Les religions sous l'Empire
2.
De nouvelles religions populaires
Le culte de Mithra,
culte d’un dieu indo-iranien arrive tardivement à Rome au I° siècle et connaissant son apogée sous l’Empire.
Ce dieu a deux particularités : il est très diffusé dans l’armée et c’est un
culte à mystère
(il faut donc une initiation pour participer au culte). Cette religion se fait donc sur choix personnel et initiation
individuelle. Mithra est très populaire dans l’armée puisqu’on trouve des
traces de ce culte dans beaucoup de lieu le long des frontières (Rhin, Danube, …).
Ces sanctuaires sont nommés mithraea
(un mithraeum). On les retrouve par
une pièce particulière de ce culte, il y a une grotte. On trouve aussi des symboles récurrents à ce culte, Mithra tuant un
taureau. Cette représentation est identique dans tout l’Empire. De même, pour
son nom qu’on appelle Mithra le dieu invincible, le dieu soleil.
Ce genre de religion très diffusé
dans tout l’Empire fait donc face aux religions locales. Les historiens sont
allés jusqu’à parler d’un pré-christianisme. Aujourd’hui on revient sur ce
genre de thèses en soulignant que si Mithra est très
diffusé, c’est un dieu qu’on peut cumuler avec d’autres dieux. Plus
généralement, Mithra fait parti des religions orientales, terme de l’historiographie
de la fin du XIX° et du début du XX° siècle, en pleine époque d’orientalisme. On a vu dans ces religions des annonces du
christianisme, la religion traditionnelle n’arrivait pas à combler les
besoins religieux des hommes. Dans cette thèse, l’homme a besoin d’une religion et
le polythéisme n’y parvenant pas, les Romains se tournèrent vers des religions
de dieu unique ou prédominant, préparant la venue du christianisme.
Un autre de ces cultes est celui
de Cybèle, la mater magna. Venue du centre de l’Anatolie, Cybèle fut introduite à Rome pendant la
seconde guerre punique et eut un temple sur le palatin. Sous l’Empire, son
culte se diffuse depuis Rome vers les provinces avec le rite particulier du
taurobole : un sacrifice de taureau dont le sang devait asperger et
recouvrir le fidèle. Ce culte se diffuse dans l’Empire et se trouve beaucoup
dans les colonies romaines. On retrouve ce culte à Trèves comme à Mayence. Mais le culte se diffuse depuis Rome et
elle non plus n’est pas une divinité exclusive. A Mayence, on a trouvé un lieu
de culte double consacré à Cybèle et Isis.
Aucun de ces cultes ne sort donc
du polythéisme. Les religions orientales sont donc inadaptées car elles
mélangent des cultes très anciens et d’autres plus récents. C’est une lecture
téléologique qui visait à expliquer l’avènement du christianisme.
Ce christianisme débute dans les années 30 mais les premières vraies traces se
constatent dans les années 50, les années du voyage de Paul,
un des premiers disciples de Jésus qui prêche pour les non-juifs, alors que la
tendance qu’à Jérusalem on ne prêchait que pour les juifs. Le courant se diffuse très lentement, à la fin
du I° siècle on a quelques individus convertit à Rome par Paul et
quelques communautés en Asie Mineure. Au début du IX° siècle, Pline et Trajan
échangent une conversation par lettres sur la situation des Chrétiens et sur
leur traitement. Trajan dit que ceux qui renient leur dieu doivent être sauvés
et que ceux qui refusent de rendre hommage à l’empereur doivent être exécutés. Les sources historiques donnent au final
une diffusion du christianisme par bond avec en particulier au III° siècle. Ceci dit, tout le monde fait un lien
entre le début du christianisme et la fin de l’empire Romain. Cette religion
est monothéiste, s’adresse à l’ensemble de l’humanité et n’a pas de
communautarisme, alors qu’au même moment le judaïsme est un monothéisme adressé
à un peuple élu uniquement. Il y a donc un certain lien entre l’universalisation
du culte chrétien et l’homogénéisation de l’Empire ainsi que son impérialisme.
Toujours
est-il que les religions dominantes sont les religions locales à cette époque.
