jeudi 15 mars 2012

CM n°5 Géographie sociale

2- La concurrence des affaires et la menace de la boulevardisation

v 1ère menace :

Le prestige des beaux quartiers attirent les commerces de luxe, le monde du tertiaire supérieur (les cadres des services aux entreprises, de la culture etc.) et de ce fait, les lieux d’affaires (bureaux).

Ce n’est pas la désuétude et la dégradation de l’habitat qui fait peur mais la concurrence entre les bureaux et les logements car les bureaux rapportent plus qu’un logement. En bref, il y a une concurrence entre les quartiers d’affaires et les quartiers résidentiels bourgeois. Cette tendance qui s’observe à Londres par le phénomène de city est présente aussi à Paris dans les 8-9èmes arrondissements.

C’est aussi une menace pour l’entre-soi avec une nouvelle fréquentation des quartiers par les cadres qui ne font pas parties des grandes familles bourgeoises. Il y a donc des résistances de la part des résidents de ces quartiers de la grande bourgeoisie, qui s’observent dans la création de comités de quartiers afin de se défendre.

Par exemple, politiquement, la création de la défense fut un moyen de préserver les beaux quartiers de l’extension des bureaux en créant un centre d’affaire éloigné des zones résidentiels bourgeoises.

Paradoxalement, la grande bourgeoisie tient son pouvoir de la loi du marché mais en tant que résidente dans son quartier qu’elle veut protéger, elle s’y oppose localement un petit peu. Elle tente de contrecarrer la loi du marché qui stipule que les bureaux sont plus rentables que les logements.

v 2ème menace :

La boulevardisation : Les « Grands Boulevards » ont été construits comme une vitrine de la vie bourgeoise. Mais les grands boulevards sont aussi côtoyés par les classes populaires.

Ex : le théâtre de boulevard qui s’oppose au théâtre classique.

Boulevardisation = le fait que les grands boulevards soient fréquentés de manière mixe.

Ex : Les Champs-Elysées sont complétement dévalorisés par la grande bourgeoisie car il y de nombreux touristes (qui ne sont pas bourgeois) mais aussi une fréquentation de la part de toutes les classes sociales. Les grands magasins publics attirent les gens de tous les quartiers, ce qui provoque un mélange social intolérable pour la grande bourgeoisie. Le boulevard des Champs-Elysées e n’est donc plus un produit de luxe pour les grands bourgeois, qui le délaisse.

3- Comment la bourgeoisie défend ses espaces

Les ghettos du gotha (2007) :

Le Gotha : Ancien annuaire de l’élite< aujourd’hui, cela correspond au bottin mondain.

Les Pinçons parlent de collectivisme en ce qui concerne la grande bourgeoisie. Un collectivisme qui passe par une forme de mise en commun indirect des biens par la culture, la mondanité. Ils parlent aussi de militantisme. Les termes issus de l’idéologie marxiste sont employés de manière atypiques par les Pinçons.

Ils démontrent que la grande bourgeoisie à une grande cohésion de classe et une grande capacité à défendre ses intérêts. C’est la seule classe sociale qui a conscience de ces intérêts et qui les défend collectivement alors que pourtant ils revendiquent le libéralisme, l’homme qui s’est « fait » tout seul.

Ex : Communautés de quartiers montée dans les années 70, place Vendôme et dans les Champs-Elysées pour filtrer les types de commerces voulant s’ouvrir dans ces quartiers. C’est l’image du quartier qui est protégée.

Ils ont des assemblées générales dans les comités de quartier et de locataires constitués notamment d’élus (UMP).

Il y a une opposition très nette à la construction de logements sociaux. Jusqu’au milieu des années 2000, les communes doivent avoir 20% de logements sociaux sinon elles doivent payer des amandes. Mais dans la commune de Neuilly il y a juste 2.5% de logements sociaux construits pour 54% dans la commune voisine de Nanterre.

Pour cela réagir contre la construction de logements sociaux, les grands bourgeois signent des pétitions, ils font des manifestations : ils se sont appropriés les formes de contestations ouvrières.

Séance 5 : Les quartiers populaires

Introduction :

Ø Classes populaires= Ouvriers et employés de service peu qualifiés.

Dans ce cours, on parlera des quartiers populaires créés par l’initiative privée.

I- Habitat populaire et spéculation privée

Dans la construction de l’habitat populaire, il y a une très grande importance de l’industrialisation. C’est au 19ème siècle que se met plus fortement en place la division sociale de l’espace.

1) La ville industrielle et la naissance de l’habitat ouvrier

La ville industrielle est un moment de rupture dans le logement des classes populaires qui, avant les années 50 est principalement composé de maisons paysannes, ou les ouvriers sont logés sur leur lieu de travail.

