lundi 5 décembre 2011

Médiévale 28 - 11

Précédemment : Médiévale 21 - 11












  1. L'organisation du terroir


  1. L'essor de l'espace mis en valeur XI° - XIII° siècle


C'est dans un contexte de croissance démographique qu'on aménage de nouvelles terres, elles-mêmes favorisant la croissance démographique. Le monde médiéval était très organisé autour des forêts qui couvraient 50% à 70% du territoire de l'Europe. On avait de vastes ensemble forestiers continus et denses qu'on ne connaît guère aujourd'hui. A l'époque ce saltus s'opposait à l'ager. On développa alors la pratique de l'essart (défrichement) qui permit de faire reculer l'importance de la forêt. La Picardie à vu sa forêt disparaître en deux temps 1150 – 1170 puis 1220 – 1250. Ce défrichement est tardif par rapport au reste de l'Europe mais massif.

Cela s'est accompagné d'un autre développement des terres avec l'assèchement des terres pour en faire des zones cultivables : polders en bord de mers et assèchement de terres ou régulation de rivières dans les terres (via des canaux ou des levées). Ces polders très présents dans les Flandres visent à construire de grandes digues et à aménager des canaux pour que cette eau retenue fasse une pression moins forte sur les digues. Cela se fit, on pense, sous le coup d'une croissance démographique. Les comtes de Flandres furent les directeurs de ces grands travaux, ils travaillèrent en association avec des abbayes. Mais ces terres salées étaient impropres à la culture, on en fit donc des terres d'élevage. Puis au XII° siècle, on en fit des terres cultivables. On retrouve ces travaux à Venise, dans le marais poitevin, … Ils existe aussi des terres gagnées sur l'eau à l'intérieur du territoire, ce sont des terres inondables souvent marécageuses. Elles furent mises en culture par un double système de canaux qui absorbaient l'excès d'eau et ???.

Ces travaux sont toujours sous l'influence d'une autorité seigneuriale ou royale, ce n'est pas une décision uniquement d'un paysanne. On constate ces travaux autour du Pô avec l'abbaye de Nonantola, seigneurie ecclésiastiques qui parvint à ramener plusieurs travailleurs. De même, l'endiguement de l'Arno qui eut lieu à Florence se fit sous l'influence de la Commune de Florence ou encore les turcies (digues) le long de la Loire autour de Saumur se fit avec le soutien de Henri II Plantagenêt à partir de la seconde moitié du XII° siècle. Des travailleurs incités à venir les entretenir et bénéficiaient ainsi du statut d'hôtes, et donc souvent de taxes plus faibles.


A l'inverse, les premiers travaux de défrichements sont le bilan des paysans qui se sont mis à attaquer les périphéries des massifs forestiers. On parle alors essarts, d'écarts, de plans, de brosses, de breuils, de failles, de fayards, … pour qualifier les sols de forêts récemment défrichés. Or pour effectuer cela, il faut généralement l'accord du seigneur puisque les forêts sont dans le domaine seigneurial, mais en général, le seigneur laisse les paysans faire. On a donc un retour des alleux durant cette période comme dans le bordelais ou le macônnais. Une fois les cultures engrangés, les seigneurs ont forcé ces alleux à payer les redevances qui leur étaient dues. Tout cela pris place au XII° siècle.

A la même période, les seigneurs organisent des défrichements de grands massifs forestiers à l'écart des habitations et qui donne lieu à la création d'un village neuf ou ville neuve. C'est donc l'apparition des villages rues, suivant l'axe de pénétration de défrichement de la forêt. On faisait donc venir des hôtes à qui on proposait des terres et des redevances plus faibles en échange de leur participation au défrichement. Souvent les seigneurs pratiquèrent cette politique pour permettre la construction de villages pour assurer les transports sur un axe. Cela assurait la sécurité des voyages (les forêts pyrénéennes vers Saint Jacques de Compostelle, sur l'axe Paris – Orléans pour les trajets des rois, …). A cela s'ajoute les profits amenés par un village neuf, nouveau centre de prélèvement de redevances, même si certains habitants bénéficiaient d'avantages pendant une dizaine à une trentaine d'années avant que ces avantages ne soient grignotés par les seigneurs pour les aligner comme sur les autres villages. De plus, en général, l'avantage des redevances était compensé par d'autres taxes surélevées.

Les travaux à proximité des grandes villes étaient faciles, mais bien plus dur à l'Est de la Germanie (Bohême, Pologne, …) où les massifs forestiers étaient immenses et souvent inhabités. Du coup, les souverains ne pouvant faire appel aux seigneurs, faisait appel à des entrepreneurs en défrichement souvent des petits nobles ou des bourgeois. L'intérêt était que le roi faisait don à la fin du travail d'un petit fief faisant donc de petits seigneurs. D'autres y voyaient un intérêt économique. Leur travail consistait surtout à faire venir et diriger les travaux de défrichements. Très souvent, à la fin du défrichement on a un pariage ou paréage pour l'installation d'un village neuf, l'un faisant don de terres, l'autre de liquidité avant qu'ils ne se partagent les redevances.

