- La naissance d'un urbanisme princier
L'installation de princes
laïcs dans les villes et la destruction d'une commune par les
Princes pour prendre le pouvoir.
Les transformations de
l'espace urbain parisien ont connu leurs balbutiements fin du XII°
siècle sous l'influence du roi qui vit de plus en plus
à Paris. Des Nobles décident alors de s'installer autour.
D'abord ce sont des ecclésiastiques, évêques et archevêques,
plutôt sur la Rive gauche qui était déjà l'emplacement de
seigneuries ecclésiastiques. On trouve dans les plus anciens,
l'archevêque de Reims puis de Rouen. L'Hôtel des abbés de Cluny
construit sur les anciennes thermes romaines, sera quasiment toujours
habité par ces abbés. Illustrant leur richesse, ils vont lui donner
un faste particulier toujours visible aujourd'hui.
Suite aux abbés, les
aristocrates viennent s'installer. Les premiers furent les ducs de
Bourgogne, installés sur la rive gauche très habitée par des
ecclésiastiques. A partir du XIV°
siècle, c'est la rive droite qui devient tendance chez
les Nobles. Les comtes de Bourgogne en investissent un proche du
Louvre d'abord, puis s'implantent dans l'Hôtel d'Artois ensuite.
Cette mode de la rive droite tient de nouveau au roi. Charles
V instaure un bipolarité palatiale avec le vieux
palais Louvre d'une part et le logis royal de Saint-Pol d'autre part.
Le roi alterne entre ces deux résidences et met à la mode
l'installation dans la marais. Cela est facilité antérieurement
par des travaux ecclésiastiques qui asséchèrent le marais qu'il y
avait à cet emplacement. L'hôtel de Clisson en est encore une trace
aujourd'hui. Ces opérations d'installation d'aristocrates sur la
rive droite se firent sur un temps long. L'hôtel de Bourbon
entre 1300 et 1404 vit ses propriétaires acheter plus de 300
propriétés par tout les moyens possibles (argent, menaces,
violences, …). Ils ont acheté un quartier entier sur lequel ils
construisirent leur hôtel particulier. Cette concurrence entre
Nobles a conduit à une diminution de la mixité sociale dans le
centre de Paris. Les pauvres furent donc évincés de ce quartier.
Ainsi quand on regarde les impôts parisiens, on réalise que
certains quartiers payent plus d'impôts que d'autres, ce qui
n'existait pas avant.
La ville d'Avignon en
est un autre exemple. Le palais se construit sur un espace très
resserré. Quand la papauté est arrivée, les cardinaux ont saisit
des logements, les « livrées ». Rapidement, ils désirent
agrandir leur prestance et développent des hôtels massifs. 70
bourgs apparaissent alors autour de la ville d'Avignon.
Selon Pierre
Monnet, cet urbanisme sauvage et princier se développe
partout en Europe. En Germanie, dans la seconde moitié du XIV°
siècle, il existe deux pôles de développement : le palais
princier et les clubs aristocratiques (cercles de sociabilité
réservés aux aristocrates de l'Empire et aux riches marchands).
Autour du palais de la commune et de ses clubs se développe la ville
comme à Augsbourg.
On a donc rapproché
cela du second type d'installation princière, où une famille Noble
prend possession de la ville sur la Commune. C'est le cas à Milan
comme l'a montré Boucheron (???). Les Visconti
sont présents dans les élites communales dés 1270
et se servent des institutions de celles-ci pour la renverser, avant
de supprimer ces mêmes institutions. En 1311,
ils s'en servent à leurs avantages et prennent le contrôle de la
ville. Ils vont alors marquer leur présence dans l'espace urbain
par un programme toujours identique ou presque. D'abord ils
établissent une forteresse au cœur de la ville mais en marge de
l'hypercentre pour se protéger des fidèles à la Commune. Ensuite
ils s'installent au cœur de la ville en s'accaparant le Broletto
qu'ils développent sous forme de forteresse. A cela ils développent
une décoration des portes de la ville chantant leurs louanges.
Enfin, ils financent les édifices religieux pour masquer leur
domination brutale.
