisés qui n’ont pas les moyens d’aller ailleurs que là. Cela casse aussi le côté collectif, dans un contexte de crise. Parallèlement, dans la ville de Gonesse on observe des phénomènes de densification et dans les Peupliers, il y a un phénomène de vieillissement. Ceux qui remplacent les familles parties, sont des familles d’immigrés turques qui sont elles-mêmes en parcours d’ascension sociale. C’est donc des populations très différentes de celles plus « vieilles » qui demeurent ici.

On observe donc dans ce quartier un principe d’invasion-succession classique.

Cela crée une hétérogénéité des modes de vie. De plus les populations vieillissantes ont l’impression de ne plus être en ascension sociale par le côtoiement des populations immigrées. Ils ont un sentiment de déclassement car ils ont l’impression d’être dans une cité par le côtoiement des immigrés en ascension. On observe un vote à droite et notamment d’extrême droite.

Mais ces populations d’immigrés ont aussi une volonté de fuir les grands ensembles et la « mauvaise » population d’immigrée qui y est présente.

En bref, la préoccupation sécuritaire se retrouve de part et d’autres.

Il y a donc une complexité des recompositions sociales. Mais aussi la paupérisation des classes moyennes et le risque d’implosion sociale de celle-ci.

Ex : possibilité d’émeute et importance du vote FN.

CM n°6 Géographie sociale

Merci Christelle pour cette prise de note ;-)

(Fin du cours précédent)

2) Les logiques de solidarité

Les conditions de logement sont en général mauvaises. L’espace public du quartier devient le prolongement du logement. La sociabilité est un des aspects de la solidarité. Historiquement, ce sont les habitudes de vie des ruraux qui se transposent à la vie urbaine. La sociabilité est fondée sur l’interconnaissance et sur l’entraide. Cette solidarité est le capital social des dominés. Ce type de mode de vie est aussi une des bases de l’émergence d’une conscience de quartier. C’est plus particulièrement vrai à Paris. Les mouvements révolutionnaires du XIXème siècle se fondent non seulement sur la solidarité et l’entraide mais aussi par les mauvaises conditions de logement. L’amélioration des conditions de logements est nécessaire pour casser ces mouvements révolutionnaires. Une certaine culture populaire urbaine naît comme la fréquentation des cafés, la promenade en ville, la fréquentation des bals, la fréquentation des grandes fêtes. Ce sont vraiment des territoires d’intégration pour les nouveaux venus et aussi des territoires d’émergence de classe. La construction des grands ensembles en banlieue à créer un nouveau contexte urbain pour les classes populaires. Les distinctions entre français et immigrés sont plus forts. Les immigrés les plus récents ne peuvent pas accéder au logement social au moment de leur construction. Progressivement, les blancs sont partis en périphérie et des populations récemment immigrées accèdent aux grands ensembles. Les classes populaires sont hétérogènes. Elles sont différentes au niveau social, au niveau de leurs origines mais aussi au niveau des conditions de logements.

Les politiques de logement en France et en Europe

Les politiques de logements permettent la création d’espaces et l’accession à la propriété. Au moment des logements industriels, on assiste à la différenciation entre le lieu de travail et le lieu de vie. C’est aussi le moment où le logement devient un capital. Le logement devient donc une marchandise mais pourtant elle n’arrive jamais à l’être totalement car il y a certaines limites à cette transformation. C’est une marchandise dans le sens où le logement répond à la loi de l’offre et de la demande. Seulement, il y a un problème de solvabilité du logement c'est-à-dire que tous ne peuvent pas se le payer, ensuite la disponibilité du sol urbain, autrement dit le logement qui est implanté dans un lieu mais la surface n’est pas infinie, enfin la durée de rotation du capital, il faut du temps entre le moment de l’investissement et le moment de rentabilité, cela suppose donc d’immobiliser du capital pendant longtemps. On assiste à une insuffisance chronique du logement. Elle existe depuis la ville industrielle. Ce n’est pas tant en nombre de logements mais en nombre de logements abordables. On peut remettre en cause l’idée de crise du logement car cette « crise » est nécessaire et structurelle dans une société de classe fondée sur la propriété privée. Une partie de la population ne peut pas se loger aux conditions du marché donc l’Etat pourvoie au logement des personnes qui ne le peuvent pas.

