La fameuse photo des emplacements des missiles cubain
En 1959, Castro se rend à L’ONU pour défendre sa
Révolution et il s’y présente comme un nationaliste et anti-impérialiste mais
absolument pas comme un communiste.
Par contre, quand il veut rencontrer son équivalent de chef d’Etat, Eisenhower,
Castro est reçu par le vice-président, Nixon. La dictature menée à Cuba par
contre est une justification de la non-rencontre entre Eisenhower et Castro. Cette dictature provoque un fort exil
cubain aux USA avec une organisation pour renverser Castro. C’est là que se
fait la rupture et le glissement socialiste de Cuba. En effet, entretemps, Kennedy est au pouvoir et il soutient ce débarquement
de la baie des Cochons. Cuba est donc menacé par son voisin états-unien, donc
dans un contexte de guerre froide, le seul ami possible est l’URSS. Ainsi,
le fait que le régime cubain se présente comme Marxiste-communiste tient
uniquement à un contexte de guerre froide. Cuba n’est sinon nullement un régime
communiste, juste une dictature avec des politiques sociales.
D’ailleurs, cette
faible influence communiste se verra dès 1962,
avec la crise des missiles qui sera résolu par les USA et l’URSS sans Cuba,
alors même que les missiles sont sur le sol cubain. Fâché, Castro se
rapprochera brutalement de la Chine communiste et se détachera de l’URSS. C’est de là que Cuba devient un régime communiste exotique, incarnation
d’un communisme différent et détaché de l’URSS.
Tout est dans le titre de la seconde partie du film
Les mouvements de guérillas et les guerres en Amérique Centrale
Les guérillas et les luttes
armées deviennent les moyens d’action privilégiés de la gauche d’Amérique
Latine. Guérillas signifient petites guerres. Ce ne sont pas des guerres intra-étatique
mais infra-étatique, où les combattants sont fondus dans la population. Ils
utilisent un armement et des tactiques militaires devant assurer un harcèlement
permanent de l’ennemi.
Il n’y a pas d’armées, pas de batailles. C’est un harcèlement avec soutien de
la population très souvent. On fait de la lutte armée plutôt que de faire de la
lutte politique, de la lutte de masse, de la lutte idéologique, …
Tous ces mouvements sont
révolutionnaires.
Ils sont en faveur d’une construction d’une société communiste, se revendiquant
du modèle chinois maoïste, du trotskisme et se défiant de la politique de
Moscou qui a abandonné l’idée d’une révolution mondiale pour assurer la
sécurité du bloc. Enfin tous ces
mouvements admirent fortement l’expérience cubaine.
Aucun
mouvement n’invente la lutte armée, celle-ci existe depuis le XIX° siècle en
Europe comme en Amérique Latine. Ce qui est nouveau, c’est que ces mouvements
deviennent la principale solution d’expression des toutes les jeunes
générations. Pourtant aucun de ces
mouvements de guérilla ne prendra le pouvoir. En revanche, ces mouvements vont
devenir la représentation de l’espoir de la révolution pour tout l’Occident
et une bonne partie de l’Afrique. Ernesto Guevara deviendra d’ailleurs le
nouveau visage de la Révolution. Ce nouvel espoir est très important car il
fera peur au pouvoir en place, particulièrement aux USA, et seront une des
raisons de l’instauration des dictatures. Enfin ce sont des mouvements très jeunes qui vont former toute une
génération. Ainsi l’actuelle présidente du Brésil, Dilma Roussef, fut une
ancienne guérillera.
Ce qui lance ces mouvements de
guérillas, c’est la Révolution cubaine elle-même avec une première phase jusqu’en
1967 avec une explosion des guérillas,
incarnant l’espoir d’un changement. Cela se termine avec la mort d’Ernesto Guevara
le 8 octobre 1967 et la même année, Cuba se
rapproche de nouveau de l’URSS
et donc amoindrie son aide envers les mouvements de guérillas. Ces mouvements
de 1967 au milieu des années 1970, laisse les guérillas assez seules. A partir de là, les guérillas seront
uniquement situées en Amérique Centrale et sont abandonnées dans le reste de l’Amérique
Latine.
I.
L’impact de la
Révolution cubaine
1.
Le terreau de la lutte armée
Les contextes de leur émergence
sont divers. On peut noter les contextes sociaux très inégalitaires, renforcés par
l’entrée en crise fin des années 1950 de l’ISI. Il y a donc à la fois une crise
économique et une aggravation des inégalités sociales. En réponse, les
solutions politiques vont s’avérer aboutir systématiquement à des impasses.
A.