Cela s'applique aussi
aux autres villes qui passent sous leur pouvoir. Progressivement la
famille Visconti prendra le pouvoir sur 122 communautés de la
région. L'organisation urbaine sera toujours profondément
réaménagée. A Parme, séparée par un fleuve, une partie de la
ville est réservée aux fidèles de la famille, l'autre est réservée
aux alliés des Visconti. Cette politique passe aussi par la
multiplication des monuments qui proclament une ode à cette famille.
A la fin du Moyen-Age,
une grande partie des communes du Nord de l'Italie sont prises par de
grandes familles. A Ferrare la famille Este, à Florence les
Médicis, à Vérone les Scaligerron (???), … Des fois cela
aboutit au développement de nouvelles villes. Le village de
Corsignano, lieu de naissance de Pie II devint un projet
développement à la gloire du pape pour finir par se nommer Pienza,
mini-cité idéale jamais aboutie et limitée à l'hypercentre. La
petite ville Urbino fut transformée en palais. Le prince Federico de
Montefelto (1420 – 1482) a bâti sa fortune en louant ses services
de mercenaires. Avec l'argent accumulé, il transforma la ville
d'Urbino en faisant construire un immense palais à sa gloire, une
sorte de ville dans la ville. A l'intérieur, ce prince s'y met en
scène comme un grand intellectuel comme dans son studiolo ou
sur la prince principale du palais et par extension de la ville,
alors qu'il est avant tout homme de guerre.
Certaines cités
idéales sont restées sur papier mais influencèrent beaucoup
d'intellectuels de la renaissance. La plan de la Sforzinda de
Filarète était une ville circulaire avec des défenses en étoiles
censée assurer la protection de ses habitants. On poussait à
l'extrême la réflexion en installant cette ville à la campagne
pour exclure les populations dont on ne voulait pas.
- Des villes conquérantes
L'espace rural autour
des villes est considéré comme un espace de future domination de la
ville. L'essentiel des détenteurs du pouvoir vivait longtemps à la
campagne, à partir du XIII° siècle, l'aristocratie vécue en
ville et fut imitée par une bourgeoisie naissante. Les rapports
de domination s'inversent au XIII° au
XV° siècle.
Dans un premier temps,
l'investissement à la campagne vient des bourgeois. Ils achètent
des terres, des moulins, des fours et des troupeaux nombreux. Coulet
et Stouff présentèrent
cela avec le cas des troupeaux. Les bourgeois achètent des
troupeaux non seulement pour alimenter la ville, mais aussi pour
avoir de la laine, dans le cas de troupeaux d'ovins, qui alimente
l'artisanat textile de la ville. Les bourgeois ont contrôlés
progressivement ces troupeaux allant jusqu'à posséder tout les
troupeaux dans un rayon de 40 kilomètres autour de la ville d'Aix. A
Arles, même processus avec un rayon plus faible, de 20 kilomètres.
L'emprise sur les espaces campagnards est considérable.
Dans le cas de la
ville de Lyon, les ecclésiastiques sont les premiers à investirent
avant d'être imités par des aristocrates et des bourgeois de la
villes. Selon le Vaillant de 1388 (registre marquant les
propriétés des habitants de Lyon), la ville avait investit un rayon
de 20 kilomètres autour de la ville, en 1483 on est arrivé à 30
kilomètres. Cela peut transformer radicalement l'espace rural.
Dans le cas du Bordelais notamment, l'achat de terres alentours a
permis le développement de vignes, dans la région de Graves, il n'y
a plus que de la vigne et les céréales ont disparu.
Cette domination
économique devient à son tour de plus en plus politique notamment
dans l'espace italien ou certaines villes puissantes investissent les
campagnes pour dominer les seigneurs vus comme menaçant les
Communes. Dans le cas de la ville de Florence, les campagnes
alentours voient pousser des villes neuves en 1290 sur injonction de
la Commune. Pour marquer la décision une charte de franchise très
libérale est instaurée. On attire la population des campagnes.
