mercredi 26 octobre 2011

Moderne 25 - 10

Précédemment : Moderne 18 - 10











Travailleurs de la terre et de la mer






Les travailleurs de la terre et de la mer sont majoritaires sous l'Ancien Régime car le secteur est lui-même dominant. Ce sont des travaux durs, soumis au climat, le rapport au milieu naturel rend l'homme plutôt soumis à la nature. Ce travail est souvent déconsidéré, même si le travail agricole est un des rares travail manuel qui ne soit pas ignoble. Un noble peut travailler sa terre sans problème, en pratique cela n'a pas lieu, un paysan même riche quant à lui ne dépasse jamais la frontière de la notabilité. Pourtant ce travail de la terre à l'attention des lettrés dés le XVII° siècle avec le Traité d'agronomie d'Olivier de Serres. A partir du développement de l'économie politique et spécialement de l'école physiocrate, il y a une grande revalorisation du travail de la terre, puisque dans cette théorie, la seule vraie production de richesse vient de la terre. On a donc une accentuation de cette valorisation du travail de la terre, mais pas de ceux qui la travaillent si ce n'est les grands propriétaires terriens.



  1. Les cadres spatiaux et temporels du travail de la terre


Même si la nature domine largement les hommes, les paysans ne sont pas passifs, ils construisent des lieux, des paysages aménagés. Ces espaces travaillés par les hommes sont souvent divisés en trois zones distinctes, de plus ou moins grande proximité avec le village. L'ensemble de ces zones formant le finage villageois, plus grand en méditerranéen qu'en montagne.


L'hortus, au plus près des villages pourrait équivaloir à notre jardin. Ce sont des zones encloses où se font les expérimentations paysannes. Sur ces parcelles à dimension limitée, on y met beaucoup de fumier, on y cultive les légumes traditionnels (poireaux, carottes, choux, navets, pois, …) et où on y expérimente les nouvelles plantes (maïs, patates, …) et les plantes fourragères. Dans l'hortus chacun fait se qu'il veut, il n'y pas de règle dans cette zone.


Dans l'ager, qui est la zone des grandes cultures, la réglementation communautaire y domine. C'est la zone la plus importante en surface du finage villageois.


Le saltus est la zone la plus éloignée de l'habitat, avec des landes, des broussailles, des taillis, des forêts, des bois, … Cette zone qui constituent encore un tiers de la surface des finages est essentielle à la nourriture et à la vie des ruraux (bois, animaux, lieu de pâturage, …).. Ces terres sont communales et au XVII° siècle, il y a des conflits croissants sur l'appropriation de ces terres, les seigneurs et les grands propriétaires cherchant à s'accaparer ces terres au détriment des plus modestes.


En 1780, en Beauvaisis, les labours forment 81% du finage communal, les bois en représentent 5%, 4% de terres labourables de non valeur, 1,6% de friches et 8,4% de divers. Les labours prennent une part écrasante. Avec la mise en labours de terres venus du saltus, les terres cultivables augmentent et jusqu'à 10% des terres furent récupérées. Il y a une tension autour des céréales soumises aux aléas climatiques, aux labours importants mais au rendement assez faible. Même dans les zones diversifiées, les céréales dominent les cultures (cas des méditerranéens). En général, entre 60% et 80% des terres sont réservées aux céréales.




  1. L'organisation du travail des champs


Généralement, on distingue quatre grands types de paysages en France.

L'openfield qui domine dans tout le bassin parisien, la France de l'Est et le centre de la France. C'est là où les droits communautaires s'appliquent, les pratiques communautaires y sont aussi les plus fortes. Ce pays est largement dominé par les paysages groupés. Chaunu parle d'un « monde plein ». Les paysans devant faire les mêmes choses en même temps, il y a organisation et répartition du travail des champs, le tout régulé par la commune. Deux systèmes s'imposent : l'assolement triennal et l'assolement biennal.

Dans l'assolement triennal, la partie enclavé du finage est répartie en trois soles. La première peut être celle de la jachère pour le repos de la terre mais elle est travaillée pour recevoir les cultures des années suivantes. On lui fait 4 labours, on l'enfume et on la marne avec l'apport de terres fertiles supplémentaires dans la mesure du possible. Les divers ont lieu la seconde année, comme le froment par exemple. La dernière année, se sont les blés de printemps comme l'avoine, qui nécessite un seul labour. Il est interdit pour ses paysans de faire des cultures différentes sur leurs soles.