Avec l’industrialisation il y a une déconnection entre le lieu de travail et le logement. Le logement devient progressivement un objet de spéculation.

Engels : Il étudie Manchester, une ville du nord-ouest de l’Angleterre qui s’est développée avec l’industrialisation. Le tissu urbain de cette ville est fondé sur la spéculation. Il n’y a pas d’intervention publique, pas de plan d’ensemble (désordre urbain). Il y a une ségrégation bien organisée: les quartiers ouvriers ne sont pas à côtés des quartiers bourgeois.

Lefebvre :

« Un ordre spécifique, celui de la production industrielle gérée par la bourgeoisie, engendre selon Engels, un désordre spécifique, le désordre urbain ».

L’habitat ouvrier est à proximité des usines, il est bâtit à moindre coup en maximisant l’intensité des parcelles. Il n’est pas visible des quartiers bourgeois. Ces logements n’ont pas de confort, ils sont de mauvaises qualités, se dégradent rapidement et sont surpeuplés. C’est pourquoi, ils deviennent rapidement insalubres.

Engels parle de double exploitation. L’ouvrier a à faire au patron mais aussi au propriétaire qui lui extorque également une partie de son travail.

La ville industrielle devient un lieu de dépossession et d’aliénation des classes populaires. C’est aussi un lieu de formation de la conscience de classe et de reconfiguration des solidarités de classes.

Les villes sont principalement des villes ouvrières en espace occupé. C’est-à-dire, que dans les villes industrielles résident quantitativement beaucoup plus d’ouvriers.

Ex : Faubourg Saint Antoine, La courée Lilloise et le Coron minier

2) Les quartiers populaires centraux : l’exemple de Belleville (Paris 20ème)

v Comment des logiques abstraites économiques et sociales construisent des formes urbaines spécifiques ?

Belleville est une commune annexée en 1860 par Haussmann, qui a entrainé son urbanisation. Une urbanisation entièrement spéculative. Les propriétaires achètent une parcelle, crée des logements dessus pour les vendre ou les louer. Le propriétaire de la parcelle fait des petits lots et puis les gens créent des immeubles de basses gammes. En règle générale, ce sont les petits bourgeois qui sont responsables de la construction des immeubles.

Les parcelles sont en longueur et reprennent la forme parcellaire rurale. Il n’y a pas de remaniement parcellaire. On retrouve des usines complétement imbriquées dans l’habitat, au cœur même du tissu urbain. Les nuisances, la pollution s’accumulent à l’insalubrité des logements. Cela explique aussi la densité. Il n’y a aucun espace vert.

La très grande part de la classe ouvrière présente dans ce quartier est à l’origine des contestations populaires.

3) Les banlieues pavillonnaires

L’urbanisation s’est poursuite selon la même logique en banlieue.

Les usines s’installent en banlieue et donc se développe des lotissements pavillonnaires avec des maisons mitoyennes. Les lotisseurs vendent des lots directement aux ouvriers et les gens construisent eux-mêmes leur logement. On parle d’auto-construction.

Néanmoins, il n’y a aucun élément de confort, pas de route bétonnée, d’égouts et d’entrées d’eaux. En bref, ce n’est pas viable. Ce sont justes des terrains agricoles divisés en lots et revendus. Cette situation d’inconfort est le problème principal des « mal lotis ». Ces banlieues pavillonnaires ont été viabilisées à près coup par la puissance publique donc à l’époque on y retrouve les mêmes éléments d’insalubrité que dans les immeubles.

Au sortir de la 2nd guerre mondiale on a une très mauvaise image de l’habitat individuelle. On y accole l’image de l’émergence de la banlieue rouge. Cela explique que l’on est massivement investie dans les grands ensembles afin de casser la banlieue rouge.

II- Ségrégation et agrégation des classes populaires

v Comment se créent des quartiers populaires ?

Une ségrégation pluridimensionnelle

On parle de ségrégation d’un point de vue imagé, il n’y a pas de loi qui dit ou doivent vivre les ouvriers. C’est quand même un choix même si ce choix est très contraint par :

- Le coup du logement

- La discrimination. Les classes populaires sont principalement locataires : le propriétaire peut refuser de louer à certains individus qui en ont pourtant les moyens.

La ségrégation n’est pas seulement spatiale, c’est aussi une ségrégation par segment en fonction du type de logement.

Les classes populaires sont aujourd’hui plus logées dans le parc locatif privé que dans le parc social. Tous les primo-arrivants n’ont pas d’accès au logement social. Le parc privé locatif continue à avoir une fonction d’accueil importante.

