vendredi 10 février 2012

Moderne 09 - 02 (cours 1)





Livres et écrits dans la France d’Ancien Régime


Introduction


L’idée est de voir la société d’Ancien Régime à travers le filtre des rapports que cette société entretenait avec l’écrit. On débute avec l’invention de l’imprimerie qui présente la modernité de notre période. Cela est d’autant plus valable qu’elle se diffuse très rapidement dans toute l’Europe et dès le XV° siècle, c’est une industrie présente dans toute l’Europe et elle devient un métier avec son univers professionnel. Les objets issus de ce métier sont donc extrêmement présents dans la société.
De manière plus large, ce cours se centre sur la place de l’écrit dans l’Ancien Régime. Cette pratique est rare, plutôt réservée aux clercs essentiels tant à l’Eglise qu’au pouvoir séculier,  en-dehors de ce monde d’Église (qui comprend le monde savant), on a le monde princier et aristocratique et enfin le monde des marchands avec les comptabilités écrites. L’écrit est donc important pour la domination mais n’est donc activé que par un petit monde.

Au XIX° siècle, l’alphabétisation de masse fait du monde celui où l’écriture et la lecture sont la norme. C’est là que l’Ancien Régime trouve son originalité. L’alphabétisation se répand mais reste minoritaire alors que pourtant cela reste essentiel pour progresser en société (particulièrement avec la puissance de l’Etat : publications royales, administrations fonctionnant sur l’écrit et obligeant les administrés à agir comme tel).  Une population partiellement alphabétisée alors que ce monde gagne en écrit. C’est en ville que se trouve donc le siège des pouvoirs, lieu de résidence des élites et siège des lieux d’éducation.  L’écrit est partout dans ce monde urbain, mais il y a des partages sociaux liés à la maîtrise de l’écriture et des partages sociaux liés à la pratique des demandes des professionnels. L’écrit se distingue mal des imprimés et les deux sont très liés.

Ce cours essaye de regarder la société d’Ancien Régime via trois spécificités : alphabétisation accrue mais inégale, écrit de plus en plus utilisé et nécessaire, et culture de l’imprimé en développement.
L’idée est d’associer autour des usages de l’écrit plusieurs usages de l’histoire.

Une des questions générale est de déterminer les conséquences d’une pratique écrite de plus en plus courante. On envoie donc balader un certain nombre de raisonnements incorrects : l’évidence de l’impact des livres et des grands livres sur la société, l’augmentation de la présence des livres leur donne forcément plus d’impact. Ce présupposé se retrouve beaucoup en histoire culturelle, mais aussi en histoire politique (les grands philosophes seraient populaires). Une autre fausse évidence est celle de l’histoire culturelle bien séparée dans la société entre élites et classes populaires. Il y a certes une inégale répartition des livres et de l’écriture. Mais cela n’est pas l’unique critère, on constate d’ailleurs que ce sont les mêmes livres mis à la disposition de lecteurs populaires. Face à ses évidences discutables, on va retrouver un certain nombre de questions.
Comment mesurer l’importance des livres dans tel ou tel milieu social ? Recenser les bibliothèques dans l’héritage ne suffit pas. Certains louent leurs livres ou les empruntent.
Comment les livres et les imprimés en général s’adressent-ils à des lecteurs ? On tourne autour des écrits en tant qu’ils sont des objets produits en tant que logique commerciale. Un pamphlet de quelques pages mal imprimé dans une période d’instabilité politique, ne s’adresse pas et ne cherche pas son lecteur comme un gros volume de théologie. Les lecteurs ne seront pas radicalement différents. Les livres sont des objets qui au cours de leur processus de production ont différents objectifs. Objectifs commerciaux destinés aux élites / aux classes plus modestes, … Les livres programment donc d’une certaine manière leurs lecteurs mais programment aussi un certain type de lecture. Les pamphlets de la Fronde associent des textes qui peuvent se chanter sur des airs connus inscrits en dessous. Du coup, par la chanson cela peut transmettre les textes à des individus analphabètes.
Qu’est ce que les individus font avec les ouvrages à leur portée ? Ici la notion d’appropriation est importante, les individus ne reçoivent pas passivement les notions des livres qu’ils lisent, mais la manière dont ils la lisent est variée car informée par des pratiques (lecture à haute voix / lecture silencieuse). Ginzburg, historien italien étudia un procès d’inquisition qui concerne un pauvre meunier arrêté pour tenir des propos taxés d’hérésie. Or ces propos donnent accès à l’esprit de réflexion du meunier qui s’était fait une représentation du monde originale mais différente de l’Eglise catholique. Son bricolage intellectuel s’était fait par des lectures. Il possédait des livres et en avait lu certains qui étaient savants. Chaque lecteur fait une lecture originale de ce qu’il lit. Cela renvoie donc à des pratiques de lecture.  Ces deux dernières questions font du livre une toute puissance ce qui permet au lecteur de s’inventer et d’inventer ce qu’il fait de son livre. Le problème est celui de la réception des ouvrages avec l’éternel regret des historiens de traces rares de réception. On a des traces mais pour autant ces traces sont écrites et ont donc une logique propre pas toujours fiable donc.
Quel rapport y a-t-il entre les écrits et les rapports des individus au politique ? La réponse la plus courante donne une analyse en termes de public et d’espace public. Les livres se répandant auraient inventé un public, qui serait une force et qui produirait une opinion publique. L’espace public des livres valant comme le lieu où devrait se discuter les sujets d’intérêts communs. Cette invention de l’espace public se produit entre l’assimilation de deux réalités différentes : la politique serait la chose publique (res publica) mais de l’autre coté, cette vieille idée de la chose publique forme un public de lecteurs et de spectateurs. Avec la montée en puissance des livres, s’est monté l’espace public, le tout aboutissant à l’opinion publique (cf Jurgen Habermas, L’espace public).