L'assolement biennal plus sur les terres pauvres du midi et de la France centrale, on voit la simple alternance jachère et blé d'hiver. Les terres n'étant pas assez riches pour supporter les blés de printemps. Chaque année, la moitié de la terre est laissée sans culture, les rendements sont plus faibles que dans les lieux d'assolement triennal.

En réalité, il y a une pluralité des situations et ce schéma est assez caricatural. Par exemple, en Auvergne, les alternance sont beaucoup plus complexes.


Les pays de bocage, dont l'aspect visuel est différent, les champs sont entourés de haies. Ils sont plutôt du coté de la France de l'Ouest, le Pays Basque, … L'habitat est plus fréquemment dispersé et la combinaison est plus importante entre céréales et élevage que dans les openfields. Les terres chaudes font les cultures céréalières avec toujours ce repos de la terre, mais avec l'élevage, la mise en fumier des terres est un atout permettant de ne pas ravager les terres en cas d'aléa climatique.


Les pays méditerranéens ont des cultures plus diversifiées du fait de la variété des terres elles-mêmes. On trouve des zones très intensément cultivées avec la concomittance sur une même parcelle de plusieurs types de cultures. On trouve des céréales, des arbres fruitiers, … Il y a un étagement des cultures selon l'altitude et selon les parcelles. A coté on trouve des terres plus arides où la seule solution reste l'élevage extensif. Ce sont des zones d'habitat surtout groupé.

Avec l'époque moderne, la production de la culture de l'olivier surtout dans le Languedoc. Mais le grand hiver de 1709 stoppa cette extension vers le Nord.

C'est aussi l'essor du murier pour son utilisation du ver à soie dés le XVI° siècle mais surtout en parallèle du développement de l'industrie de la soie au XVII° et XVIII° siècle. Par exemple, dans le Vivaret, la production est multipliée par 4. Le travail du murier est un gros travail de paysan, l'arbre demandant beaucoup de soin et le fruit (la soie) est récupérée par les propriétaires. La production est très rentable et son produit par hectare vaut 18 fois le produit d'une hectare de blé et de 3 fois les produit d'un écart de vigne.

Se développe aussi fortement le châtaignier dont on fait de la farine et qui constitue la base de l'alimentation paysanne. Toujours dans le Vivaret, la culture du châtaignier double au XVIII° siècle sur les terres les plus haute.

On trouve aussi une grande place des plantes tinctoriales dans ces régions. Malgré le recul du pastel à Toulouse qui fut concurrencé avec le développement des relations internationales et l'apparition de l'indigo venu des Indes. A la fin de l'époque moderne, l'indigo est résiduel.


Les pays de montagne ont des ressources céréalières très limitées donc ce sont des zones qui par nécessité vont développer les échanges, en développant comme monnaie d'échange l'élevage qui permet de la viande et des produits laitiers. Cette production est donc échangée contre les céréales des zones frontalières.


  1. Les travaux et les jours


A. Les phases du travail des blés


Tout les traités d'agriculture indiquent au moins dix façons de mettre en œuvre pour bien cultiver les blés. On commence par les épierrer puis les amender et les fumer : on les charge en fumier pour améliorer la production des terres et cela chaque année. Ensuite vient le labour avec des outils différents selon la région (charrue au Nord, araire au Sud) avec une grande utilisation de la houe pour débarrasser les mottes (émotter). Cette étape est très représentée.

Ensuite vient le temps de la semaille. Suivi de l'étape où l'on herse avec l'outil du même nom, ???. On sarcle alors, on nettoie en arrachant les mauvaises herbes pour laisser pousser les plantes que l'on compte cultiver.

Vient l'époque de la moisson, il faut couper les plantes, les lier, les rassembler et les transporter. Ensuite il faut les battre avec le fléau pour séparer la graine de la coque qui l'entoure. Enfin il faut vanner les blés pour séparer le blé.


Il existe de multiples représentations de la moisson faite par les hommes et les femmes et les enfants préparant les bottes. Il y aurait donc eut des spécialisations des travaux : des moissonneurs, des batteurs, des sarcleurs, des échardonneurs, …


B. Les phases du travail des vignes


Enfin il existe l'entretien des vignes se développant dans de nombreuses régions mais avec des qualités variables selon les régions. Son travail est encore plus prenant que celui des céréales. La première étape est le taillage de la vigne au début du printemps. C'est difficile car il fait froid, les hommes coupent, les femmes et les enfants ramassent. Il faut être précis avec la serpe. En même temps, il faut faire le provignage, créer de nouveaux ceps, en enterrant les vieilles souches. Pour cela il faut fumer de nouveaux les terres.

