II- L’accroissement des divisions sociales de l’espace.
Ce que l’on voit dans les quartiers bourgeois se diffusent à
l’ensemble de la société. Cela conduit à la fragmentation accrue de la ville
notamment en périphérie.
1-
Les gated
communities
Les gated communities : Quartiers
résidentiels fermés (l’accès est contrôlé) mais dont l’espace public est
privatisé. Ces quartiers ont plusieurs appellations comme barrios privados en Amérique latine ou Street Closures par analogie à l’enclosure : privatisation des
terres communes en Angleterre. Ce sont des quartiers variés qui ne présente pas
toujours les mêmes formes. Il y a plusieurs types de quartiers fermés. Ces
communautés fermées sont nés dans la Californie du Sud.
Ex : Canyon lake/ ou Leisure World : ville de 19
milles habitants ayant une moyenne d’âge de 65 ans.
C’est une sorte de copropriété mais horizontale qui intègre des règlements variés
plus ou moins contraignants ainsi que des équipements de loisirs.
Le niveau
social dans ces quartiers est variable. Il y a des très riches comme le
country club mais il y a une forte de
diffusion de ces quartiers comme une sorte de produit immobiliers. Des quartiers qui peuvent.
Ex : En Californie, seulement un tiers des communautés
fermées peuvent être considérées comme communautés très riches. 50% de ces
communautés s’adressent aux classes moyennes et classes moyennes supérieures.
20% s’adressent à des minorités ethniques et donc des classes plus modestes.
Les motivations pour habiter, sont la sécurité mais au sens assez
large, la sécurité de
l’investissement immobilier pour que les prix des loyers ne baissent pas,
par le voisinage. Il y a une volonté de réguler les comportements. C’est aussi lié à l’omniprésence du
sentiment d’insécurité et donc aussi un effet de mode.
Ces quartiers
sont majoritairement résidentiels donc les individus doivent quitter le
quartier pour aller travailler ou pour avoir d’autres services. Ce sont des
quartiers surtout dortoirs.
Ce phénomène
est extrêmement marginal, c’est seulement en 2001, 2% des individus
habitant une maison. Mais il y a des endroits où c’est plus fort que d’autres
comme en Californie ou au Texas.
2-
Fermeture, surveillance et privatisation
On constate une diffusion
des dispositifs de fermeture et de surveillance (notamment vidéo-surveillance).
C’est ce qu’on appelle l’urbanisme sécuritaire ou de
prévention situationnel : on estime que l’on va pouvoir crée une forme urbaine
qui dissuade le crime, la délinquance.
Les citadins fréquentent de plus en plus des espaces
surveillés et fermés comme les centres commerciaux. C’est une certaine marchandisation de la sociabilité.
On consomme de la sociabilité. On est obligé de consommer pour faire de la
sociabilité. Sociabilité sous surveillance.
Mais le rapport de Scot
Land Yard démontre l’inefficacité
des caméras de sécurité. Le pays le plus vidéo-surveillé, l’Angleterre
démontre que les caméras ne servent à rien. Cependant en France se diffuse se
marché porteur même si il y a encore qu’une caméra pour 1000 habitants. Le
marché de la vidéosurveillance a eu 41% de croissance entre 2003 et 2007.
Ex : A Paris< « le plan 1000 caméras ».
La « résidentialisation »
des logements sociaux. On essaie de nourrir ce sentiment d’appropriation
pour que les gens qui vivent dans une résidence est l’impression de vivre dans
une résidence « normale ».
Ex : Dijon
L’urbanisme sécuritaire se développe et est même repris par
les pouvoirs en place.
Ex : Circulaire interministérielle du 6 septembre 2010
relative à la réalisation des études de sécurité publiques lors des opérations
de rénovation urbaine.
3-
L’archipélisation des villes
Villes en archipel ou ville insulaire : plein de
petites villes dans une ville.
v
L’exemple de Managua (Nicaragua).
Ville qui a connu un
très grave tremblement de terre en 92 et en la révolution sandiniste met fin à
la dictature et met en place un régime socialiste. Mais le Nicaragua a subit 10
ans de guerre par les contras. C’est une guerre civile meurtrière qui a été alimenté
par les USA. Dans les années 90, la droite revient aux pouvoirs et ils mettent
en place un plan d’ajustement structurel et des mesures néo-libérales. Pendant
toute cette période, il n’y a pas eu beaucoup de choses de faite pour la
reconstruction de logements. On a d’un côté des quartiers aisés et des
quartiers de bidonvilles. Ce développe alors beaucoup de gated communities. Il
y a la fois des gated communities en périphéries. Le projet d’aménagement
aujourd’hui, est de faire des routes qui relient les places des classes aisées
entre elles.
Tout
l’aménagement d’une ville est conçu au bénéfice d’une minorité.
Idem à Kaboul en Afghanistan.