Dans certaines régions, le manque des terres est si conséquent que le village grignote sur des petits massifs forestiers séparant différents villages. Cela mène rarement à un village autonome, plutôt à de petits hameaux devant régulièrement se rendre dans les villages. Par contre, l'apparition de ces hameaux illustrait pour l'époque la sécurité grandissante dans les campagnes via ces travaux. C'est aussi le cas pour les paysans spécialisés dans l'élevage qui accèdent donc ainsi à des terres libres pour faire paître leurs troupeaux.


  1. Les transformations de l'espace agro-pastoral, XIII° - XV° siècle


Les travaux de base sur le monde rural et médiéval furent développés par Marc Bloch en 1931 dans Les caractères originaux de l'histoire rurale française. Il divise le monde médiévale en trois grandes civilisations : openfield, bocage et méditerranéenne. Ce qui différenciait ces civilisations ce sont les caractères géographiques mais aussi les cultures avec un type de rapport de domination entre paysans et seigneurs mais aussi des rapports entre paysans. Les régions de bocage aurait été des régions plus individualiste alors que dans le cas des openfields, c'eut été plus collectif.

Les travaux d'aujourd'hui le conteste. A l'époque, même dans le cas des openfields, on avait beaucoup de paysans qui refusait de participer à la mise en valeur collective (séparation des autres champs par des cailloux sur le périmètre par exemple). Le milieu du bocage n'est pas le fait d'une société plus individualiste mais au développement d'une spéculation sur l'élevage. Dans le Hainaut, Gérard Sivery à montrer que ce n'est pas un milieu du bocage, puisqu'on y pratiquait quasi-exclusivement une céréaliculture. A partir du XIV° siècle, les paysans réalisent les profits qu'ils peuvent faire en élevant des bêtes à destination de la consommation urbaine d'autres villages. Du coup, dans le cas du village de Renaut-Folie, on a moitié d'élevage, moitié de champs ouverts et dans les années 1330, les terres d'élevage sont huit fois supérieures aux autres. Pour séparer les troupeaux, on a planté des petites plantes puis des haies formant un paysage de bocage. Par intérêt économique, les paysans ont pu passé des openfields aux bocages.


Une autre remise en cause eut lieu vers 1960, autour de l'organisation des parcelles qui se seraient profondément transformée au cours du Moyen-Age en particulier dans le cadre des régions d'incastellamento. Les champs se seraient réorganisés autour du château dans une forma radio-concentrique. Les archéologues ont renié ce fantasme. Les champs s'organisait plutôt perpendiculairement aux chemins tracés en respectant parfois les tracés antiques.

Ce qui va changer surtout, c'est le morcellement des parcelles lors du l'apogée dans la croissance démographique. Dans un certain nombre de cas; des parcelles sont devenues minuscules. Vers Cambrai, le village d'Iwui est divisé en 800 parcelles différentes faisant en moyenne 10 ares (environ 1000 m²), au XIV° siècle. En Picardie, la superficie moyenne des exploitations avait été divisé par deux ou par trois, mais les petites parcelles du XIV° siècle faisant une centaine d'ares. On pense que cela est du à la division des terres lors de la naissance de plusieurs enfants. Les seigneurs laissèrent faire puisque ils percevaient des droits de mutation plus nombreux.

La question était pour les historiens de savoir si ces petites parcelles handicapaient la mise en valeur du paysage. C'était pourtant pour certains paysans un avantage lorsqu'on pratiquait l'assolement triennal. Cela leur permettait d'éviter de stocker leurs récoltes avec les droits de stockage, les risques que cela induisait, … De plus, tant que les parcelles des paysans ne descendaient pas sous 40 ares, cela n'était pas un frein pour les paysans qui ne pouvaient pas labourer plus de 40 ares par jour (si le terrain est au même endroit sinon il faut se déplacer). Cela n'handicapa pas les paysans mais bien leurs descendants lorsqu'on chercha à établir un remembrement.

Bien sur, tout le territoire ne fut pas calqué sur le développement des Romains. Le cas de l'étang de Montady proche de Béziers est explicite. Cet étang fut progressivement asséché ce qui développa des cultures sous forme de « parts de tartes », assez unique. Cela eut aussi des conséquences de nos jours, l'effondrement de pont de Tours en 1978 s'explique suite aux travaux d'archéologie à un corsetage des digues du XIV° siècle qui provoquait un surcreusement aux bases des piliers du pont. On estime que 30% des poissons dans nos rivières que l'on consomme actuellement furent introduit par des hommes du Moyen-Age (carpe venue de Chine, …).


