I.
La forme des livres
1.
Les caractères
Le livre du début
tend à imiter le manuscrit et petit à petit il va trouver sa forme propre. Du
coup, les premiers caractères imitent l’écriture gothique qui a cours en
Allemagne. Ces
caractères sont plutôt épais et cela ne rend pas le livre très lisible. Progressivement, dans les pays latins
(dont la France et l’Angleterre), un
nouveau type de caractère émerge : le romain.
L’une des
conséquences est que cette recherche des imprimeurs de caractères plus lisibles
va pousser à la scission entre les caractères manuscrits et les caractères
imprimés. De plus, le romain va vite s’imposer à toute l’Europe de Sud, seule
l’Allemagne conservera le gothique jusqu’au XX° siècle.
2.
La page de titre : « état civil du livre »
(Lucien Febvre)
Sur
la page de titre qui n’existe pas à proprement parler, on trouve le nom de
l’auteur, quelques mots pour résumer l’ouvrage et le livre débute. Progressivement, on va établir des
premières pages. A la fin de l’ouvrage en revanche, on trouve un endroit
qui présente le livre, parfois l’auteur, c’est le colophon. Petit à petit, le colophon entre en première page.
Longtemps
les livres ne furent pas reliés et ils n’avaient pas de protection à la
première page. Pour pallier à cela, on va progressivement laisser la première page blanche pour le protéger
de la crasse. Cet espace délaissé devient alors une page libre de création.
Vers 1415 –
1480, on se décide à mettre le titre de l’ouvrage et la marque de
l’éditeur. La suite sera l’affaire de conventions et de modes dans la
présentation du titre. En fait, cette page de titre est un élément de repérage
dans les livres. On les repère facilement et on ne perd pas de temps, les livres sont plus faciles à manier et à
s’approprier. Le livre peut être offert à des publics plus variés.
3.
La présentation du livre et les formats
Au début les livres
manuscrits ont de nombreuses abréviations. Ces abréviations sont moins
nécessaires avec les imprimés et rapidement elles disparaissent. Les caractères
deviennent plus gros et les livres gagnent en lisibilité. La numérotation des
pages renvoie au
départ à un souci dans l’atelier même. Une fois la feuille produite, on plie la
feuille. Pour monter rapidement les livres, ne devant pas se tromper dans
l’ordre des livres, on prend l’habitude de numéroter les cahiers par lettres,
les pages sont numérotées par nombre.
Le système de
repérage du livre se complexifie aussi avec l’apparition de sommaire au début,
d’index à la fin, … On peut se repérer dans le livre, y circuler sans le lire de la première à la
dernière page. Les livres savants contenaient toutes ces gammes de bonus avec
aussi des commentaires en marge qui
sont de petits résumés de la page ou renvoyer à une référence. Progressivement
ces annotations glissent vers le bas mais aussi vers la fin. La disparition des
commentaires sur la page est compensée par des paragraphes plus courts, des
chapitres, … Tout cela accentue encore la lisibilité du livre. On choisit
des livres avec d’assez gros caractères et une lisibilité immédiate.
Certains manuscrits
avaient déjà des petites tailles, mais souvent ils étaient courts. En revanche,
avec le livret imprimé, on publie en petit format indépendamment de son
contenu. Le livre qui se transporte facilement se banalise.
4.
L’association du texte et de l’image
Amadis de Gaule
est un des premiers livres mélangeant nouveau et ancien (cône de colophon et première
image illustrant le sujet). Les
illustrations furent longtemps réservées aux livres prestigieux ou à ceux
que l’on offrait aux grands princes avec des dessins pour compléter. Mais avec
l’imprimé, on insère dans les caractères, un bois gravé. Ce bois gravé est réutilisable et peut se transmettre à un ou des
collègues. Cette illustration des livres devient un style propre puisqu’on
obtient des écoles d’illustrateurs de livres.