Il y a une
fragmentation assurée par les pouvoirs publics en grand lien avec les pouvoirs
publics.
Conclusion :
On observe donc des tendances, qu’il convient de nuancer car
en France les espaces de relative mixité demeurent majoritaires. Mais la ville
s’éloigne de plus en plus de son idéal. La ville comme partage, mélange. Idéal
qui n’a pourtant jamais existé.
C’est aussi un éloignement de la ville comme creuset de la
conscience de classe. Les principaux marqueurs de la lutte des classes sont
interprétés dans des termes détournés. On parle en termes de problèmes
identitaires : ce sont des manifestations d’antagonisme de classes. La
ville contemporaine est marquée par des réponses à des
« pseudo-problèmes ». Cela ne marche pas du tout car par exemple, la
délinquance n’est qu’un symptôme de l’accroissement des inégalités sociales. On
identifie donc des symptômes que l’on traite comme des problèmes. Cela ne règle
rien, ça les aggrave au contraire. Cela s’encre très fort dans la ville et dans
l’espace.
III- La relégation et les nouveaux espaces de pauvreté.
Du côté des classes populaires, il y a des constantes :
il y a toujours eu une certaine ségrégation
mais qui a été renforcé par les politiques de logement social. Ces
discriminations racistes ont lieu aussi dans les logements sociaux même si
c’est complétement non-dit.
Parmi les classes populaires, il y a une part importante d’étrangers et de
minorités ethniques. C’est donc une question de rapport de classes mais aussi
d’un rapport de races. Ces populations sont montrées du droit par rapport à des
territoires. On montre du droit avec une
forme accusatrice. Aujourd’hui on est dans une sorte de réactions aux
explications par les causes sociales des années 60.
1-
La relégation de certains quartiers populaires
La cause première de la dégradation des conditions de vie
est une cause générale. Ils viennent de problèmes extérieurs. On ne peut pas
comprendre ce qui se passe dans les grands ensembles si on ne comprend pas que
les problèmes des grands ensembles viennent des maux sociaux généraux.
La première cause et le contexte de restructuration économique qui explique
l’amplification de l’économie informelle.
On constate le renforcement de la concentration des classes populaires dans certains
quartiers. C’est pour cela que l’on parle de relégation. C’est l’idée qu’il y a des gens qui
sont bannis au sens juridique mais c’est aussi quelque chose que l’on vous
impose. Ce terme-là très fort est donc une image.
v
Comment on interprète cette question de la
relégation ?
a)
La notion de ghetto
Depuis les années
80, le terme ghetto est en pleine diffusion. Le ghetto est au départ le
nom d’un quartier de Venise : là ou l’ont assigné à résidence les juifs au
moyen-âge. On est en plein dans la ségrégation juridique. Les juifs n’ont pas le droit d’habiter
d’autres quartiers que celui du ghetto. Rapidement, ce crée des
auto-organisations, le ghetto est un lieu de structuration communautaire très
fort. Par extension on parle de ghetto pour parler des quartiers juifs.
Pourtant, ce n’est plus du tout la même chose, un quartier de ségrégation
légale.
Ex : Louis Wirth
écrit en 1929, le Ghetto et ce livre parle
des quartiers juifs aux USA.
Il y a au même moment une réutilisation du terme en Allemagne.
Quand on utilise ce terme en France, il
y a encore une charge plus importante du fait de la proximité avec l’Allemagne.
Dans les années 60 avec la grande migration aux USA se crée
des quartiers noirs ce qui réactualise ces logiques de ghettos. Dans les années
60, les ghettos noirs sont les espaces de grandes diversités culturelles et d’une
très intense vie collective. Ce sont dans ces quartiers que s’organise le mouvement
des droits civiques et dans les années 60, il y a eu beaucoup d’émeutes dans
les quartiers noirs américains en lien avec les droits civiques. Ce sont des
mouvements politisés.
Le ghetto
dans les années 60 et certes un espace de relégation relative mais pas de
grande pauvreté.
Entre-temps il y a eu une crise économique. Les conditions
sociales pour les personnes qui vivent dans ces quartiers se dégradent. Les
marques urbaines de cette dégradation ne sont que la conséquence indirecte de
la pauvreté qui s’étende dans ces quartiers. L’habitat se dégrade, les
commerces fermes, l’Etat se retire parfois. Il y a vraiment une crise du quartier. Les
quartiers deviennent des espaces de relégation. Ils sont distants du reste de
la ville car ce sont des poches de misère. On parle d’enclavement.
Le ghetto même aux USA, c’est une métaphore. Il y a l’idée
d’une assignation mais en même temps on développe une sorte d’auto-organisation
et d’une solidarité collective.
b) Comparaison USA/ France
Aux USA les émeutes sont spectaculaires car c’est médiatisé
pour montrer du doigt les noirs. Il y a une division très forte des classes
populaires qui est une division
raciale. Focaliser l’attention des classes populaires blanches, c’est
une façon d’éviter l’émergence d’une conscience de classes.
