lundi 5 mars 2012

Médiévale 23 - 02 (cours 3)

Précédemment : Médiévale 16 - 02



Pont couvert de Pavie, capitale lombarde



1.      Une nouvelle politique européenne

Les Francs montent une expédition assez offensive obtenant du roi des Lombards la promesse qu’il laissera en paix les territoires romains. Mais sitôt les Francs partis, le roi des Lombards recommence la conquête des terres du pape. En 756, les Francs partent à la conquête des places prises par les Lombards et Pépin comprend qu’il doit laisser sur place des garnisons. C’est Fulrad qui va recueillir les clés de 22 cités de Lombardie avant de les donner officiellement au pape avec un acte de donation de Pépin. Ce dernier considère qu’il a conquis les villes par acte militaire. C’est donc la base du patrimoine de Saint Pierre à l’origine des Etats pontificaux.

Pépin veut surtout conquérir la Septimanie déjà entamé par Charles Martel. Celle-ci est gardée par des Musulmans. Pépin organisa parallèlement en chaque année une campagne en Aquitaine. En 768, cette politique s’arrête car Waïfre, le duc d’Aquitaine est assassiné par les soldats francs. Il semble de plus, que cela provoqua un climat de terreur en Aquitaine. L’Aquitaine intègre alors le royaume franc. Pépin installe des bases franques partout dans la région mais il leur promet la conservation de leurs structures sociales, de leurs lois et de leurs coutumes.

En Bavière vient un autre problème. Tassilon, fils d’Odilon, est le neveu de Pépin suite au rapt de la sœur de Pépin. En échange d’un serment de fidélité, Pépin laisse la charge de la Bavière à son neveu qu’il nomme duc. Mais celui-ci marque très rapidement une politique indépendante en épousant la fille du roi des Lombards, nommée Liutberge. Il réunit aussi les évêques de ses territoires, agissant comme un prince avec une autorité sur les églises. Cette volonté d’indépendance est visible sur le pied du calice de mariage du couple ducal. Cela forge déjà une concurrence entre le neveu et son oncle.

Pépin tente aussi de poursuivre la réforme de l’Eglise. Il s’appuie toujours sur les vieilles familles austrasiennes, en particulier Chrodegang, évêque de Metz, qui devient le représentant du pape Etienne II dans cette réforme. Il cherche avant tout à rétablir la discipline ecclésiastique avec la fin du cumul des charges (un seul évêque par diocèse). Pour régler le problème des terres de l’Eglise, Chrodegang propose le versement d’un impôt spécial de compensation : la dîme. C’est le dixième de tous les revenus des familles qui est prélevé au profit des églises. Pépin donne son accord en 756 et on estime que c’est le point de départ.
Enfin il impulse aussi la réforme de liturgie sur le modèle romain. Chaque ensemble régional disait la messe à sa manière, surtout entre le Nord et le Sud. On cherche donc à unifier le modèle en s’inspirant de celui du pape. Chrodegang demande au pape d’envoyer des manuscrits et des initiateurs de chants pour chanter romain. Tout cela arrive à Metz et la ville devient le centre de la réforme liturgique du royaume. Cela va bien se propager dans la région du Nord, moins dans celle du Sud. Cette réforme permet de mettre en place une nouvelle Eglise franque. Elle est directement liée à Rome, ce qui n’était pas le cas jusqu’alors, l’Eglise se construisant sous le couvert du pape. De plus l’Eglise est le premier facteur d’unité. Enfin elle est au service du roi et celui-ci peut se servir de ses travailleurs comme ses administrateurs. Cela devient donc vite une base du royaume carolingien.



Charlemagne empereur avec déjà quelques regalia dont Joyeuse



Charlemagne, du royaume des Francs à l’empire carolingien (768 – 814)


Fils de Pépin et frère de Carloman, avec qui il s’entend très mal. On a donc une première période suivie d’une seconde avant son couronnement en tant qu’empereur.


I.                   La construction de l’Empire

1.      Un empire fondé sur des conquêtes militaires

Au début de son règne Charlemagne est confronté à son frère Carloman. Leur mère arbitre plutôt en faveur de Carloman. Mais son frère meurt en 771 et Charlemagne met la main sur ses territoires au détriment de ses neveux qui effrayés par le risque d’être tués filent se réfugier chez le roi des Lombards. Les comtes en revanche reconnaissent très vite le pouvoir de Charlemagne.
Le roi mène des conquêtes de manière un peu contextuelle, ce qui oblige à adopter non pas une vision chronologique mais géographique.