En mars c'est le premier labour profond de la vigne pour aérer la terre autour des vignes. Cela prend trois semaines et doit se faire à la main, avec la houe ou la pioche. C'est donc aussi intensif. Il faut alors fixer les échalats, mettre des tuteurs pour la vigne. Quand elles poussent, il faut les attacher à l'échalat avec de la paille.

En mai-juin a lieu la floraison très importante puisque 100 jours plus tard elle détermine la vendange. Il faut ensuite biner la terre, le second labour de manière légère avec la houe.

En juillet, il faut couper les bourgeons pour mieux faire pousser les grappes de raisins.

En août-septembre, on vendange et cela demande une importante main d'œuvre. La date est importante, fixée par le seigneur et est pour tous la même. La main d'œuvre doit être répartie. Les coupeurs de grappes sont les femmes et les enfants. Ceux qui ramassent avec les hottes, appelés hotteurs, sont des hommes payés les doubles des femmes et des enfants. Ces travailleurs sont saisonniers souvent, ils sont logés sur place et on commence à faire le vin dés le premier jour de la vendange. Cela doit se faire vite mais les pressoirs étant propriété seigneuriale, il faut payer des droits d'utilisation. Cet investissement n'est pas possible pour de petits paysans.

Le vin est ensuite mit en tonneaux et plus tardivement en bouteille.

Cela montre l'intensité du travail de la vigne et la cadence, comme l'entretien des céréales, qui en résulte pendant au moins neuf mois.


La journée de travail tend le plus à correspondre à la journée naturelle d'ensoleillement et connaît d'importantes variations selon les saisons. Il faut se méfier, le travail paysan n'est pas entièrement dicté par le temps. Si les conditions climatiques se détériorent, on peut avancer où reculer les étapes d'entretien des récoltes voire travailler la nuit. Il y a alors des revendications récurrentes pour limiter la journée de travail. Les ouvriers vignerons revendiquent de travailler huit heures par jour auprès du Parlement de Paris. Les conflits sur le temps de travail passe aussi par la question du temps de transport qui doit être ou non décompté du salaire, concernant surtout les saisonniers.


  1. Le saltus


Cet ensemble de mauvais pâturages, des prairies, des friches, des bois, des taillis, des forêts, … Toutes ces terres non-céréalières qui néanmoins sont essentielles à la vie des communautés surtout des plus pauvres. Sans ces terres, pas de bois de chauffage, de charpente, de fruits, de gibier, … Il est donc essentiel.


A. Le domaine sylvestre


Ce domaine représente à peu près 25% de la surface de la France et cela tombe à 15% en 1800.


On trouve des hommes dépendant de ce domaine, les artisans du bois parmi lesquels les sabotiers, les vanniers, les boisseliers, les cercliers, les charrons, les corroyeurs (prélevant les écorces), les sieurs de long (découpant le bois pour les charpentes), …

On trouve aussi beaucoup d'éleveurs et de dresseurs de bétail qui ne peuvent pas rester sur les terres enclavées. Souvent ce sont les tâches des jeunes enfants. On croise aussi les mineurs et les carriers en liaison avec les industries utilisant le bois comme source d'énergie. On trouve aussi les chasseurs bien que ce soit généralement le privilège des nobles et en conséquence, les paysans deviennent des braconniers. Enfin on trouve aussi ceux qui produisent le charbon de bois, essentiel pour chauffer la ville et aux industries du feu. Ce sont des bûcherons, des charbonniers qui amènent cela auprès des acheteurs. Ces derniers sont assez nomades, se déplacent avec la progression des chantiers et vivent dans des huttes en forêt.


Il y a là aussi un étagement dans l'année des activités.

Début de l'hiver, les bucherons, les fendeurs arrivent. Viennent ensuite les charbonniers qui doivent attendre deux mois pour le séchage du bois avant la cuisson puis les voituriers de charbon. La construction des meules de bois demandent un savoir-faire précis pour éviter les incendie de forêts. Progressivement, ces populations vont se sédentarisées vers la fin du XVIII° siècle et au cours du XIX° siècle.


B. L'estran


Il s'agit des littoraux, excroissance des finages des populations côtières. On y trouve beaucoup d'activités réalisées par les femmes et les enfants : pêche à pied (vers 3 – 4 heures du matin), récolte du sable marin servant d'engrais et aussi du goémon servant aussi d'engrais, élevage d'huitres, développement des salines. Il y a donc une pluriactivité puisque cela s'associe aux cultures de la terre.


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