Le
livre imprimé est-il si révolutionnaire ? Y’a-t-il rupture et si oui
laquelle ? Les premiers livres
imprimés imitant les manuscrits, la distinction est peu claire. Dès le
XIII° siècle on avait un mode de production industrielle de manuscrits, en
temps normal chaque copiste copiait un bout d’un même livre. Eisenstein
conteste la révolution de l’imprimé, elle dit d’abord que l’imprimerie a permis
de nouveaux foyers de cultures. En changeant de lieu, la savoir change de
forme. La production des livres n’a pas la même logique de production que les
manuscrits puisque l’imprimé tient
Autre débat la
standardisation du livre,
l’originalité du manuscrit disparait un peu. Les textes sont reproduits à
l’identique en grand nombre et l’organisation des livres suit un principe
majeur, la mise à disposition facile pour le lecteur.
Cela détermine
aussi un changement dans les opérations intellectuelles permises par la
lecture. Chaque individu à accès à beaucoup plus de livres, chaque livre peut
atteindre beaucoup plus de lecteurs. Les lecteurs vont travailler depuis les
livres et non plus les recevoir en circulant dans le livre. L’individualisation
de la lecture ne se fait qu’avec la lecture silencieuse du livre propre à
chacun.
Ce qui permet de
parler de révolution, c’est le nombre de livres imprimés qu’on peut comparer au
nombre de manuscrits.
Cela permet une présence très large des
livres dans la société. C’est comme si le livre devient, tout en étant un
objet présent partout, un monde total,
un espace à investir de plusieurs manières. Il est partout, cet espace de
l’imprimé est susceptible de toucher toute la société alors il devient un
espace stratégique. D’où les groupes sociaux qui vont se servir de l’espace de
l’imprimé pour se faire connaître. La question de l’auteur dans l’Ancien Régime,
c’est certes les auteurs savants, c’est aussi les auteurs moins connus qui par
leur nom sur l’imprimé peuvent connaître un essor social. Il y a donc un coté
social dans la dimension du livre.
Fabriquer et vendre des imprimés (XVI° - XVIII° siècle)
Cours
surtout centré sur la France mais on fera quelques balisages dans les pays
alentours.
I.
Les ouvriers du
livre et les livres
1.
La hiérarchie de l’atelier
Le prote, savant de l’atelier qui est en
charge de vérifier la mise en page de chaque livre. Il doit s’occuper de la
partie délicate de la justification et déterminer le format du livre. Il
compose les pages les plus délicates du livre qui formeront un modèle pour les
ouvriers qui termineront le travail. D’une
manière générale il coordonne l’atelier et donne la paye en fin de semaine.
On
trouve d’une part le compositeur (ou
le singe) et d’autre part le pressier.
A la presse, ils sont deux pour activer la presse. Mais la coordination
est compliquée, les patrons veulent
éviter les temps morts mais cela change en fonction de nombreux critères dont
ceux du tirage. Pour un tirage de 1 000 exemplaires, il faut trois
compositeurs pour deux pressiers. Pour 2 000 exemplaires, on met deux
pressiers pour un compositeur (car celui-ci a donc plus de temps pour faire sa
casse car les pressiers doivent activer la machine plus qu’avant). En réalité,
les petits imprimeurs n’ont qu’une presse, du coup, pour gagner de la souplesse
dans le rapport compositeur – pressiers, certains ont deux à trois presses. On
peut alors répartir le travail selon le nombre de presses.
2.
Une aristocratie artisanale ?
A.
L’accès à la maîtrise
Au XVI° siècle, on a des compagnons qui parviennent à
devenir maître,
chose peu évidente puisqu’il faut un capital économique pour le matériel,
notamment avec la hausse du prix du papier. Si au XVI° siècle il est encore
possible de passer maître, au XVII° siècle, cela devient plus compliqué. En
effet, les maîtres confient leurs tâches à leurs enfants, certains
compagnons se marient à des veuves de maîtres.
Cette fermeture du
métier est très organisée par le pouvoir royal. Cela provoque des crispations
chez les compagnons qui parfois ouvrent des ateliers clandestins lors des fortes demandes
toujours concomitantes aux périodes de politisation (guerres de religion, crise
de la fronde, Révolution, …).
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