Systématiquement, la Commune de Florence à établi des terre
nuove sur des domaines des Ubaldini, fortement opposés à la
Commune. De plus, on attire des chevaliers dans ces villes en
interdisant les grands nobles d'y posséder quoique ce soit. Ces
petits chevaliers censés défendre ces villes nouvelles vont en
réalité attaquer et piller les seigneurs environnants assurant le
renforcement de Florence.
Ces villes vont
ensuite tenter de récupérer des espaces sous leur domination qu'ils
nommeront contado. Dans cet espace tout les
villages doivent des redevances à la ville, des corvées et un
service militaire. A partir du XIII°
siècle, les villes dominantes imposent des potestas
dans ces contado qui lèvent des redevances, a des
droits de justice, … Même les seigneurs ruraux doivent s'y
soumettre puisqu'ils désirent de plus en plus venir s'installer en
ville, pour cela ils se soumettent partiellement à l'autorité du
potestas.
Par la suite ce n'est
plus juste contrôler les campagnes autour de la ville mais conquérir
les terres pour former de véritables petits États territoriaux. En
1450, on a une multitude
d'États en Italie (Duché de Milan, République de Florence, …).
Les Visconti vers 1330 n'ont que quelques villes dans un premier
temps puis accaparent un total de 122 communautés en 1447. De même,
Venise qui est une République, lance une politique de la « terre
ferme » qui abouti à la domination d'un territoire de 30 000
km², côtoyant le duché de Milan. Le seigneur ou la République
dominant cet espace détient un pouvoir économique, de justice,
d'armée, …
Ces multiples États
se font toujours la guerre et c'est l'âge des condottieres.
La ville de Venise a 16 000 cavaliers, Milan 18 000 et Florence 10
000 en 1422. D'abord la lutte est entre Florence et Milan, puis
Venise s'allie à Florence. Il existe des trêves mais les guerres
redémarrent assez vite. Les cités-États sont le propres de
l'Italie ceci dit. Par contre toutes les villes ont un objectif
d'extension de leur territoire qui aboutie à la volonté des
Occidentaux de conquérir de nouveaux espaces.
Devant Jérusalem
Les
Européens à la découverte de nouveaux espaces
L'amélioration de la
sécurité dans les déplacements internes à l'Occident pousse les
gens à se déplacer pour faire de longs voyages, sur de longues
distances pour des longues durées. C'est donc l'essor des
pèlerinages anciens ou nouveaux. On a des gens du commun qui
croisent des marchands qui eux font des allers-retours dans
l'Occident via des trajets de mieux en mieux balisés (auberges,
écuries, …). C'est aussi un essor des réseaux sociaux, le
monde est de mieux en mieux connus.
Mais des espaces
inconnus existent encore hors de l'Europe. On va les chercher sous
deux logiques : religieuse et commerçante. La première pousse
les pèlerinages jusqu'à la Terre Sainte. Les Occidentaux qui
voyagent perçoivent alors les pays traversés et leurs habitants de
manière hostile (menace de sécurité, occupants les lieux saints,
…). Dans le cadre commercial, les marchands privilégient les
meilleurs rapports possibles pour favoriser les échanges, les
sécuriser, les rendre avantageux aussi. Mais ces deux logiques
antagonistes pouvaient se retrouver dans des objectifs communs. On
constate que les périodes de trêves entre Croisades sont alors
l'occasion d'un essor du commerce. A l'inverse, les entreprises
commerciales qui ne nécessitaient pas de conquêtes de territoire le
deviennent avec la logique qu'il s'agit d'assurer la sécurité des
convois marchands, pouvant aboutir à des violences. Ces rapports
sont donc agressifs avec le monde hors de l'Occident. Mais toujours
est-il que ces effets commerçants et religieux, les individus
s'installant dans ces espaces partagent une échange culturel qui
donne envie de découvrir de nouveaux espaces et de nouvelles
cultures dans les sociétés occidentales. La curiosité des
Occidentaux est éveillée. Cela débute au XIII° siècle avec la
multiplication des explorations vers soit des espaces connus depuis
l'antiquité (Asie), soit vers des lieux totalement inconnus.