Pour résumer les travaux de l'homme sur son environnement au cours du XIII° siècle, Joël Burnouf a qualifié cela comme un « moment de forçage » avec une surexploitation des forêts, une transformation profonde des cours d'eau, … Certains historiens soulignent alors le caractère de prédateur de l'homme avec ces conséquences parfois malheureuses. Mais les derniers travaux des archéologues sur les forêts ont montrer que l'action de l'homme n'était pas que prédatrice. Ils ont constaté qu'au XIV° siècle, les Ducs de Bourgogne réalisant les dangers du défrichement implantèrent un système de rationalisation d'utilisation des arbres avec un replantage des arbres entre autre. En effet, la région sous la disparition des forêts augmentait la force du vent qui déracinait les arbres.










Les espaces de la ville, XI° - XV° siècle









A partir des X° et XI° siècles, on constate un processus de croissance urbaine progressif alors qu'avant de très nombreuses villes d'Occident s'étaient auparavant rétractées. On a donc de villes nouvelles qui sont crées et qui deviennent de grands centres commerciaux. Ces villes sont des points de pouvoir par leur attraction et parce que des puissants viennent y vivre. De plus, la forme du régime instaure sa propre aspect urbain (commune, dynastie, …). de plus, si la ville antique exerçait son pouvoir sur l'espace alentour, avec son déclin à la fin de l'antiquité, ce contrôle est perdu et la renaissance urbaine des X° et XI° siècles, il y une reprise de contrôle des régions alentour par des tutelles et des mises sous contrôle.



  1. Les grands types d'espaces urbains, XI° - XIII° siècle


  1. Un espace hérité à réinvestir : les reste de la ville antique


C'est en Italie que les restes de la ville antique ont eut le plus d'influence sur la manière dont l'espace s'est réorganisée. Au XIV° siècle, un tiers des européens urbains vivaient en Italie. La ville de Rome a beaucoup souffert. Au II° siècle, son enceinte entourait un secteur densément urbanisé couvrant une surface de 1500 hectares. Elle est réentourée d'une enceinté au IX° siècle par le pape Léon V, pour entouré cette fois-ci 75 hectares. Encore reste-t-elle une grande ville puisque certaines ne couvraient que 20 à 40 hectares. La ville de Pavie au contraire passe de 50 hectares au V° siècle passe à 100 hectares au ?? siècle. La décroissance des villes romaines fut, à part Pavie, très importante. C'est donc une rétractation de l'espace urbain qu'on peut constater.


A Rome, la reprise de la croissance urbaine fut tardive. Dans les années 1120, on observe les espaces spatiaux ??? Cela se fait par coalécsence de petits bourgs qui se recréent au XII° siècle et qui en croissant reforment une ville. En 1280, Rome retrouve 280 hectares. Les autorités ecclésiastiques ont profité du délaissement des seigneurs pour acquérir une influence sur la ville. A Rome, ce sont les assemblées de chanoines ou du moins qui ont organisés le lotissement du centre-ville. Les monastères se sont mis à contrôler plusieurs centaines d'immeubles. Des phénomènes similaires eurent lieu dans d'autres villes italiennes comme Bologne où le monastère San Procolo contrôlait 500 parcelles. Pendant longtemps cela n'apportait rien à l'Église avec des loyers très peu onéreux. L'objectif était surtout d'influencer spirituellement les populations, de faire des fidèles. Certaines populations s'enrichirent et en conséquence, l'Église aussi (dons, augmentation des loyers riches, plus de fidèles, …). Au début du XII° siècle, une maison ordinaire à Rome coutait de 15 à 20 livres puis au début du XIV° siècle 60 à 80 livres.

Les familles de l'aristocratie laïques n'étaient pas absentes mais beaucoup moins présentes dans cette ville de Rome. Sandro Carocci a démontré que les domaines seigneuriaux étaient surtout dans la périphérie de Rome, leurs acquisitions en ville étaient bien moindre. Par contre, ces familles se sont concentrées dans des palais aux environs de grands monuments de la Rome antique. La famille Colona vivait près du mausolée d'Auguste, la famille Frangipani s'organisait autour du Colisée, la famille Orsini dominait le château Saint-Ange, le mausolée d'Hadrien. La marque des bâtiments antiques sur l'espace urbain fut souvent déterminante. A Florence, l'ancien théâtre romain fut réinvesti par une famille éminente de la ville, les Peruzzi. Ils se firent construire un palais en bordure de cet amphithéâtre et l'ensemble de la zone fut lotie par celle-ci. Parfois la marque reste avec à Lucques une construction d'immeubles ovaloïdes. Les monuments romains ne furent plus utilisés de la même manière, ils furent réappropriés. Si en Italie ces monuments furent réinvestis, d'autres tournèrent le dos au passé antique comme Paris qui se construit sur la rive droite alors que Lutèce s'était établie sur la rive gauche. La rive gauche étant habitée de monastères.

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