vendredi 24 février 2012

Sociologie politique - CM - Fin du chapitre introductif

Comment la violence de l’Etat s’inscrit dans le corps des citoyens ? ELIAS montre le processus de civilisation, qui est un processus de dressage des corps, FOUCAULT parle des disciplines. Des technologies nouvelles comme la biométrie, qui permet de reconnaitre les citoyens.

On ne peut pas expliquer la stabilité d’un Etat par la violence, qu’elle soit physique ou symbolique. Ce qui permet d’expliquer ça, c’est une part d’allégeance de la part des citoyens, amenant le concept de domination : c’est l’obéissance des citoyens à un Etat ou à un homme politique.
Ce concept de domination est développé entre autre par WEBER (TD séance 1), c’est une relation que WEBER oppose à la puissance. La puissance repose sur le rapport de force inégale, la domination repose quant à elle sur le consentement et la légitimité.
La domination est « la qualité du pouvoir dont l’acceptation se fonde non sur la coercition comme ressource première mais sur le consentement réputé libre de la population qui s’y trouve soumise ». Cela signifie qu’il peut y avoir des contraintes invisible (« consentement réputé libre ») imposant aux citoyens d’accepter la domination. Dans la conception wébérienne, la domination repose sur la croyance de la légitimité et du bien-fondé du pouvoir politique.
                                                        
Ce concept renvoi à des débats plus anciens, remontant loin dans l’histoire : voir le texte d’Etienne DE LA BOETIE. On retrouve aussi cela dans l’école de Francfort, dont les deux penseurs principaux sont ADORNO et HORKHEIMER. Ce sont des chercheurs allemands de l’entre-deux-guerres très attiré par les théories marxistes : ils observent que même avec la révolution russe, il y a eu très peu de révolutions dans le reste de l’Europe. Ils ne comprennent pas non plus pourquoi un régime révolutionnaire devient un régime autoritaire et à cela s’ajoute l’émergence du régime nazi.
Au bout de longs essais et de plusieurs enquêtes, ils proposent deux pistes de réponses. Ils ont d’abord une explication psychologique, les êtres humains auraient une fascination pour l’autorité et le contexte familiale aurait un impact sur cette fascination (plus la famille est disciplinaire, plus les enfants ont tendance à adhérer politiquement aux régimes disciplinaires) (le ruban blanc film de HANEKE). La deuxième explication est la culture de masse qui permet de répandre une propagande et d’aliéner les citoyens. Ainsi, les individus ne sont plus aliénés comme chez MARX par l’industrie mais par la culture.

Conclusion du I- :
La politique ne se restreint pas aux institutions politiques, on ne peut pas l’entendre uniquement au sens institutionnel. La politique, c’est la capacité de certains groupes ou de certains individus à diriger la vie en société, à promulguer des règles qui s’appliquent à tous et à les faire respecter. La politique serait un champ social, un système : on parle de « machine politique ». C’est un champ social dominé par les conflits d’intérêts, où il y a des enjeux de pouvoirs internes mais aussi un pouvoir dominant qui monopolise la coercition légitime.
Ce système-là n’est pas isolé des autres systèmes : il est lié aux systèmes économique, artistique et religieux, pour donner quelques exemples.

Quelle est le rôle de la sociologie politique ?
Son rôle est d’élucider les rouages du système politique. Quand le système politique fonctionne, il n’a aucune raison de dévoiler les bases qui le compose : on peut dire que c’est par machiavélisme, le système politique veut garder une certaine opacité pour garder un contrôle des citoyens mais on peut aussi dire que c’est pour garder une certaine cohérence, pour qu’il ne soit pas disséqué.
Ces résistances sont d’autant plus forte dans l’espace politique que c’est un domaine profondément inégalitaire : certaines ont des positions plus élevés et ils n’ont pas intérêt à ce que les rouages du système soient dévoilés.
La tâche de la sociologie politique est d’analyser la campagne d’un homme politique et toute la communication utilisée pour construire une aura et dominé son parti. Cela déconstruit ce que l’homme politique cherche à construire. Une autre branche de la sociologie politique cherche à déconstruire les partis pour comprendre les différentes branches et cela va à l’encontre du discours de l’unité des partis politiques.

1-      Du regard profane et engagé au discours savant.

A-    Les différents points de vue portés sur le politique.