La formation d’une culture impériale
Avec
45 millions à 60 millions d’habitants et des différences régionales très
fortes, on peut voir ici dans quelles mesures l’Empire a unifié son peuple. En
particulier, dans les classes dominantes, de par les traces restantes plus
nombreuses que dans les campagnes.
I.
Les langues de
l’Empire : une unification linguistique incomplète
On a à faire à un Empire
Gréco-romain avec deux langues dominantes : le romain et le grec. Mais on
ne doute guère de la grande diversité des langues parlées dans l’Empire. Dans certaines régions ni le
latin, ni le grec ne s’imposent dans la vie quotidienne. Ainsi en Afrique du
Nord, on trouve le libyque, langue proto-berbère ; aux alentours de
Carthage on trouve le punique ; en Gaule et en Grande-Bretagne surtout, on
a un langage celte ; en Orient on trouve des langues qui se maintiennent
depuis longtemps comme l’araméen, langue sémitique parlée par les Juifs et
Jésus (s’il a existé) et le copte, évolution de la langue égyptienne.
On a donc des familles de langues
très différentes, mais on peut diviser sur cette base l’Empire en deux, la
moitié qui parle latin et celle parlant le grec. Cela est très important physique
ces langues sont aussi celles de l’administration qui parle latin à l’Ouest et
Grec à l’Est. Ce sont donc les langues internationales de l’époque. En Gaule, où l’on trouvait peu
d’écrit dans une société orale, on a retrouvé différents textes gaulois, en
langue gauloise mais reprenant les symboles grecs. On trouve la même chose en
latin. Cette période de flou s’achève sur la domination in fine du latin. En
Orient c’est beaucoup plus vague. On trouve là-bas plusieurs types de langues,
le copte qui reprend les hiéroglyphes anciens, ou encore en ancien copte ;
l’hébreu utilisé dans en Palestine avant tout pour des raisons
religieuses ; l’araméen et enfin le punique. Tous les textes dans ces langues locales sont en fait circonscrites à
l’usage privée. Pour tout usage public en particulier l’administration on a
le latin et le grec qui se diffusent.
Dans l’Occident, le latin s’est
imposé d’abord parce que c’est la langue de l’armée, des vainqueurs et par
l’administration. Dans les régions les plus intégrées, les langues celtes s’effacent
progressivement sauf dans les régions périphériques (Bretagne). Mais si la langue romaine est une victoire,
celle-ci est longue et progressive. En Orient, les notables municipaux
n’ont pas besoin d’évoquer leur langue puisque l’administration est en grec.
Ainsi les notables s’imposent l’apprentissage pour atteindre l’administration
romaine d’une carrière équestre ? Pour la correspondance du prince on a un
bureau en grec et un autre en latin.
Dans le cas du dialecte grec,
soulignons qu’il fut déjà la langue internationale sous l’apogée grecque avec
la koilé (langue grec internationale de
l’époque). Ainsi, l’épitaphe d’un marchand syirne installé à Lyon est
constituée à la fois de grec et de latin alors que lui-même ne devait pas
parler ces deux langues. Il y a donc
sorte d’unité linguistique.
II.
Cultures des élites
culture urbaine
Les élites adoptent la pratique
épigraphique, dit l’habitus épigraphique, dorénavant on ne met pas que des pierres tombales,
on met aussi des remerciements gravés avec des inscriptions honorifiques ainsi
que les décisions officielles. Cela questionne donc l’alphabétisation.
La culture de l’écrit est une
garantie juridique mais il est probable qu’ne minorité de personnes furent
assez cultivées, ce qui est très variables dans l’Empire selon les régions et
les milieux sociaux. On
sait plus lire dans l’armée, en Orient qu’en Occident, dans les communautés
religieuses, dans les villes. Les régions les plus alphabétisées ont jusqu’à
30% de taux d’alphabétisation, les moins alphabétisées comme la Bretagne
doivent être proches du néant. Dans le sud de la Gaule on sait par les
assiettes de potiers gravées pour faire les comptes, que ce milieu était
alphabétisé. Les dédicaces à l’empereur, très nombreuses devaient certainement
pouvoir être lues de tous. Enfin les
gens devaient savoir écrire leur nom puisque les procédures administratives
devaient être signées.