Aujourd’hui on parle de plus en plus de ghetto en France,
notamment depuis les émeutes
des années 80. La première émeute médiatisée et celle des Minguettes
dans la banlieue de Lyon. Après celle-là, toutes les émeutes qui ont eu lieu en
France sont liés à une bavure policière qui concerne toujours des gens qui ne
sont pas blancs.
C’est
parce qu’il y a eu ces émeutes que l’on s’est mis à parler de ghettos en France.
Les médias parlent de crise des banlieues hors il n’y a pas de crise dans
toutes les banlieues. Ces violences qui existent dans ces grands ensembles
s’expliquent par une conjonction
de facteurs. D’abord, dans les années 70, les grands ensembles sont
relativement mixtes mais grâce aux aides de la politique à l’accession de la
propriété, on fait partir les habitants les plus aisés. Ils sont remplacés par
des gens plus pauvres. C’est un effet « secondaire » de la politique
qui n’a pas été prévu. Progressivement, il y a une concentration des classes populaires. Les
habitants sont de plus en plus homogènes
socialement. Il y a une surreprésentation des étrangers dans les grands-ensembles,
notamment par la mise en place, à la même période, des regroupements familiaux.
Les gestionnaires des grands ensembles ce sont montrés assez
négligents vis-à-vis des logements mais aussi sur la politique de peuplement.
Ce contexte macro-économique pèse sur certains quartiers.
Dans les années
70, il y a eu des luttes urbaines pour demander notamment la réhabilitation des
logements sociaux, qui n’ont eu aucune conséquence. Dans un contexte de
paupérisation est apparu l’économie parallèle, celle du « sous-prolétariat ».
Dans les grands-ensembles, il n’y a pas eu de retrait des
politiques publiques mais des fermetures de commerces. Pour autant, il y a un
sentiment d’abandon des pouvoirs publics.
Ce repli des jeunes sur les grands-ensembles est accru par
la discrimination notamment une discrimination à l’adresse.
De tous cela résulte une stigmatisation des grands ensembles et de leurs
habitants.
Pour autant on ne peut pas tellement parler de ghettos en
France. Sur ce sujet, voir l’ouvrage de Wacquant.
Voici les principales distinctions :
-
Les grands ensembles français sont
pluriethniques : diversité des origines des habitants
-
Les services publics n’en sont pas absents
-
Le taux de pauvreté y est sans commune mesure
car pour accéder aux grands ensembles il faut quand même avoir un revenu.
-
La délinquance : le crime organisé avec
usage courant des armes à feux est fréquent aux USA, la délinquance en France
est plus de l’incivilité. Les homicides sont rares.
-
Les grands ensembles français sont beaucoup
moins étendus que les ghettos noirs américains.
Ce n’est pas quelque chose d’autonome, une partie de la ville, c’est
seulement un quartier.
Néanmoins, Lapeyronnie
constate une logique de ghetto dans les grands ensembles français. Dans un
ouvrage de 2008, il explique qu’il y a certaines populations qui vivent dans un contre-monde, qui
se structure en marge de la société et qui dont s’en exclue aussi elle-même.
Mais c’est logique de ghetto
ne structure pas tous le quartier des grands-ensembles.
v
Pourquoi on utilise ce terme de ghetto ?
C’est une façon
d’attribuer aux habitants des grands-ensembles la responsabilité des leurs
situations. Ce terme de ghetto comme le communautarisme est une façon de
détourner la question sociale. Il y a une dimension raciste très forte qui
n’est pas dit.
Il faut toujours être vigilant aux termes médiatiques même
si il ne s’agit pas de nier les problèmes.
2-
Les nouveaux espaces de pauvreté dans les pays
riches
Le risque est de croire que les grands ensembles sont des
espaces de pauvreté mais les
pauvres en général vivent bien plus souvent en dehors des grands ensembles.
Dans les logements privés, de petits logements sans confort. Par exemple, il
reste de la pauvreté dans les quartiers en voie de gentrification.
La localisation
de la pauvreté est très diffuse, il n’y pas des regroupements de
pauvretés. Autre exemple, il y a aussi les sans-abris qui ne sont pas dans les
grands ensembles. Mais aussi, on voit ré-émerger des bidonvilles en France ce qui est une conséquence
urbaine de la crise sociale et du désengagement de l’Etat pour la création de
logements sociaux.
Il y a plein de formes assez invisibles de pauvreté. Ces formes de pauvreté
sont très diffuses. C’est aussi de plus en plus à la campagne. On parle de plus
en plus de « bidonchamps ».
Ex : Le Gourbi de l’Etang de Berre dans les Bouches du
Rhône.
C’est souvent des individus qui vivent en lisière des
périphéries. C’est une forme de pauvreté rurale qui s’étend mais qui est très
peu médiatisée.
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