Le leader dont s'inspire le FSLN, la guérilla nicaraguayenne, Augusto Sandino, au coté du Che
2.
La seconde génération guérilla et guerre civile d’Amérique
centrale
Dans la
seconde moitié des années 1970, ces pays d’Amérique Centrale, très
soumis aux USA n’apparaissent pas comme des pays susceptibles de se révolter. Dans le Nicaragua, le Salvador et le Guatemala, des mouvements cousins
vont se dérouler. Ils sont cousins car ils s’inscrivent tous dans la
Révolution cubaine mais n’émergent que dans les années
1970. Pour échapper aux mouvements de répression policière, ils vont
former des armées populaires. Ils
quittent l’exemple des guérillas du Cône sud qui sont avant tout des guérillas
groupusculaires. Ici on a des guérillas populaires et paysannes consistantes
qui amènent à des situations de guerres civiles.
La répression politique est forte
avec des situations d’emprisonnement, de torture ou d’assassinat. On aura
plusieurs dizaines milliers de mort dans le mouvement le moins fort, environ 150 000 au
Nicaragua. Le succès de ces guérillas leur est donc fatal.
Dans le cas du Nicaragua, on
a la guerre civile de 1974 à 1979 et au
final c’est la guérilla qui gagne cette guerre et cela permet de faire accéder
au pouvoir en 1979 un président réformiste avec un gouvernement socialiste, qui
tombera bien rapidement. C’est
un succès dans un cadre légal de la guérilla.
Dans le Guatemala et le Salvador,
c’est un échec des guérillas qui
entrent ensuite dans des régimes dictatoriaux.
Ces deux pays, vont être menés sous la houlette d’une armée très répressive.
Des guérillas nées de la
Révolution Cubaine, on a le succès des guérillas du Cône Sud en politique avec
une conséquence politique forte, la légitimation des coups d’état militaires.
Dans l’Amérique centrale, les guérillas ont plus de consistance mais
généralement elles n’accèdent pas au pouvoir, provoquent des guerres civiles
vastes et si elles accèdent au pouvoir, elles tombent un peu après (Nicaragua).
"Pincohet qui est un grand enfant, car dans Pinochet, il y a hochet", P. Desproges
Les dictatures de sécurité nationales
Entre
le milieu des années 1960 et le milieu des années 1970, entre le coup d’état du Brésil en 1964
et celui d’Argentine en 1976, tout les pays
d’Amérique latine tombe sous le coup de régimes militaires sauf la Colombie au
sortir de la Violencia. Ces régimes
militaires ne se fondent pas sur la logique des caudillos, ces chefs isolés chargés d’un prestige et d’un réseau. Dorénavant, on a à faire à des armées
professionnelles avec une structure hiérarchique ou les militaires ont le
pouvoir de leur corporation, il n’y a plus d’individus isolés. Dans les
années 1970, ce sont ces institutions militaires qui vont au pouvoir et qui s’y
maintiennent par cette armée. Ces
régimes se ressemblent énormément, ils sont toujours autoritaires, très
anticommunistes, conservateurs et particulièrement répressifs à l’égard de
toute la gauche. Seule la Pérou se met un peu à part, où le coup d’Etat
militaire qui a lieu en 1968 porte Velasco
au pouvoir et celui-ci mène des réformes sociales et agraires, c’est
l’exception non-conservatrice.
Tous ces régimes ont reçu
l’appellation « dictatures de sécurité nationale » fondée sur une
doctrine de sécurité nationale, une sorte d’imaginaire commun des chefs
militaires. L’idée que le pays est en guerre permanente, une guerre souterraine
et invisible liés
à ces guérillas cachées, ces guerres idéologiques, … L’ensemble du pays doit se
mobiliser pour cette guerre. Donc en conséquence, pour cette guerre nationale,
les militaires doivent diriger l’intégralité du pays. Les mouvements de guérillas qui existent ne sont pas toujours
organisés, ce sont des excuses pour les dictatures militaires.