I. Cadrage : le logement social en Europe aujourd’hui

1) Une typologie européenne du logement social

Dans l’Union Européenne à 27, en 2005, il y avait 22,5 millions de logements sociaux soient environ 10,5% des résidences principales. Plusieurs pays n’ont pas ou peu de logements sociaux comme les pays méditerranéen comme la Grèce, l’Espagne et le Portugal et les nouveaux pays récemment entrés dans l’Union Européenne, ex-pays de l’est. L’autre groupe est composé de pays où les logements sociaux représentent entre 5 et 10% de l’offre. L’Allemagne, la Belgique, l’Italie ou la Bulgarie ont une offre résiduelle. Le dernier groupe représente les pays qui représentent plus de 12% de l’offre, soient 77% des logements sociaux de l’Union Européenne comme la France, la Finlande, l’Autriche, la Pologne…Au Pays-Bas 34% des résidences principales sont des logements sociaux. Au Royaume Uni, il y a 5 millions de logements sociaux soient 18% du total.

2) Principales caractéristiques du logement social en Europe

Ce sont des parcs locatifs à loyer contrôlés donc détenus par les pouvoirs publics ou des organismes qui n’ont pas de but lucratif. En Allemagne par exemple, les logements sont pendant un temps conventionnés en logements sociaux puis passent au statut de logement privé. Certains logements sociaux ne sont accessibles que par des personnes qui ne gagnent pas plus qu’un certain plafond. Certains pays n’ont pas de plafond, c’est un modèle universaliste, comme aux Pays-Bas. D’autres ont un plafond assez élevé, c’est un système généraliste, comme par exemple la France qui pourrait loger les ¾ de sa population dans ce genre de logement. Le dernier groupe est basé sur un système restrictif avec un plafond bas. Les logements sont destinés aux salariés pauvres. Les logements sociaux servent souvent de logements des fonctionnaires publics. Les publics les plus précaires du logement social sont des sans-abris, des anciens toxicomanes, … Une partie de la population avec un niveau social ni pauvre ni élevé peut accéder à des logements sociaux. Les publics les plus vulnérables sont majoritairement logés dans le parc locatif privé. Les ménages sont en général des jeunes ou des personnes âgées, des familles, des personnes qui gagnent des revenus inférieurs au revenu médian, des immigrés. Ces derniers occupent toujours les pires logements sociaux. Le logement social n’est pas seul. Il y a la question de ce qu’on va en faire. En France le parc social est important et à l’intérieur 23% des logements sont de type locatif privé. Au Royaume-Uni, il y a un important parc social et beaucoup de propriétés. Dans les pays nordiques, le parc social est important et le parc locatif privé a des loyers contrôlés.

3) Tendances actuelles

La doctrine de l’Union Européenne est néolibérale. Donc, les logements sociaux empêchent la concurrence. La volonté est à la transformation de tous les logements sociaux dans le secteur privé. On observe une sorte de transition en cours. De nombreux logements sociaux sont vétustes et dégradés. Au Royaume-Uni, depuis 1979, ils ont perdu 1,3 millions de logements sociaux par la privatisation. Dans les ex-pays de l’est, la transition néolibérale est très brutale dans le sens où tout le parc de logements sociaux est transformé par des logements privés.

II. Petit historique du logement social en France

1) Une mise en place très lente et tardive (fin XIXème-début XXème)

C’est l’époque de la ville industrielle. Mais la Révolution Française a sacralisé la propriété privée. Il y a trois grandes inspirations de la politique du logement social :

* Hygiénisme : c’est la première fois que la politique publique intervient

* Le catholicisme social : pour un souci de moralisation de la classe ouvrière. L’inspiration est assez paternaliste.

* Le socialisme : revendication du mouvement ouvrier.

Il a fallu plus d’un demi-siècle entre les lois et leur réelle application. En 1928, la loi Loucheur est suivie d’une vraie application. C’est un programme de construction de logements sociaux, les HBM (Habitat Bon Marché). Cette politique était tournée vers l’accès à la propriété. Mais ce programme a été inachevé en partie à cause de la crise.

