jeudi 5 avril 2012

Contemporaine 02 - 04 (cours 7)

Précédemment : Contemporaine 19 - 03


Le Che et Castro



La Révolution cubaine (1956 – 1961)


Seule Révolution communiste en Amérique Latine, la Révolution cubaine reste aujourd’hui contestée. En effet, il n y a pas eut ensuite de grands progrès sociaux (alphabétisation, sécurité sociale, indépendance vis-à-vis des USA, …) mais en même temps, on a eu un régime autoritaire, une dictature répressive surtout à l’égard des adversaires. En 1991, avec la chute soviétique, le régime perd son économie et se sont des économies parallèles qui s’instaurent pour faire survivre le pays. Avec la Révolution mexicaine, c’est la seule véritable Révolution aboutie. Cette Révolution cubaine commence comme la Révolution mexicaine a finit.
La Révolution cubaine aura un impact direct plus important que la Révolution mexicaine, en inspirant beaucoup plus les acteurs qui voulaient imiter cette Révolution ailleurs, les guérilleros. Ils s’inspireront en particulier d’Ernesto « Che » Guevara. L’impact va aussi se ressentir dans tous les secteurs conservateurs d’Amérique Latine et pour les USA qui y voient le virus communiste se propager en Amérique. Ainsi des régimes nouveaux vont s’armer, aidés par les USA et prendre le pouvoir par des coups d’Etats militaires.


I.                   La lutte contre Batista : socialisme, nationalisme ou démocratisme ?

1.      Cuba : une « indépendance frustrée »

Cuba reste espagnol quand la monarchie s’effondre dans les autres pays. L’île reste espagnol tout le long du XIX° siècle jusqu’au moment où les créoles dans les années 1890 revendiquent une indépendance. Une guerre d’indépendance commence alors qui est difficile. Les créoles ont le soutien massif des USA et finissent donc par gagner. Mais la victoire est entachée par le fait que l’île quitte la dépendance de l’Espagne pour la dépendance vis-à-vis des USA.

Cette domination américaine est avant tout politique et militaire avec l’amendement Platt de 1901 dans la constitution cubaine qui fait de Cuba un quasi protectorat des USA. L’intégralité de l’économie cubaine est financée par les USA et l’essentiel des entreprises sont possédées par les USA. Cette situation d’un véritable impérialisme américain va nourrir à Cuba un très fort anti-impérialisme national, accompagné dès ses débuts d’un idéal de justice sociale. Surtout que parmi les Cubains même on a des grandes disparités de richesses et ces inégalités se superposent à l’anti-impérialisme et au nationalisme. L’image de ce combat c’est d’abord José Marti décédé en 1895, qui incarne l’espoir d’un Cuba libre et indépendant. Son image se maintient depuis l’indépendance et de Cuba et va être ravivée sous Fidel Castro.

Cela se double d’une dictature de Machado en 1910 et qui est renversé en 1933 par un mouvement qui se veut révolutionnaire et qui se compose d’étudiants, de militaires et d’ouvriers qui font grève. Ce mouvement a son leader Fulgencio Batista au sein d’une coalition, sergent dans l’armée, qui va ouvrir le système politique à tout un tas de personnes, mais exclus ceux qui sont liés aux USA. Ce mouvement qui revendique « Cuba, pour les Cubains » met en place des réformes fortes, suppression de l’amendement Platt, instauration d’un salaire de base pour les travailleurs de la canne à sucre, mise en place d’un projet de réformes agraire, soutien à la syndicalisation, autonomie de l’université, droit de vote aux femmes, … Les militaires vont vite prendre leurs distances avec ces réformes innovantes et leurs leaders étudiants. En conséquence, en 1933, Batista appuyé par les militaires va amener une forme de dictature beaucoup moins libérale. Les mouvements étudiants d’Amérique du Sud vont malgré tout frapper Cuba de plein fouet, surtout que les leaders étudiants mélangent le tout avec l’esprit de Marti. Ils vont alors se soulever et former le Parti Cubain Révolutionnaire Authentique dirigé par Antonio Guiteras et dont un des membres éminent est Fidel Castro. Leur but est de faire tomber Batista par les armes.

Le régime très autoritaire après avoir réprimé l’essentiel de l’opposition se stabilise, s’attire les bonnes grâces des USA et peut alors se rouvrir avec la promulgation en 1939, d’une nouvelle constitution plus libérale (reconnaissance du droit de grève, suffrage universel, extension des libertés civiques et politiques, …). En 1940, de véritables élections sont organisées, très peu truquées. Or la politique du Parti Communiste est de faire front commun avec les partis bourgeois libéraux locaux. Du coup, le parti communiste s’allie avec Batista et celui-ci les gagne. La gauche cubaine ne le pardonnera jamais aux communistes, surtout qu’en 1952, des élections sont organisées, Batista les perd mais fait un coup d’Etat et se maintient.
C’est donc un mouvement révolutionnaire étudiant qui se scinde du parti communiste pour agir.