Ces régimes ont beaucoup marqué
la population et ont énormément divisé la population, c’est une plaie ouverte
dans l’imaginaire collectif
des pays du Cône Sud. Plus particulièrement le coup d’état chilien qui a même
eut un écho très fort en Europe. D’autant plus, que la gauche française s’étant
pour des élections alliée au Parti Communiste Français et que les contacts avec
le Chili s’étaient accrus. Salvador Allende
et son gouvernement socialiste était un gouvernement de transition apparaissant
comme un modèle pour la Gauche française. Son suicide puis l’arrivée en grand
nombre des exilés chiliens (200 000) vont véritablement secouer la France.
Plusieurs
questions en découlent. Ces Etats sont-ils intégralement militaires ? On parle parfois de régime civil militaire
puisque le militarisme touchait la population. Y’a-t-il des
caractéristiques nationales à ces mouvements ? Sont-ils juste le fruit
d’un contexte structurel de guerre froide ? Ont-ils été si terribles
qu’ont l’a imaginé avec 380 morts en 20 ans au Brésil, 3 000 en 26 ans au
Chili et 30 000 en 6 ans en Argentine ? Peut-on surtout les comparer ? Enfin les politiques économiques de ces
dictatures ont beaucoup favorisé l’ultra-libéralisme en détruisant l’héritage
social des populismes les précédents. Pourtant, ce n’est pas vrai partout,
au Chili aucun doute, au Brésil beaucoup moins.
I.
Les contextes des
coups d’Etat
1.
Les USA et l’Amérique Latine à l’heure de la guerre froide
La guerre froide éclot en 1947 et semble épargner pendant plus de dix ans
l’Amérique Latine,
des conflits périphériques éclatant en Asie mais n’ayant jamais lieu sur le
continent américain. Certes il y a un impact puisque les USA utilisent leur pouvoir
politique et économique sur ses pays en interdisant les partis communistes, qui
du coup deviennent clandestins entre 1947 et 1948. Mais ce qui fait vraiment entrer la guerre froide en Amérique Latine, c’est
la Révolution cubaine et c’est de là que les USA vont tenter d’empêcher la
« contagion », l’apparition de régimes communistes proches de
leurs frontières.
On commence par développer une
stratégie économique sous Kennedy qui met en place un plan de financement,
l’Alliance pour le progrès en 1961. C’est un système de financement
massif qui doit servir à éradiquer la pauvreté en Amérique Latine puisque selon
eux, le communiste apparait en situation de pauvreté. Très rapidement, cette Alliance montre ses limites et dès 1964, le gouvernement reconnaît son échec.
A partir de là, les USA vont
tenter de recourir à la force
pour maîtriser ces pays qui deviennent plus à gauche que ne l’accepte les USA.
Longtemps, les USA n’ont pas hésité à intervenir directement comme avec le
renversement en 1954 de Jacobo Arbenz et de son gouvernement réformiste de
gauche. Il tentait de nationaliser des secteurs et de mettre en place une
réforme agraire. Ce genre de politique d’ingérence
est possible dans les pays sous forte tutelle états-unienne et de préférence de
petite taille. Impossible de reproduire cela ailleurs. En conséquence les USA
vont former les armées sud-américaines pour lutter contre les formes de
politiques de gauche. Ainsi les colonels et généraux des armées
sud-américaines vont être invités à suivre des cours d’entraînement dans des
camps (Ecole de l’Amérique), vont financer les achats d’armes, vont traduire
des manuels militaires, … On les prépare à l’imminence de la révolution
communiste et à la manière de les combattre et de faire des coups d’Etats.
En 1964, les militaires sont donc
convaincus de cette imminence de la Révolution communiste d’autant qu’ils ont
lu des ouvrages français sur les théories militaires et de politico-répression
développées par la France suite à la guerre d’Algérie. Persuadés de la vague
communiste en Amérique Latine, ces colonels conservateurs vont donc intervenir.
2.
Les situations politiques nationales
A.
Le ralentissement de la croissance
Il y a un essoufflement
du modèle économique dominant.
L’ISI fut un mouvement d’industrialisation qui a permis une urbanisation
faisant quitter les paysans de la campagne pour se réfugier en ville, en
périphérie, dans des bidonvilles. Parallèlement,
les Etats se sont enrichis, notamment en nombre de fonctionnaires. On a donc
une hausse des ouvriers, des fonctionnaires et des urbains. Quand l’ISI
s’essouffle, ces populations sont tout de suite touchées. Les petites
classes moyennes sont exclues de l’ascension sociale, les ouvriers mis au
chômage, … Toutes ces populations vont
produire des tensions sociales dans les années 1960,
en manifestant, en occupant les usines, … Dans certains cas, elles gagnent en
portant des réformistes de gauche au pouvoir (Salvador Allende au Chili, João
Goulart au Brésil, …). L’agitation sociale est alors très forte.