- Le temps des croisades : une ouverture limitée par le rejet de l'altérité
- Les croisades, une entreprise de conquête de territoires
L'Église assurait
vouloir sécuriser le chemin à Jérusalem mais dés le départ, il
s'agit de conquérir des territoires. La première fois que cela est
lancé c'est sous Urbain II
au concile de Clermont et cela à rencontrer un immense succès
auprès des populations. Cela peut s'expliquer par la
valorisation des armes à cette époque avec une aristocratie qui se
définissait par les armes mais sans devoir se battre entre chrétien.
La croisade permet de l'exercer en-dehors de l'Occident. En
quelques mois, 40 000 hommes partent vers Jérusalem mais seulement 4
000 à 5 000 aristocrates. La majorité est donc issue de la
bourgeoisie ou de la paysannerie aisée. Ce n'est pas un mouvement
d'élite. Entre 1095 et 1099, un total de 100 000 hommes
partiront durant cette période.
Cela vient de l'appel
d'Alexis I, empereur
byzantin qui avait appelé à l'aide les Occidentaux contre les
Turcs. Les croisés espéraient donc être bien accueillis à
Constantinople. Mais dés arrivés, l'Empereur exige un serment de
vassalité de ces hommes. Il exige que les territoires conquis par
les croisés, soient des terres vassales à celles de l'Empereur. Les
croisés de la première années sont vite tués en Asie mineure.
C'est la seconde vague de croisés qui avancera plus loin en faisant
les sièges de Nicée et Antioche. Pourtant, les croisés vont se
diviser entre ceux qui se concentrent à Antioche et ceux qui veulent
soutenir le prince d'Edesse.
Baudouin de Goulogne part
à la tête de ce courant et formente un complot pour faire chuter le
prince d'Edesse et prendre le trône du prince
Thoros. Il en naît alors une principauté d'Edesse en
mars 1098. En juin
1098 Bohémond de Tarente
va achever la prise d'Antioche et y installe une autre principauté
tout en refusant d'être vassal de l'Empire byzantin. Il va donc
lutter longtemps contre Byzance. Le troisième État latin sera celui
de Jérusalem fondé une fois que la ville est prise en juillet
1099.
Cela crée un élan
d'enthousiasme en Occident qui envoie de nouvelles troupes en terre
Sainte et heureusement vu que les deux tiers des Second croisés
furent décimés. Godefroy de Bouillon
prend la tête de la ville sainte et prend le titre d'avoué du
Saint-Sépulcre. En 1100, Godefroy meurt et son frère Baudoin, roi
d'Edesse, prend sa suite et devient roi de Jérusalem. Il exerce
un pouvoir seigneurial en confiant une partie du territoire à ses
fidèles, devenant des vassaux liges pouvant donner eux-mêmes des
fiefs à d'autres vassaux. Les premiers croisés prudents
s'installent dans les villes principales et tentent au bout de
quelques années de coloniser les campagnes. En particulier Godeffroy
de Bouillon avait donné aux chanoines du Saint Sépulcre des terres
alentours pour y installer des colons européens. Ces chanoines
créeront la Grand Mahomerie et la Petite Mahomerie. Les
populations qui y viennent s'installer sont essentiellement
espagnoles car habituées aux espaces de conquêtes sur les
Musulmans, mais il y a aussi des Provencaux et des Italiens. Enfin
naît le Comté de tripoli, bande de terre reliant Antioche et
Jérusalem et assurant un couloir au déplacement des troupes
croisées. Io est commencé en 1103 et sa conquête s'achève en
1107.
En 1144,
les premières défaites arrivent avec la perte du Comté d'Edesse
ce qui pousse Eugène
III à faire appel à une seconde croisade en
décembre 1145 et Saint
Bernard leader cistercien, pousse à intervenir. C'est
une croisade très royale avec des rois et des aristocrates notamment
mais sans aucune ferveur populaire. Censée reprendre le comté
d'Edesse, c'est un échec, le roi de France parti en pèlerinage
laisse les troupes en plan et elles s'organisent mais vainement
contre les troupes musulmanes. Saladin
va réussir à fédérer les troupes musulmanes contre les croisés
et Jérusalem tombe le 2 octobre 1147.
Il ne reste qu'une zone autour de Tyr et une partie de comté de
tripoli.
Un troisième appel à la
croisade a lieu alors.