Les classes populaires ne peuvent aller que dans des lieux mal considérés, dévalorisés, mal desservies ou insalubres. On parle de « L’habit social de fait ». Il sert de parc social mais ce sont des logements privés insalubres.

Ex : les logements (appartements) meublés, les « chambres de bonnes ».

Il y a en plus des mauvaises conditions de logement, une précarité du logement. Ce sont des quartiers de mauvaise qualité avec des nuisances (aéroport, décharge) et ce sont des quartiers qui ne sont pas trop accessibles (peu de moyens de transport). Tout cela se répercute dans le prix du logement. Le fait de vivre dans des quartiers de mauvaises qualités accroit la domination des classes populaires. Cela accentue leurs mauvaises conditions de vie.

Les quartiers populaires ont aussi une mauvaise image. Le fait d’habiter un quartier populaire renforce la stigmatisation envers ces populations. Cela explique pourquoi les classes populaires qui le peuvent veulent vivre ailleurs (surendettement par un près par exemple). Il y a aujourd’hui par ce fait, une discrimination à l’emploi par l’adresse.

2) Logiques agrégatives des classes populaires : la proximité

Il y a quand même aussi un certain choix de regroupement parfois.

Les logiques agrégatives sont d’abord :

- la proximité avec le lieu de travail : proximité aux usines.

- Proximité des services : habiter dans le centre-ville lorsque l’on n’a pas de voitures.

- Résider dans le pays d’accueil avec des individus qui habitaient dans la même région de naissance que nous. Cf : quartiers de migrants.

Ex : Migration interne des migrants ruraux auvergnats. Mais aussi quartier de migrants chinois.

Aujourd’hui pour les migrants, il y a beaucoup plus d’associations d’aide de migrants à Paris qu’en banlieue. Ce qui explique aussi pourquoi ils se rendent majoritairement là-bas.

III- Le fonctionnement d’un quartier populaire

1) Une composition sociale complexe

La composition sociale d’un quartier populaire est assez compliquée. On peut faire des classifications mais à l’intérieur la composition sociale est diverse. Même au sein des ouvriers il y a une multiplicité de statuts. Il y a une différence entre les ouvriers qualifiés : l’« aristocratie ouvrière » et les ouvriers non qualifiés. Le monde ouvrier n’est pas du tout homogène.

Dans les quartiers populaires il n’y a pas que des ouvriers, il y a aussi des employés (hôtellerie, domestiques, restauration). Ils n’ont pas les mêmes rapports avec les bourgeois.

Il y a aussi des petits bourgeois traditionnels : commerçants, artisans à leur compte. Ils partagent des conditions de vies communes mais néanmoins, les quartiers populaires sont composites même si il y a une surreprésentation des classes populaires.

A l’intérieur du quartier il y a aussi plein de logiques de distinction. La conscience de classe est traversée par des clivages, des distancions internes.

A cela s’ajoute la diversité géographique des populations. C’est une sorte d’empilement des vagues de migrations successives. A l’intérieur des quartiers populaires, se superpose des logiques de classes et des logiques de solidarités communautaires, villageoises.

Il y a toujours un grand brassage des origines géographiques.

Ex : Les mariages sont mixtes. Les auvergnats ne se marient pas qu’entre auvergnats.

La culture populaire est elle aussi née d’un brassage géographique.

Ex : le bal-musette mélange entre le bal auvergnant à l’accordéon italien.

La conscience nationale s’est forgée tardivement et c’est pour cela que c’est très tardivement que l’on a traité différemment les migrants provinciaux aux migrants étrangers. Il y avait les mêmes attitudes racistes envers ces deux types de migrants. C’est à partir de la 2nd guerre mondiale que l’on établit une distinction.

Dans les années 50-60 ces quartiers connaissent un grand changement : les grands ensembles. Ceux qui étaient français sont allés vivre dans les quartiers des grands ensembles. C’est pour cela qu’aujourd’hui les quartiers populaires sont composés majoritairement de migrants étrangers, des quartiers avec une identité immigrée.

Ex : Belleville d’abord quartier juif tunisien puis ensuite arabe et chinois.

C’est quartiers d’immigration sont aussi des quartiers d’intégration. P. Simon.

Cela crée des centralités minoritaires, centralité immigrée, avec des centralités de commerces exotiques, centralités de logements.

Ex : Belleville ou Château-rouge (18ème) avec sa centralité africaine.

Dans ces centralités, les gens y habitent de moins en moins. Ces centralités évoluent. Les centralités commerciales ne sont plus forcément liées à l’habitat.

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