L’impasse des partis communistes traditionnels
Les partis communistes existent
depuis les années 1920 mais sont
groupusculaires
sauf au Brésil, au Chili et en Uruguay. Comme les partis communistes européens,
les partis communistes sud-américains
suivent la stratégie fluctuante de Moscou. Dans l’entre-deux guerres, ils
alternent entre les stratégies de lutte des classes et d’alliance au sein d’un
front populaire.
Après
1945, la ligne de l’Internationale pour les pays du Sud est de favoriser les
Révolutions nationalistes bourgeoises comme préalable à la Révolution
communiste. Malgré la guerre, Moscou fixe comme ligne la possibilité d’une
alliance de classes. Or dans la culture
de gauche des pays sud-américains, l’alliance de classes implique l’alliance
avec des bourgeoisies nationales, c’est l’alliance avec les USA, le grand
ennemi impérialiste. En conséquence, les partis communistes sont très modérés
en Amérique Latine, ils sont assimilés au centre et ne sont pas perçus comme
révolutionnaires. Ce réformisme jugé mou va discréditer les partis
communistes et cela va s’aggraver avec les coups d’Etats militaires des années
1960 et 1970. Tout le monde s’attendait à ce que les partis communistes avec le
soutien des syndicats résisteraient, mais ce ne fut jamais le cas. Tous les
partis communistes vont être écrasés et les militants vont fuir pour rejoindre
des mouvements armés et vraiment révolutionnaires.
B.
L’épuisement des populismes
Les
grands leaders décèdent durant dans cette période. Vargas est décédé en 1954, Perón a été chassé, … Bref les populismes s’effondrent quand l’ISI s’essoufflent.
On voit alors apparaître des
insatisfactions vis-à-vis des populismes : l’oubli des paysans au
profit des ouvriers et des urbains (d’où le fait que les guérillas sont souvent
rurales) et leur autoritarisme politique qui dans les années
1960 tranche avec l’esprit de libéralisation des systèmes politiques du
reste du monde.
Cet héritage n’est donc pas
vraiment réinvesti par les jeunes générations. Sauf peut être en Argentine où
le mouvement des Montoneros se revendique de Perón.
C.
L’échec des réformismes
Dans plusieurs pays, on a des
expériences de réformisme de gauche. Le plus connu entre
1970 et 1973 est au Chili avec Salvador Allende. Il est renversé en 1973 par Augusto Pinochet alors qu’il représente pour l’époque l’espoir d’un réformisme efficace.
L’espoir populaire était immense et le brutal coup d’Etat de Pinochet (renforcé
par le suicide d’Allende) va véritablement marquer les esprits en Amérique
Latine comme en Occident.
2.
Le projet de Cuba : exporter la Révolution
A.
Cuba : leader de la Révolution en Amérique Latine et dans
les pays colonisés
Dès 1959,
Cuba se présente comme la première étape de la Révolution du continent de l’Amérique
Latine. Ils se placent comme les soutiens logistiques, militaires et
symboliques de tout mouvement révolutionnaire qui voudrait suivre les cubains.
Cette ligne n’est pas celle de Moscou qui n’appuiera jamais les guérillas d’Amérique
Latine. D’ailleurs
le Parti Socialiste Populaire (PSP), n’est pas intégré au gouvernement cubain,
ce qui est significatif.
En 1966, lors de la
conférence tricontinentale qui se projette comme nouvelle Internationale,
on invite tout les mouvements de Révolution divers. Cuba s’y place comme leader
mais s’achèvera en 1969 avec l’entrée de Cuba dans la ligne de Moscou. Cette
logique d’exportation de la Révolution ne reste pas circonscrite en Amérique du
Sud, elle touche aussi l’Afrique.
B.
Les moyens de l’exportation révolutionnaire
Deux outils principaux sont
employés : l’aide militaire et l’aide financière.
L’aide militaire se fait par la
création de camps d’entraînement à Cuba où sont invités des militants pour s’armer. On y
forme des guérilleros qui doivent exporter la Révolution à l’étranger. Cuba fournit alors l’intégralité des armes
aux mouvements de lutte armée.
L’aide financière est assez
faible jusqu’au
milieu des années 1970, mais en 1976, une manne venue d’Argentine passant par
Cuba sera redistribué. Cette manne vient de la libération d’un grand patron qui
était séquestré par les Montoneros et qui confient la rançon à la banque
cubaine lorsqu’ils sentent qu’ils vont perdre face au coup d’Etat.
C.