L’espace de l’imprimé, à partir du moment où les livres se répandent en grand nombre, ces livres créent un espace régit par un certain nombre de codes et de lois. Ce lieu nouveau, les pouvoirs vont chercher à fortement l’investir (pamphlets politiques répondant aux pamphlets du pouvoir). En même temps, ce lieu ne va pas être investi que par les pouvoirs mais aussi par le peuple.
Autre notion, le couple politisation et dépolitisation. Certaines forces vont se servir de l’espace de l’imprimé pour produire de la dépolitisation. C’est un sens pour expliquer l’avènement de la littérature. Le divertissement va de paire avec la littérature. Cette littérature qui va croissante va avec l’affaiblissement du fait que les choses intellectuelles doivent avoir un rapport nécessaire avec la politique et les choses publiques.

Les phénomènes religieux peuvent aussi être passés au filtre de l’écrit. Pour Luther, chaque chrétien doit lire la Bible, pas pour l’Église catholique. Le livre a souvent un caractère religieux surtout que les livres de piété sont très nombreux à être publiés. L’imprimerie émet de nombreux textes religieux. L’apparition du livre, le phénomène du livre a longtemps été pensé dans on utilité pour propager la foi. Il est rapidement devenu le support de pratiques de piété nouvelle. En plus, cela permet aussi de se combiner aux images pieuses.

Quelles sont les conséquences ? Il est certain que ça ait donné du travail à un certain nombre de gens surtout si on prend une acceptation large : métiers du livre (imprimeurs, libraires et typographes), colporteurs et professionnels des lettres (de l’écriture et de l’écriture des livres : écrivains publics, enseignants, auteurs, …). Les écrivains ne vivent pas de leurs livres, mais ils en vivent par  le prestige associé à la réalisation intellectuelle d’ouvrages, ce qui leur permet de trouver des emplois et de leur donner un statut dans la société. Ce prestige de l’écrivain n’est pas donné à l’époque moderne.


Casse d'imprimerie où l'on rangeait les caractères métalliques



Aux premiers temps de l’imprimé


On s’intéresse ici à l’époque allant de l’invention de l’imprimerie jusqu’aux environs de 1550.  Le contexte dans lequel né l’imprimerie éclaire ses buts. Les objets nés de l’imprimerie sont ??? On peut tenter aussi de montrer la rupture du livre imprimé à l’époque où le livre manuscrit est encore fortement présent.


I.                   L’invention et ses contextes

1.      Les caractéristiques de l’invention

A.     En quoi ça consiste ?

On recopie des textes avec des outils métalliques. On se sert de petits bâtonnets de métal qui portent à leur extrémité le signe typographiques, ils forment tous des mots, on met cette forme en contact avec une feuille de papier par l’intermédiaire d’une presse. Il faut donc beaucoup de caractères identiques pour donner une forme. L’utilisation d’une technique métal permet de caractériser cette forme.

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