2) Un important investissement public après guerre : les grands ensembles (1953-1973)

Après la Seconde Guerre Mondiale, une grave crise du logement explose. Les destructions, la suspension des constructions, le Baby-Boom, le rapatriement des pieds-noirs d’Algérie font exploser la demande de logement. L’Etat doit prendre en charge le logement. Les grands ensembles sont construits grâce à de nouvelles techniques et de nouveaux matériaux qui permettent de construisent plus vite et moins cher. De plus, c’est le moment d’une nouvelle conception urbanistique inspirée de Le Corbusier énoncée par la Charte d’Athènes en 1949. Les HLM sont crées en 1949. Le premier plan de construction de grand ensemble est le plan Courant en 1953. Cette vague est amplifiée par les ZUP (les Zones à Urbaniser en Priorité) en 1957. A partir de 1956, on construit à peu près 300 000 logements sociaux par an en moyenne. En 1973, plus de 550 000 logements sociaux sont construits. C’est une réussite quantitative et politique mais ce projet des grands ensembles a été dès le début critiqué notamment au niveau de l’interventionnisme de l’Etat et de la qualité du logement.

3) La réforme Barre de 1977 et le déclin de la production de logements sociaux

En 1973, de nombreuses critiques et le choc pétrolier conduisent à interdire la construction de plus de 500 logements d’un seul tenant. En 1973, le ministre de l’équipement et du logement, Guichard émet une circulaire d’interdiction. Son successeur Chalendon relance un programme de construction de maisons individuelles. Cela perme un certain désengagement de l’Etat. Cela aide le marché du logement et le marché bancaire. En 1977, la réforme Barre est une réforme d’aide au logement. On prépare le passage de l’aide à la pierre à l’aide à la personne. L’aide à la pierre c’est l’aide à a construction de logements. On promeut alors l’aide à la personne du type APL ou PAP (Prêt à l’Accès à la Propriété). On n’intervient pas sur l’offre de logement mais on aide le locataire. Les plafonds d’accession au logement social ont été ouverts. Cette réforme a permis un certain désengagement financier de l’Etat. Entre 1978 et 2003, 50 000 logements sociaux sont crées.

III. Les politiques de logement aujourd’hui en France

1) La régulation du marché locatif privé

Avant 1948, les loyers étaient bloqués en France. Pour éviter des révoltes, on a bloqué les loyers après la guerre pour éviter une trop brutale augmentation. Une loi permettait une augmentation des loyers mais de façon encadrée. Cette loi ne concerne que les loyers déjà construits. Dans les années 1980, il a été question de mettre fin à la dichotomie entre le logement ancien et le logement neuf. Cela a été un enjeu droite/gauche. De multiples lois ont été promulguées jusqu’à un compromis, la loi Mermaz-Malandain.

2) L’insuffisante relance de la production de logements sociaux dans les années 2000

Depuis 1990, les lois concernant le logement social :

* En 1990, la loi Besson inscrit « le droit au logement » dans la loi. Cette loi est ciblée vers les plus précaires.

* En 1991, (LOV) Loi d’Orientation pour la Ville promulgue le « droit à la ville ». Les habitants ont le droit à des conditions de vie et d’habitat mixtes.

* En 2000, la SRU ou loi de Solidarité et Renouvellement Urbain prévoit que 20% des logements de la ville soient des logements sociaux. Si les villes étaient récalcitrantes des pénalités financières étaient prévues. La question du logement pour les classes moyennes se pose. En 1987, la droite crée une sorte de logement aidé mais destiné aux classes moyennes, le PLI. Mais celui-ci n’est plus considéré comme un logement social. Donc, on crée le PLS qui est une sorte de logement pour les petites classes moyennes.

* En 2006, une loi sur l’engagement national pour le logement est votée. Si on favorise l’accès à la propriété des personnes populaires, cela induit une extension de l’espace urbain.

* En 2007, une loi instituant le droit au logement opposable permet de faire un procès à l’Etat pour le droit au logement.

La production reste insuffisante en quantité par rapport à la demande. Elle est aussi insuffisante en termes de cible.