-> Le discours de l’acteur engagé. Ce type de discours provient de militants de parti ou d’association, d’élus ou d’intellectuels engagés dans une cause particulière.
La particularité de ce discours est qu’il est fait pour convaincre son interlocuteur. Pour convaincre, il tente souvent de justifier l’action passée, l’action présente et l’action future. Les analyses que produisent ce genre d’acteurs sont toujours biaisés, partielles et partiales.
Exemple : Taire les divergences internes au sein d’un parti ; produire un discours déjà prédéfini, dans un gouvernement on fait preuve de solidarité envers les autres ministres ; quand pour expliquer une situation, on cherche une cause à un problème qui va produire le plus de soutient et arranger les membres du milieu, si il y a un problème dans l’agriculture, un membre du syndicat agricole rejette la faute sur l’Etat plutôt que sur des conflits entre des producteurs ; imputer à son quand les résultats positifs et rejeter sur l’autre camp les résultats négatifs.

-> Le discours médiatique.
Des journalistes professionnels sont spécialistes du politique. Leur rôle est de rendre compte des évènements politiques, de produire des interprétations mais surtout de fournir des grilles de lecture qui vont permettre au lecteur de se faire sa propre opinion. Or, il y a une dérive possible (et fréquente) : si le discours médiatique se justifie par le fait de devoir informer les citoyens, il y a aussi une logique de la communication pour la communication, pour faire de l’audience. La particularité du discours médiatique est qu’elle doit retenir l’attention du spectateur car si l’audience baisse, le média disparait. C’est une logique de survie.
Tout ça renvoi revoie à des questions de la sociologie des médias : qu’est-ce qu’une information ? Comment sont sélectionnées les informations ? Qu’est-ce qu’on définit comme une information ? Quel impact sur les récepteurs ? Comment les acteurs politiques (dont le militantisme) vont adaptés leur stratégie en fonction des médias ?
Exemple : L’image du président en 2007 avec l’image de Sarkozy qui prenait de la place, auparavant le président restait plutôt en second plan. Les journalistes ont débattu de ce sujet : est-ce qu’on peut ne pas relayer l’information ? Si on le relai, est-ce qu’on est pas en train de faire le jeu d’une communication politique ?
Des journaux se déclarent indépendant et privés mais qui ont un lien très fort avec le monde des affaires et avec le monde politique car ces journaux sont privés, justement.
Il existe des passerelles entre le sociologue et le journaliste dans le traitement de l’information politique.

=> Le discours savant.
Normalement, dans le principe, le discours politique et le discours scientifique doivent être différent. Le chercheur doit suspendre son jugement, il doit être neutre. L’éthique du cherche en SHS exige qu’il suspende ses préférences morales et idéologiques. Pour cela, on met en place une méthode de recherche et des concepts rigoureux, ainsi que par une réflexion constante sur la validité des résultats.
Cette séparation entre le scientifique et le politique pose plus de questions que cela : la question de l’usage de savoir savant, notamment. Le savoir sociologique peut-il servir à défendre des causes politiques : il y a un désaccord entre les chercheurs eux-mêmes. Les chercheurs peuvent être engagés personnellement mais aussi professionnellement en cherchant sur des choses qui leur tient à cœur.
TOURRAINE prône l’intervention de la sociologie en politique. L’un de ses domaines de recherche est la xénophobie et le racisme. VIERWORKA a participé à la préparation de la campagne de AUBRY . C’est critiqué car il y a le risque de confondre logique militante et logique scientifique. Malgré le débat, les écrits sociologiques ne sont pas aussi utilisés que ça en politique.
BOURDIEU dénonce que le milieu militant et le milieu politique instrumentalise le discours savant. On ne peut pas avoir un discours savant isolé du champ politique, le discours savant est diffusé et donc il va être réutilisé à des fins politiques, culturelles ou administratives selon la pertinence de l’étude et selon le sujet. Il faut être vigilant dans les usages des termes scientifiques dans le discours politique et des détournements qui peuvent être faits.
A quoi ça sert de produire ce discours savant sur le monde politique ? On peut penser que cela peut améliorer le système politique en décrivant les dysfonctionnements et en mettant en lumière les enjeux de pouvoir. Rien n’est moins sûr. Mais cela sert à désenchanter le monde, cela dissipe les apparences et les illusions, c’est une des fonctions du discours savant sur le monde politique, avec tout ce que cela a comme effet pervers.