Au-niveau des élites, on ne doute
plus d’une alphabétisation très répandue. On a même des traces
d’enseignement qui tiennent davantage d’un cursus de formation à
l’administration,
d’abord les garçons débutent de manière élémentaire, on lit et on écrit.
Ensuite on va chez le grammairien,
enfin troisième étape, on va chez le
prétorien, où on apprend à parler, faire des discours, … C’est très orienté
dans la formation d’une élite politique. On a toujours des classiques. Dans les
bibliothèques, élément important dans la vie des cités, Auguste en a fondé
plusieurs à Rome, les élites s’y rendent. Les
bibliothèques sont ouvertes au public avec des lieux de détente,
d’apprentissage et d’enseignement. On y apprend des classiques : Homère,
les textes grecs allant d’Aristophane à d’autres, des textes plus récents Virgile
et Horace.
On apprend beaucoup par cœur et par poésie. C’est une culture d’imitation pas d’innovation, on recopie, on apprend
et on récite. Le tout s’accompagne de discours rhétorique (un coup on est
pour, un coup on est contre). On a alors
des villes de types villes universitaires qui se développent. Ainsi, on va
se spécialiser dans les villes réputées Otun, Bordeaux, Carthage, Taragone,
Athènes, Alexandrie, … Et le cursus vous pousse à faire quelques mois à Rome. Les méthodes pédagogiques sont cependant
assez violentes avec des enfants battus par une férule et parallèlement des
contestations étudiantes ont été retrouvées. Malgré tout les provinces possèdent leurs intellectuels romains.
Les premiers viennent d’Espagne, puis des Gaulois et des Africains et au
seconde siècle des Grecs.
Quintilien,
espagnol venu de Calagurris au milieu et fin du I° siècle, il est fils de
rhéteur et fait ses études à Rome pour retourner enseigner en Espagne. Il a eut
comme proche Galba qui l’aidera à fonder une école de rhétorique à Rome qui fut
très coté. Quintilien aura même une pension annuelle versée par Vespasien
en tant que professeur de rhétorique latine.
Apulée,
venu de Madaure en Numidie en Afrique, au milieu du II° siècle, il a fait ses
études à Rome puis à Athènes. Il parle trois langues berbère, latin et grec. Il
se revendique dans ses textes à moitié numide même s’il a écrit un roman
important en latin, La métamorphose.
Accusé de pratiques magiques par sa belle-famille qui pensait voir dans cet
homme un individu voulant l’héritage d’une femme plus vieille que lui, il fit
un plaidoyer alternant grec, latin et berbère selon les circonstances.
Aelius Aristide,
du II° siècle, vient de Mysie en Anatolie et on a des traces de ses voyages
dans tout l’Empire. Il enseigne la rhétorique un peu partout et va jouer un
rôle diplomatique suite à un séisme en Anatolie où il a rédigé un plaidoyer
auprès de l’empereur en faveur d’un soutien financier. Il y parvient. Il rédige
aussi des éloges à Rome en grec.
On peut donc être un intellectuel romain venu de tout l’Empire, la
combinaison des cultures n’est nullement pénalisante.
Dans le cas des spectacles qui ont
une place primordiale dans l’Empire, on a aussi des caractères communs et des
différences. Ces spectacles se font dans le cadre de cérémonies religieuses, on
parle de ludi en Occident, d’agones en Orient. Dans tout les cas on donne des
jeux du cirque, des spectacles scéniques ou encore des spectacles de
gladiateurs (munera). Tous n’ont pas
lieu en même temps mais s’alternent. Ces
jeux sont civiques et doivent rassembler le peuple tout en conservant la
dimension impériale. La vie civique s’organise donc autour de la figure du
prince.
Au final, on parle en histoire de
subculture pour illustrer la multiplicité des cultures dans l’Empire romain. Ce
ne sont pas des cultures inférieures mais des cultures particulières avec leur
propre fonctionnement tout en étant chapotées par la culture romaine. Les
cultures locales ne disparaissent pas puisqu’elles ne sont pas en contradiction
avec la culture romaine.
La romanité n’est pas contradictoire avec un certain régionalisme.
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