A.     La conquête du royaume des Lombards

Le pape menacé par le roi des Lombards appelle Charles qui vient et fait le siège avec de nombreuses troupes de la capitale Pavie. Didier, roi des Lombards, cède en juin 774, Charles prend la ville, le trésor qu’il distribue à ses fidèles et décide de se nommer roi des Francs et des Lombards. Le royaume n’est pas intégré puisqu’il garde ses lois et ses coutumes.
Il part ensuite conquérir le duché de Spolète au centre de l’Italie et s’assure de la neutralité du duché de Bénévent dont il obtient qu’on lui paye un tribut. Les Francs progressent donc dans le Sud de la péninsule en entrant en contact avec les territoires byzantins du Sud de l’Italie.

B.     L’attraction vers l’Espagne (778 – 801)

Zone relativement instable, les Francs et les Aquitains vont tenter de prendre pied dans la péninsule. En 777, une révolte éclate des Musulmans de Barcelone qui décident de s’allier aux Francs pour venir à bout de l’émir de Cordoue. Ils font donc une demande avec des émissaires à Charlemagne qui est à Paderborn. Charles se laisse convaincre et en 778 il passe les Pyrénées avec une vaste armée et s’apprête à faire le siège de Saragosse. Mais les alliés barcelonais sont écrasés et Charles se replie vite en brulant Pampelune. Cet incendie provoque en retour le massacre de son armée par les Basques. C’est là qu’est produit la chanson de Rolland de Roncevaux. C’est donc un échec absolu des armées franques, d’autant que l’Aquitaine n’est pacifiée que depuis récemment et pour éviter toute alliance des Aquitains avec Cordoue, il crée en 781 un nouveau royaume d’Aquitaine pour son fils Louis, alors âgé de 3 ans. Au Nord de l’Aquitaine se trouve les palais royaux, au Sud en Septimanie, ce sont surtout des monastères. Louis est donc trop jeune, mais on lui donne quand même car la femme de Charlemagne, Hildegarde, a suivi son mari mais a accouché en Aquitaine. Louis est donc né en Aquitaine et Charlemagne fait passer son fils pour un Aquitain. L’aristocratie locale peut donc entrer à la cour du roi tandis que son fils est tutellé par les bonnes personnes.

Mais l’échec à Saragosse augmente les troubles en Espagne qui provoque un grand courant de migrations des ecclésiastiques espagnols qui se réfugient en Aquitaine et à la cour franque. Ces troubles poussent Charlemagne à instaurer un glacis défensif entre les Pyrénées orientales et la Vallée de l’Ebre : la marche d’Espagne. Le comte de Toulouse et le roi Louis d’Aquitaine permettent de mettre la main sur Barcelone, dorénavant capitale de la marche d’Espagne. Une grande partie des élites locales se joignent au roi franc. C’est l’origine de la Catalogne.

C.     Annexion de la Bavière (788)

Tassilon depuis le décès de son oncle s’estime indépendant surtout qu’il n’a pas prêté serment à Charlemagne. Il se pose en rival de son cousin Charles et renforce son alliance avec les Lombards tout en cherchant à avoir les grâces du pape. Mais quand les Lombards tombent il est un peu isolé. En 787, Charles exige de Tassilon le serment de fidélité, Tassilon refuse mais face à la massification des troupes franques sur la frontière, il finit par se soumettre. Charles renouvelle le serment de Tassilon et lui donne le Bavière en tant que bénéfice. Donc si Tassilon trahit Charlemagne, celui-ci va reprendre la Bavière. L’année suivante au prétexte que Tassilon complote avec les Avars (population d’Asie centrale), Charlemagne et l’assemblée réunie sur le cas Tassilon, annoncent une haute trahison ce qui peut le condamner à mort. Charlemagne magnanime l’enfermera lui, sa femme et ses enfants dans des monastères francs. Sa femme étant morte au monastère de Chelles.

Le succès n’est cependant possible que parce que Charlemagne à bénéficier du ralliement des élites bavaroises de l’Ouest en échange de davantage de terres, de pouvoirs et d’influences, … Le butin qu’il donne aux élites de son royaume, Charlemagne passe son temps à l’accumuler. Il se servira des Avars notamment, qu’il combat farouchement avant de mettre la main sur le ring des Avars, forteresse dans laquelle le khan des Avars gardait le butin de toutes ces expéditions. Charles aurait du atteler 15 chariots de butin qu’il a très largement redistribué en Europe, au Pape, au roi Anglo-Saxon, … Il réorganise aussi la région sous forme de marche et tente un début de missions.

D.     Les guerres de Saxe (776 – 803)

Les relations entre Francs et Saxons sont anciennes mais se sont plus récemment durcies. Les Saxons faisant des incursions et des raids chez les Francs. Charlemagne fera un raid en 772 en pillant le sanctuaire de l’Irminsul et en abattant l’arbre sacré. Les Saxons répliquant par la destruction du monastère de Fritzlar.