La théorie révolutionnaire
Cuba donne l’exemple, mais
Ernesto Guevara va la théoriser. Médecin
argentin des classes supérieur il va se convertir à la théorie révolutionnaire
en rencontrant Castro alors en exil. Il
va alors théoriser le foquisme, qui vient du foco, le foyer. C’est le fait que la Révolution peut se gagner en
créant de petits noyaux de guérillas, en y plaçant quelques militants
révolutionnaires dans un milieu favorable (pour Guevara c’est avant tout le
milieu paysan). C’est une stratégie politique et militaire concrète, la
situation des paysans est si terrible dans le monde, qu’il faut leur soumettre
des idées révolutionnaires par des militants, avant de grossir et de prendre le
pouvoir. Cette théorie est efficace dans
le cas de société rurale et va donc se propager partout en Amérique Latine.
3.
Les principes de la Révolution à mener
Ces principes théorisés sont d’Ernesto
Guevara et de Régis Debray.
Le premier publie en 1961 La guerre de guérilla et le
second en 1967 La révolution dans la révolution. Dans ces deux ouvrages on
a les six thèses fondamentales de la révolution.
Tout
d’abord il n’y a pas de conditions objectives au succès de la Révolution autre
que les inégalités sociales. En particulier, le Tiers-monde est prêt pour la
Révolution. Second point, la Révolution sera directement socialiste. Troisième point,
seule la lutte armée fera la Révolution. Quatrième point, la Révolution ne doit
se faire sans alliance avec la bourgeoisie nationale, l’alliance se fera entre
la paysannerie pauvre et les classes moyennes urbaines et intellectuelles.
Cinquième point, la tête de la Révolution doit être prise par les classes
moyennes urbaines : étudiants, intellectuels, … Enfin ultime point, les partis
communistes ne sont pas fiables, il faut créer des groupes d’intervention
armés. Dans un contexte d’absence d’alternative politique, ces trois point
démagogiques vont être très repris et auront un fort succès.
II.
Deux phases de
guérillas
Toutes ces guérillas auront
toutes des points communs : la lutte armée, des leaders issus des classes
urbaines intellectuelles, pas de partis communistes et une volonté d’extension
mondiale.
1.
Les guérillas du cône Sud
A partir des années 1960, toute l’Amérique Latine voit pulluler
des guérillas. Plus particulièrement dans les pays du cône Sud avec des
guérillas plus importantes : Brésil, Argentine, Chili et Uruguay. Les origines idéologiques de ce
cône ne sont pas les mêmes, le principal mouvement armée, les Montoneros liés au parti justicialiste (partie de Perón). Au
Chili, c’est le Movimiento de la Izquierda
Revolucionaria (MIR) créé en 1967. Enfin
au Brésil, on a plein de mouvements tous
équivalents dans les années 1960 tous
issus de la scission du parti communiste : l’alliance Révolutionnaire
internationale, le MR8 (référence à la date de décès de Guevara), …
Les membres de ces mouvements
sont jeunes, issus des classes moyennes et supérieures et se retrouvent bien
dans l’avant-garde de la révolution voulue par Guevara loin des classes
paysannes et ouvrières. Du fait de la distance sociale entre les leaders et les
cibles qui devaient être touchées, on a parfois des échecs patents (problème d’analphabétisme, …).
Se revendiquant du maoïsme ou du trotskisme, certains utilisent la lutte armée
pour politiser les masses, d’autres associent guérilla rurale et guérilla
urbaine (très proche a un système de criminalité organisée).
Les années 1960 à
1967 sont celles de la réussite la plus stricte du
foquisme. Mais passé cette époque, l’insuccès va faire dériver ces mouvements
vers la guérilla urbaine et l’oubli de l’idéal révolutionnaire en cours de
route.
Ces mouvements de guérilla échouèrent
donc systématiquement dans le cône Sud. Même nombreux, bien armés et financés, ils
échouèrent, ce qu’on ne pouvait réellement prédire. L’échec vient entre autre de l’insuccès à créer une insurrection
populaire, même Guevara en Bolivie n’y parviendra pas, les paysans n’étant
pas assez frontalement opposés à leurs dirigeants. De plus, les armées et les polices se sont vite adaptées à la guerre
révolutionnaire et répondirent brutalement et efficacement grâce à l’aide d’un pays colonisateur qui
avait déjà connu cette situation en période de décolonisation, la France. La
France était alors en pleine réflexion sur la manière de faire la guerre dans
ces situations de guérilla et offrit ses services aux gouvernements en place,
notamment sur les techniques de torture. Les
régimes qui bénéficient alors de la chute des guérillas sont des régimes
militaires qui vont se construire contre ces mouvements et vont employer tout
les moyens pour exterminer les guérilleros.
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