L’autre partie de
la population y voit la manifestation d’une révolution communiste. Plus ces
classes urbaines se mobilisent, plus les classes moyennes supérieures et la
bourgeoisie prennent peur d’un début de révolution communiste (Isabel Allende, La maison aux esprits). Ces classes
effrayées utilisent les mêmes méthodes de contestations avec des manifestations
contre les tendances communistes de l’autre partie de la population.
B.
Le rôle politique des forces armées internationales
Dans ce contexte, apparaissent
sur la scène politique des militaires qui sont déjà intervenus dans le milieu
politique et dans le domaine public. Ils ont donc une légitimité accordée par
la population pour intervenir dans l’espace public. Mais les interventions
fréquentes des militaires dans l’espace public, ne leur permettaient pas de se
maintenir bien longtemps. Ainsi, on s’imagine que lorsqu’ils arrivent au
pouvoir, ce n’est pour pas longtemps. Ainsi,
personne n’est réellement effrayé par leur arrivée au pouvoir puisqu’on estime
qu’ils vont simplement rétablir l’ordre, mettre les plus extrémistes en prison
puis quitter le pouvoir. Ainsi en 1964, le Brésil n’est guère ému de cette
arrivée au pouvoir, De Gaulle ira même le rencontrer au début de son mandat
brésilien.
Au fur et à mesure que ces coups
d’éclats ont lieu partout, il apparaît au pouvoir public qu’on entre dans des
régimes militaires durables.
C’est à partir de ce phénomène que se construisent des états militaires avec
chacun leur contexte particulier.
II.
Les Etats
militaires : entre répression et refondation sociale, économique et
politique
1.
Les projets politiques militaires
Le point commun de tous ces
militaires est de rattacher leur contenu politique à une doctrine nationale qui apparait sous ses premières
formes juste après la Seconde Guerre Mondiale, simultanément dans tout les
pays. Le cœur de cette doctrine est que
les nations latino-américaines dans un contexte de guerre froide, sont dans une
situation de guerre imminente. L’ensemble de l’organisation sociale et
politique doit s’orienter vers la préparation de cette guerre.
L’organisation sociale, la culture, les institutions, … Toute la société est
orientée et mise à contribution dans cette logique de guerre totale. Les colonels latino-américains appliquent
cela à des pays en paix. Le système politique, la production et la société
doivent être ordonnées, disciplinées, soumises à des élites compétentes et
formées à la guerre. C’est une forme d’idéologie totale.
Cette idéologie est tellement en
rupture avec les politiques précédentes, que les militaires eux-mêmes vont
parler de « révolution » pour qualifier ce changement radical. Au Brésil, le coup d’état est
appelé la Révolution démocratique et rédemptrice. Ces coups d’état, pensés
comme des révolutions, vont avoir de forts impacts. Les militaires argentins vont
réformer les mathématiques en condamnant la théorie des ensembles, trop
communiste selon eux. Ces coups d’état
sont donc issus des imaginaires conservateurs très anciens et en particulier de
l’imaginaire de l’ennemi intérieur. Cet ennemi est alors le communiste et
l’armée peut sauver le peuple de cette menace.
2.
Les acteurs des nouveaux régimes autoritaires
En premier lieu les postes de
gouvernement, de provinces, … Tout ces hauts-postes sont tenus par des
militaires avec des organisations quelques peu différentes. Au Chili, il y a un
chef et c’est ce chef qui organise tout : Augusto Pinochet. Le coup
d’état de Pinochet eut lieu le 11 septembre 1973.
Ni l’Uruguay, ni l’Argentine n’ont connu ce pouvoir personnaliste mais on
plutôt possédé des triumvirats
avec un chef militaire pour l’armée terrestre, un autre la marine et le dernier
l’aéronautique. Enfin, au Brésil, les
militaires furent élus par un Congrès épuré, une loi favorable aux
militaires, … Mais les élections eurent tout de même lieu avec un total de cinq
généraux qui deviennent présidents du pays lors des élections successives.
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