De 778 à 785, Charlemagne mène une politique de la terreur. Il tuera plusieurs milliers de Saxons à Verden, en déporte de nombreux en Normandie. Il promulgue le premier capitulaire qui condamne la religion passive de manquements au roi ou la religion. Mais ici, Charles n’a pas le soutien des élites et les Saxons lui font comprendre par une grande révolte en 793. Il entreprend alors le second capitulaire en 797 ou il se rallie définitivement Widukind en l’intégrant dans la structure du royaume franc avec d’autres élites. Les choses sont alors stabilisées.
De 802 à 803, Charles reconnait leur mode de vie aux Francs, moyen d’intégrer la Saxe en lui laissant ses particularités. Enfin cela va de paire avec la fondation de diocèses en Saxe et de monastères, comme celui de Corvey en 822. La phase de conversion est très longue.

A la fin du VIII° siècle, Charlemagne a fini ses conquêtes, il tient plus un conglomérat qu’un empire puisque leur point commun n’est que la soumission à la dynastie carolingienne. Cela permet de mettre une nouvelle dimension à ces conquêtes territoriales.

2.      Le couronnement impérial

Charles était souvent considéré comme le nouveau David, sacré par Dieu. La cour le considère comme tel, surtout sous l’influence d’Alcuin (730 – 804) qui devint un conseiller de Charlemagne très influent sur le roi lui-même. Il insiste sur la dynastie carolingienne qui est au-dessus de toutes les royautés comparée à Rome (le pape Léon III est discrédité, enlevé, réfugié à Paderborn) et à Byzance. Le pape malmené demande de l’aide à Charlemagne qui prend conseil auprès d’Alcuin. Celui-ci conseille l’ouverture d’une enquête et le raccompagnement de Léon III à Rome. Dans l’autre empire, à Byzance, l’impératrice Irène crève les yeux de son fils pour qu’il ne règne pas et elle monte sur le trône à sa place se donnant le titre de Basileus. Ce coup d’état est gênant pour les Francs, c’est un scandale, la femme n’est pas empereur, juste impératrice femme ou mère de.

Le 23 novembre 800 charlemagne entre à Rome et est salué comme un empereur par la ville à l’extérieur de Rome. Charles réunit un concile qui aboutit à un serment du pape sur les reliques saintes, il doit se purger de ses actes. Mais les ecclésiastiques réunis en concile constatent que Charles tient la plupart des capitales de l’ancien empire d’Occident, le concile décide de lui donner le titre d’empereur, que Charles après des minauderies finit par accepter. Il est sacré le lendemain mais la cérémonie pose problème.
Les empereurs devant toujours être nommés à Byzance, on va copier la cérémonie. Il faut que les grands personnages de Rome laïcs et ecclésiastiques acclament Charlemagne. Le pape doit ensuite poser la couronne sur la tête de Charlemagne avant de se prosterner devant l’empereur (genoux puis tête contre le sol). Or le pape inverse le rituel, il le couronne dans la basilique Saint Pierre avant l’acclamation. Or c’est ce geste du pape qui devient constitutif de la nomination d’empereur. Il se place ainsi comme celui qui par son investissement venu de Dieu nommera les empereurs. Du coup, Charlemagne mécontent tentera de retourner la chose par la suite en nommant son fils empereur à Aix la Chapelle, sans succès. Si la proskynèse est depuis longtemps annulée, car évoquant par trop l’idée d’une idolâtrie, le reste de la cérémonie dévoile deux perceptions différentes de l’empereur.

Charlemagne n’a pas vraiment un empire, il a un territoire très disparate où l’empire fut fondé par les Francs et par les armes pour répondre à la volonté de Dieu. Comme Dieu avait choisi les Hébreux, dorénavant, il a choisi les Francs pour porter le message du Christ par les armes aussi. On a donc avant tout un empire chrétien dont le chef est au sommet des pouvoirs terrestres pour que celui-ci réalise sur terre la volonté de Dieu. C’est donc une théocratie impériale caractéristique de règne de Charlemagne, puis de son fils. Cela signifie que l’empereur est l’incarnation de la volonté de Dieu, il est donc au-dessus de toute la société et au moins même niveau que le pape.
Par contre, le système carolingien n’est pas un empire centralisée, ce n’est pas un ensemble unique, mais un conglomérat de plusieurs ensembles avec des royaumes différents délégués aux fils du roi. Certes ces royaumes sont subordonnés à l’empire mais ils existent par leurs particularités spécifiques qui sont conservées. On essaye donc de ne pas avoir devant les yeux l’empire romain, il faut le voir avec les yeux de quelqu’un qui pense sans comparer les deux empires. Le système est particulier.


II.                Les principes de gouvernement

1.      Du cœur des royaumes vers les frontières

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