2.      Le mouvement du 26 juillet 1953

Un petit groupe d’étudiants et de militants du parti révolutionnaire (150 environ) prennent d’assaut une caserne à Santiago, seconde ville de pays. Fidel Castro les mène, il est avocat, ancien leader étudiant et milite pour un politicien radical, Chibás, une caricature de Péron. L’assaut est un véritable échec, mais il va rester dans les mémoires comme un premier acte de guerre contre Batista qui sera très médiatisé internationalement surtout par un discours de Castro lors de son procès : « L’histoire m’absoudra ».
Cette expérience n’a pas de conséquences politiques immédiates puisque les leaders sont exilés, Castro ira au Mexique où il fonde le mouvement du 26 juillet (M26). Placé sous l’égide de Marti, le mouvement se considère comme nationaliste et démocratique. Il se donne pour objectif la lutte armée contre le régime de Batista. Castro, Raul et Guevara organisent depuis le Mexique un débarquement à Cuba qui a lieu en décembre 1956 à bord du Granma. Presque tous sont tués sur les 80 hommes embarqués. Les 15 survivants montent dans la Sierra Maestra et s’y cachent.

3.      La Sierra Maestra

Les forces en présence sont la Plaine, M26 urbain antenne de l’idéologie de Castro et qui connaît un certain succès dans la petite bourgeoisie et chez les étudiants. C’est l’appui politique en ville.
De l’autre coté, on a la Montagne, la Sierra. On y trouve Castro, Raul et Guevara qui sont dans un milieu purement paysan, très pauvre et où l’Etat major de la Révolution constitue leurs forces en se ralliant les paysans et théoriser une Révolution rurale. Les paysans par leur pauvreté, leur marginalité et leur éloignement des centres de pouvoirs, sont considérés comme la population que le pouvoir ne tient pas et donc le foyer de la Révolution, le foco. Ils se rallient les paysans en créant un Etat nouveau là où ils passent et en menant la politique qu’ils proclamaient. Ils se rallient les paysans en montrant l’application concrète de leurs réformes. Ces révolutionnaires de la Sierra, ces barbudos, mettent en place des politiques d’alphabétisation, de réformes agraires, … Mais aussi des réformes sécuritaires avec un pistage des espions, une répression des traîtres, …

Tout ça abouti fin décembre 1958 a une insurrection populaire organisée par les barbudos. Des milliers de personnes sont armées, formées par la guerilla à la prise des villes avec l’aide du M26. C’est un succès, les révolutionnaires arrivent au pouvoir.


II.                De la prise du pouvoir à la Révolution socialiste

1.      Vers la personnalisation du pouvoir

Dans ce nouveau pouvoir, aucun n’est communiste et personne n’est exclusivement castriste. C’est avant tout un mouvement révolutionnaire dont la majeure partie des soutiens vient de la plaine. Ces gens pas spécialement modérés poussent le président Urrutia à poser la peine de mort pour délits politiques, le législatif revient au premier ministre et une nouvelle constitution très poussée est promulguée.
Rapidement ce pouvoir est très contesté car la légitimité révolutionnaire revient surtout à la Sierra. Castro va alors progressivement s’imposer car il tient l’armée et qu’il nomme à des postes militaires clés ses hommes. Il cumule les titres militaires et Guevara et Raul en prennent aussi. En juin 1959, le nouveau président Dorticos, appelé la cuillère par sa soumission à Castro, est nommé mais tombe bien vite.

2.      La réforme agraire et la nationalisation de l’économie

En juin 1959, on met en place une réforme agraire sous l’égide de l’Institut National de ??? de la Terre (INRA) dans un pays essentiellement avec de grandes propriétés terriennes, ou toute l’économie agricole est exportatrice, où les Américains sont les principaux acteurs. L’INRA renverse la donne et se compose d’anciens barbudos exclusivement. L’INRA n’est pas responsable devant l’Etat et devient un second pouvoir, voire le principal. Par l’armée et par l’INRA, Castro va réellement s’emparer du pouvoir.
Cette réforme agraire va retourner l’organisation du pays. Elle sera rapidement contrôlée par l’Etat puis étatisée (en 1960, 40% des terres sont nationalisées) et doit assurer l’économie d’exportation. Au début elle reste modérée, mais la seconde vague de 1963 va plus vite et plus profondément dans une logique d’économie collectivisée.

3.      Opposition et répression

Dès 1959, il y a une dimension très répressive du régime cubain. On y applique facilement la peine de mort pour délit politique. On a donc une mise sous contrôle de la société avec un département de la sécurité de l’Etat qui est créé. Les Tchéquoslovaques viennent former les Cubains à l’espionnage. Cela aboutit à la création des Gusanos, les vers de terre, qui représentent dans l’imaginaire les contre-révolutionnaires. Cette conception devient outil de lutte contre les opposants et les déviants : artistes, hippies, homosexuels, … Ils sont placés dans des camps d’internement. Des Comités de Défense de la Révolution (CDR) créés par pâtés de maisons sont un encadrement de la population par la population elle-même. On rétribue tout dénonciateur. Les responsables de CDR sont rémunérés et valorisés à chaque fois qu’ils dénoncent.

On a donc une contradiction entre cette répression forte et contraignante alors que les tendances sociales du régime satisfont les classes populaires en plein amélioration de leurs conditions de vie. Mais cela est vite contrarié par le débarquement de la Baie des Cochons en avril 1961, un débarquement d’exilés cubains qui débarquent avec l’aide des USA. Neutralisés au bout de 4 jours, cela servira à Castro pour exterminer l’opposition. 100 000 suspects sont arrêtés en quelques jours et le régime assoit sa répression sur ce débarquement. C’est aussi ce débarquement qui fait passer Cuba à l’Est. Le régime est de politique communiste mais refusait le moindre contact avec l’URSS. La Baie des Cochons change la donne.

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