B-     Les différents discours savants.

=> Le discours de la science politique.
En France, cela a donné le nom à l’école Science Po même si on n’y fait plus beaucoup de sciences politiques. C’est une discipline universitaire autonome : on peut devenir professeur de science politique, il y a une agrégation. Mais cette discipline est multiforme, elle recoupe plusieurs sous-disciplines : l’histoire des idées et de la pensée politique (philosophie politique), la sociologie politique, les institutions et les relations internationales, l’administration, la gestion et les politiques publiques et la méthode des sciences sociales. La sociologie politique n’est qu’un élément de la science politique parmi d’autres.
La science politique émerge à la fin du XIXe siècle et elle nait du droit public pour progressivement s’en autonomiser. C’est donc une discipline récente.

=> La philosophie politique.
Elle réfléchit sur un idéal et pas sur la société actuelle. Elle réfléchit sur ce que devrait être un système politique juste, efficace et moralement satisfaisant. On est dans la quête d’un absolu et tous les philosophes imaginent la cité idéale, ils sont dans l’utopie.

=> Le droit constitutionnel (et l’analyse juridique).
Il a pour fonction de décrypter le fonctionnement des institutions publiques et pour se faire elle s’appuie sur l’interprétation des textes constitutionnels pour comprendre l’intention de l’administrateur.
Il y a deux différences par rapport à la sociologie : c’est uniquement basé sur l’analyse de texte de loi et de la constitution tandis qu’en sociologie on considère que le politique ne se restreint pas aux lois ; le droit considère le texte de loi comme un savoir neutre, il ne s’intéresse pas aux conditions sociales de la production de la loi.

=> La sociologie politique.
Elle s’intéresse à ce qui « est » et pas à ce qui devrait être, elle étudie des phénomènes sociaux, collectifs, qu’on ne pourrait pas comprendre pas la seule analyse des individus.
GAIT analyse le charisme de DE GAULE et l’utilisation qu’il en fait dans sa carrière politique et notamment aux référendums qu’il provoque à la fin de sa carrière. Elle explique que l’on considère que c’est une mise à l’épreuve du charisme du général et que cette explication ne suffit pas, elle est trop psychologisante. Elle montre que c’est aussi les rapports de force dans son parti politique qui ont amené à cette stratégie, cela légitimait son action.
L’apprenti sociologue politique doit prendre garde à deux risques liés à deux prénotions : le manque d’objectivité risque de généraliser par rapport à sa propre expérience ; l’ethnocentrisme fait que l’on risque de juger selon ses propres valeurs liées à une culture politique ou à une culture de classe.
Pour éviter ces biais, on cherche à avoir des fondements théoriques importants pour construire l’objet et l’on cherche à faire un effort de distanciation lorsqu’on recueille des informations empiriques. Pour cela, il y a deux méthodes principales, avec une méthode qualitatives (travail de terrain en suivant des manifestations) en cherchant la bonne distance d’observation et avec une méthode quantitative (en analysant les votes et les intentions de votes).
Une partie importante de la sociologie politique est la sociologie électorale, qui est représentée par le laboratoire CEVIPOF : il y a un grand intérêt des médias et cela finance des recherches. Cette sociologie a donc le plus de financement et le plus de visibilité dans la sociologie politique.
Il y a aussi des études sur l’influence des médias dans les élections (LAZARSFELD), qui s’intéresse au rôle et à la nature des partis politiques, qui s’intéresse à la bureaucratie d’Etat, sur les régimes politiques, sur les idées et les mouvements politiques, etc.

Quelques noms de sociologues importants en sociologie politiques :
=> Les pères fondateurs : WEBER fait partie des personnes qui instituent la science politique comme discipline. SIGFRIED publie en 1913 tableau politique de la France de l’Ouest.
=> Les sociologues plus contemporains : la sociologie anglo-saxonne a eut beaucoup d’influence dans les 60/70’, elles ont contribué à unifiér les problématiques au dela des frontières nationales. En France, BOURDIEU, CROZIER, OFFERLE et GAXIE. Il y a aussi une influence des anthropologues comme ABELES où il a fait de l’ethnographie dans un village du Limousin, il a aussi fait l’anthropologie de l’Union Nationale ou BALANDIER qui a travaillé sur l’Afrique à la fin de la colonisation et pendant la décolonisation, critiquant le colonialisme.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire